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REVUE DE PRESSE – LA TRILOGIE INFERNALE : LES SELEKA, LES ANTI-BALLES AK ET LA TRANSITION

La Nausée, dégoutante, puante, pestilentielle fond sur Centrafrique et ses habitants vulnérables et l’enveloppe de son odeur de division, de haine. Elle ruisselle sa couleur rouge-sang sur eux comme un torrent qui les entraine vers les chutes. Cette trilogie infernale véritable prédatrice entretient le conflit, l’anarchie pour non seulement les priver de la liberté d’aller et venir pour subvenir à leur avenir, les dépouiller de la  vie. Mais sait-on, à l’instar de J.P. Sartre que « quelque chose commence pour finir : l’aventure ne se laisse pas mettre de rallonge ; elle n’a de sens que par sa mort ». Les selekas s’effritent et périront. Les anti-balles AK divisés, disparaitront. La transition fragile et quasi-inexistante ne s’éternisera point. Centrafrique demeure et demeurera malgré les turbulences que les deux premiers lui infligent.

Séleka, rouleau compresseur de la mort et de la division
à la recherche d’une nouvelle mutation

Pendant que les voix s’élèvent et appellent au désarmement, les selekas, selon Jeune Afrique, prennent de l’envergure, tentent de développer leur stratégie et devenir incontournable dans l’avenir du pays. Dans cette perspective, « une délégation de la branche politique de la Séléka devrait prochainement se rendre à Brazzaville par vol spécial au départ de Bangui », a annoncé ce jour, lundi 02 juin 2014,  le journal. Les sélékas qui n’ont pas de moyens logistiques aériens se font toujours prendre en charge par ceux qui normalement devraient les combattre.

C’était le cas à Ndélé au nord du pays. Il y a un mois et pendant 3 jours de congrès, la communauté internationale, la Misca, le sangaris ont autorisé et permis aux selekas de se réorganiser, de se regrouper, de se proclamer »Forces républicaines » et conventionnelles, de créer des structures de gestions administrative et militaire : un état major général dirigé par le général Joseph Zindeko et un organigramme politique notamment, les services de renseignements et des opérations avec siège à Bambari. Est-ce une stratégie militaire d’obtenir plus de renseignements afin de les affaiblir et de les anéantir progressivement ?  Le centrafricain devant cette conspiration, cette affirmation alambiquée  dite « soucieuse d’apaiser les inquiétudes de la communauté internationale concernant la création à Ndélé d’un nouvel état-major, l’ancienne rebellion devrait prochainement dépêcher une délégation auprès des chefs d’État de la sous-région », reste ébahi et dubitatif. « A Brazzaville, a poursuivi le journal, l’objectif est de rendre compte au président Sassou Nguesso, médiateur de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale en Centrafrique, des résultats du congrès du mouvement qui s’est tenu le 11 mai à Ndélé (Nord). La délégation se rendra ensuite au Cameroun, au Gabon, en Guinée équatoriale et au Tchad. Les anciens rebelles cherchent à apaiser les inquiétudes de la communauté internationale concernant la création à Ndélé d’un état-major » dirigé par le général Joseph Zindeko.

Pour mener à bien cette démarche, les selekas font le ménage dans leurs rangs. Selon une enquête interne, a rapporté Jeune Afrique, ce lundi 02 juin 2014, que « le général Mohamed Moussa Dhaffane serait à l’origine de l’affrontement qui, le 24 mai à Bambari (Centre), a opposé des éléments de la rébellion centrafricaine à la force française Sangaris. Il lui est reproché d’avoir ordonné le mouvement des pick-up lourdement armés qui ont échangé des tirs avec des soldats français. Sur la base de ces éléments, l’état-major des selekas pourrait envisager de procéder dans les prochains jours à l’arrestation du général Dhaffane, a conclu le journal.

Le front anti-désarmement : la communauté musulmane

Selon Rfi avec l’AFP et la presse internationale  les musulmans ont organisé dans la matinée, suite aux violences de vendredi qui ont fait au moins trois morts, une  marche pacifique contre le désarmement dans le PK5, ce samedi 31 mai 2014. « Non à l’injustice de Catherine Samba-Panza », « Non à la partialité et oui à l’égalité et à la liberté pour tous », « Non au désarmement des musulmans opprimés. Nous ne voulons pas être à la merci des anti-balles AK », pouvait-on lire sur certaines pancartes tenues par les manifestants, ont rapporté La press Afrik et Afriquinfos avec Le Monde. 300 à 400 musulmans de PK5 ont pris part à cette manifestation, ont accusé la présidente Samba-Panza qui s’est engagée dans son discours à la radio à ce que le « désarmement tant demandé se fasse partout », voire au PK-5, de partialité.  « Ce qui nous a choqués, c’est d’abord qu’elle ne nous considère pas comme étant des Centrafricains » a expliqué, Saoudi Dodo, le porte-parole de la communauté musulmane du PK5, à La Croix avec l’AFP, avant d’ajouter : « Vous savez, elle est incapable de nous sécuriser ; elle est incapable de nous protéger. Elle ne désarme pas les bandits, les anti-balles AK qui nous attaquent mais elle veut nous désarmer nous qui sommes des victimes ».

De ce point de vue, tous les observateurs concèdent l’incapacité de la présidente et son gouvernement à gérer et à maîtriser la crise. Aucune stratégie ni feuille de route militaire de désarmement n’a été présenté aux forces internationales ou connu à ce jour du centrafricain, le premier concerné. « Pendant les six mois qu’on a connu la crise, a ajouté le porte-parole des musulmans, on a toujours été agressé mais madame la présidente n’a jamais tenu un discours d’apaisement, même pas un discours pour que l’on arrête tout ce que nous avons vécu ». Les manifestants ont dit « non » au désarmement et ont exigé que les Nations unies les évacuent de Bangui « Tous les musulmans sont prêts aujourd’hui à quitter le Kilomètre 5, à quitter Bangui, à quitter même la République centrafricaine ».

Dans son reportage » Bangui s’enflamme derrière les barricades » du 30 mai 2014, la correspondante du journal Libération Florence RICHARD Bangui, à a rapporté le soutien des responsables militaires et politiques des selekas.

«Nous ne sommes pas d’accord, l’état-major n’est pas d’accord avec cette décision», a insisté le capitaine Ahmad Nijad Ibrahim, porte-parole militaire des Seleka, chassés de l’ouest et de la capitale du pays mais toujours présents à l’est et au nord. «Pourquoi ne pas chercher une solution politique ? La présidente fait comme si elle voulait faire disparaître tous les musulmans et encourager la partition du pays. Ils ne pourront plus se défendre s’ils sont désarmés. Si le gouvernement ne peut pas assurer leur sécurité, il faut que la communauté internationale prenne ses responsabilités et les évacue vers le Nord », a-t-il proclamé.

Le front pro-désarmement sans condition : les non-musulmans 

Du côté des non-musulmans, l’assassinat d’une quinzaine de personnes, mercredi 28 mai, dans l’église Notre-Dame de Fatima, a été le détonateur de la contestation. Il est encore difficile de sonder la profondeur du sentiment mais des milliers de manifestants ont exprimé, jeudi et vendredi. Pour eux, « les musulmans sont là pour nous (les) tuer, si vous voulez faire la paix, il faut désarmer le PK-5 », a clamé Brice, devant les sangaris, selon RFI du samedi 31 mai 2014. Dans d’autres quartiers de la ville, le mot d’ordre est partout le même, trois jours après le massacre de Fatima que les non-musulmans on attribué à des groupes armés musulmans : « il faut désarmer le PK-5 ».

Dans ce contexte, les appels au désarmement se sont multipliés et sont portés au cœur des préoccupations des politiques centrafricains. Sur les barricades dans les rues de Bangui dans les manifestations, cette fois, des non-musulmans,  l’ancien ministre, Jean-Serge Bokassa a fait entendre sa voix au micro de RFI publié ce dimanche01 juin 2014, et a déclaré que « le PK-5 jouit d’un statut privilégié » ce qui est « inacceptable ». Il a d’abord exprimé l’indignation des manifestants avant de décliner que la marche honore «  la mémoire que toutes ces personnes qui ont trouvé la mort dans cet attentat de Fatima ».

Trois revendications précises sont porté au faîte de la manifestation : le désarmement du PK-5, le retrait du contingent burundais « prompts, selon Jean serge Bokassa, à tirer sur des civils alors qu’ils sont venus ici pour désarmer des groupes armés », rendre les FACA, opérationnelles. « Il est inconcevable, a-t-il martelé, qu’un Etat digne de ce nom puisse ne pas avoir son propre système de défense, de sécurité. Nous ne pouvons pas assister … aux opérations de désarmement,… sans que nous même nous (Forces Armées Centrafricaines) puissions y prendre part ».

Toutefois, la voix du Rassemblement Démocratique Centrafricain a souligné son un soutien aux autorités de la transition en réclamant plus d’efficacité dans le désarmement de tous les groupes armés. « Il faut absolument que le désarmement se fasse et cela sans condition, sur tous les groupes armés et sur toutes les forces non conventionnelles », a rappelé vivement Blaise Fleury Hotto, porte-parole du RDC, qui veut réussir la transition pour un retour à l’ordre constitutionnel.

Bangui brûle, Paris maintient son cap

Le gouvernement transitoire aux yeux de beaucoup d’analystes, est dépassé par la situation. Des morts, des violences quotidiennes tant en provinces, dans les villes et villages qu’à Bangui : les violences meurtrières de Dékoa,  des personnes enfermées dans une maison et incendiée à Dissikou, les tueries dans les villages à Bambari et ses environs, Grimari et l’attaque de Fatima, le chasseur tué à Kabo attribués aux selekas et aux anti-balles AK… Partout les groupes armés dictent leurs lois. Mais la France affirme que le pays est en voie de stabilisation. Paris s’en accroche pas moins à un certain nombre d’avancées positives mises en avant. Paris veut croire qu’il s’agit d’une poussée de fièvre aussi brutale que passagère. Paris tente de tout minimiser. Paris ne veut pas prendre des responsabilités avant l’arrivée de la Minusca. Paris évite l’affrontement et pratique la stratégie de l’évitement. Paris joue la montre dans ce chaos sombre et inhumain sachant que « le gouvernement de la présidente Catherine Samba-Panza est totalement tétanisé face à cette nouvelle vague de violences à Bangui », s’est inquiété Didier Niewiadowski, ancien diplomate à l’ambassade de France à Bangui entre 2008 et 2012, dans le reportage de l’envoyé spécial de Libération, Thomas Hofnung du vendredi 30 mai 2014. La communauté internationale se heurte encore et toujours aux mêmes obstacles : la haine, l’insécurité et les tueries.

L’autre racine du mal : Le Soudan

Les racines du mal en Centrafrique, de sa descente dans les latomies  se trouvent, non seulement au Tchad, ce que tout le monde sait, mais sutout au Soudan. « On ne peut pas isoler ce qui se passe en Centrafrique de son environnement régional », a accusé une source proche du dossier, qui pointe le rôle de Khartoum depuis le début de la crise à Bangui, sous la plume du correspondant de  Libération, Thomas Hofnung. Pour ce correspondant, selon cet observateur, l’un des tenants de la ligne dure de la Séléka, Nourredine Adam, séjournerait actuellement à Nyala, dans la province limitrophe du Darfour soudanais. «En grande difficulté sur le plan intérieur, le régime de Khartoum peut être tenté de semer le chaos à l’extérieur de ses frontières pour essayer de survivre», a ajouté ce même observateur.

Vraies-fausses manipulations politiques
La volonté certaine de désarmement

 « Je ne comprends pas la raison de toutes ces violences », a déclaré Mme Samba Panza, soulignant des « avancées notables » ces derniers mois dans la sécurisation du pays qui ne plaisent pas à tout le monde.

L’attaque de Fatima qualifiée « d’acte terroriste » et de « complot politique » a enfin sonné le glas pour le désarmement de tous les groupes armés sans condition. « Il y a des ambitions, avérées, cachées. Ce sont ces agitateurs qui en sous-main essayent de manipuler, d’instrumentaliser les jeunes pour des raisons purement politiques » a relayé Jeune Afrique. Aucune précision sur l’identité de ces « agitateurs » n’a été balbutiée. Mais « des enquêtes sont en cours. Dès que nous aurons des faits avérés, je pourrai en parler de manière plus précise », a-t-elle dit.

Quant au Premier ministre centrafricain André Nzapayéké qui avait déjà attribué jeudi ce regain de violences à « un complot planifié » par des « hommes politiques très proches du pouvoir » dont certains se trouveraient « autour » même de son propre cabinet et de celui de la présidente, a rapporté Afriquinfos. Il a exhorté dimanche la population à reprendre le travail, ce lundi 02 juin s’engageant à « désarmer l’ensemble du territoire ».

La volonté certaine : on ne désarmera pas dans le désordre…

Joseph GRÉLA

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