Grand format de J.Gréla

BANGUI / KOSOVO

Bangui, dans le sillage d’un Kosovo centrafricain ?
Quartier Km5, véritable bunker, fourmilière d’armes

Un quartier dans une ville, Km5, « quartier populaire de Bangui », « zone 5, quartier du péché », chantait un des musiciens du Canon Star.  Km5 n’est plus ce quartier commerçant populaire vers lequel tout le monde convergeait sans distinction et trouvait ce dont il avait pour besoin, ce dont il avait envie. Avec sa gâchette facile, Zone 5 s’est érigée en véritable bunker contre lequel les anti-balles AK ont entamé un harcèlement pour éventuellement éjecter les selekas. A ce genre de jeu, malheureusement, la communauté musulmane, considérée comme acolyte subit des exactions multiples.

Dans ce contexte, ce dimanche tous les quotidiens internationaux : Voix du nord, la Libération, Nice Matin, Corse matin, la Croix… unanimes, ont relayé  l’information de l’AFP.

Dans ce quartier, ce que la Misca traite de pillards et d’anti-balles AK ont tenté depuis des semaines d’y pénétrer pour dévaliser les centaines de commerces qui s’y trouvent, appartenant très majoritairement à des musulmans.  C’est ainsi que le quartier de Cattin s’est retrouvé au cœur d’affrontements entre les anti-balles AK et des hommes armés retranchés à la mosquée centrale. Les forces de Sangaris et la Misca ont aussi été prises à partie, a-t-on appris dimanche auprès de la Misca. « Quatre personnes, dont deux sujets musulmans, ont été tuées et sept blessées au PK-5 dans des affrontements entre groupes armés, notamment des anti-balles AK et musulmans retranchés dans ce secteur visé par des attaques d’individus armés depuis plusieurs semaines », a expliqué à l’AFP, sous couvert d’anonymat un officier de la Misca. Quant à Henri Vigner, un habitant de Cattin, il a fait savoir à au réseau des journalistes des droits de l’homme  en visite à la croix-rouge centrafricaine, qu’il « ignore encore les raisons de ce nouveau regain de violence et que les gens sont obligés de rester terrés à la maison». Le général des Séléka Abdel Kader Kalil a, de son côté, affirmé que les altercations ont débuté lorsque des déplacés musulmans sont sortis s’approvisionner dans le quartier, déclenchant l’hostilité des Anti balles AK.

Il est à noter que les anti-balles AK sont des miliciens, majoritairement non musulmans, qui se sont, dans un premier temps, opposés aux exactions des combattants essentiellement musulmans de la Séléka, avant de s’en prendre à la population musulmane. L’AFP précise que « les affrontements ont éclaté à plusieurs endroits à la fois, amenant les forces internationales à s’interposer pour faire cesser les hostilités. Mais celles-ci ont été prises à partie et ont riposté », selon cet officier.

Ni la Misca, ni la force Sangaris n’ont donné de bilan de leurs ripostes. Le Km5 était calme ce dimanche, malgré quelques tirs sporadiques entendus ça et là.

« La population a repris ses activités et les hommes de la Misca et de Sangaris effectuent leurs patrouilles de routine », a déclaré à l’AFP le capitaine Elie Massazi, basé dans le quartier.

Depuis le 5 décembre, près de 2000 soldats français sont déployés au sein Sangaris en Centrafrique, où ils agissent « en soutien » des 6000 hommes de la Misca, pour rétablir un minimum de stabilité dans le pays, livré au chaos depuis un an et qui traverse une crise humanitaire sans précédent avec des centaines de milliers de déplacés ayant fui les violences intercommunautaires. Les violences, du samedi à dimanche, ont provoqué un nouvel exode des déplacés à l’aéroport et à la paroisse de Fatima.

 Il y a Urgence « la situation humanitaire et sécuritaire est très grave, et insupportable»

 La crise sécuritaire est entrain de dégénérer en grave crise alimentaire en raison des difficultés persistantes d’approvisionnement.

Dans la crainte des pluies qui arrivent bientôt, la situation humanitaire la situation est « insupportable », a dénoncé vendredi Peter Bouckaert, directeur Urgences de l’ONG Human Rights Watch, et les violences ne s’estompent pas.

Selon l’Onu, 50 % de la population aurait besoin d’assistance, car les situations les plus critiques se trouvent en province. C’est là que les ONG sont les moins présentes et que les conditions sanitaires sont les plus déplorables  et extrêmement précaires.

 «La haine entre communautés demeure à un niveau terrifiant »

 Malgré cette situation, la nécrose de la haine ne dégringole pas. Malgré la présence des forces, « des personnes continuent d’être tuées quotidiennement», a affirmé Navi Pillay, au cours d’un point de presse, en évoquant particulièrement les milices anti-balles AK qui « se métamorphosent en gangs criminels ». Centrafrique s’est transformé en un pays où des personnes sont non seulement tuées, mais aussi torturées, mutilées, brûlées et démembrées», s’est-elle indignée, indiquant que « les viols et violences sexuelles ont augmenté, spécialement dans les camps des personnes déplacées […] Il n’existe plus d’Etat pour arrêter les criminels qui agissent en toute impunité », s’est alarmée, jeudi 20 mars, à Bangui, la haut commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Navi Pillay, a rapporté Thomas Hofnung de Libération. Toutefois l’inertie des autorités centrafricaine est pointée du doigt par la communauté internationale face à cette situation dramatique.

Pour mettre fin à ces violences,  «les dirigeants de l’Etat m’ont fait comprendre, qu’en réalité, il n’existait pas d’Etat. Il n’y a pas d’armée nationale cohérente, ni de police, ni de système judiciaire, pratiquement pas de lieux de détention des criminels ». La haut commissaire, rapporte le même correspondant de Libération, a également exhorté «les politiciens et les responsables nationaux et locaux» à faire «beaucoup plus d’efforts […] pour marteler le message que les violations des droits de l’homme et la criminalité ne seront plus tolérées».

 La mission européenne censée soutenir l’opération Sangaris n’a recueilli aucune véritable contribution des Vingt-Huit.

Dans nos précédentes revues de presse nous avons signalé que les renforts tardaient à se déployer à Bangui et que les bruits de bottes de l’EUFOR-RCA qui devaient se faire entendre vers le 06 mars, ont disparu dans les méandres de couloirs de Bruxelles. L’enthousiasme a laissé place à la déception. Tout le monde tourne le dos quand il s’agit de la question de la RCA. Les bonnes intentions des pays européens et de Merkel Angela se sont évanouies. Centrafrique est-elle abandonnée ? Doit-elle disparaître ? La France qui se retrouve seule au front en Centrafrique, critique le faux bond militaire de l’UE.

« Les comptes n’y est pas » pour la Centrafrique

Dans un communiqué publié vendredi 21 mars, les ministres français des Affaires étrangères et de la Défense, Laurent Fabius et Jean-Yves Le Drian, ne cachent pas leur exaspération. Le 10 février, l’UE avait décidé, à l’unanimité, d’envoyer une mission militaire en Centrafrique pour soutenir les efforts de la France et des pays africains de la Misca. Ces belles intentions n’ont pas été suivies d’effet.

 «Débandade !» Centrafrique n’intéresse personne

A l’issue de la quatrième réunion à Bruxelles consacrée à la «génération de forces» (contributions en hommes et en matériels), Paris a dû se rendre à l’évidence : la Centrafrique n’intéresse pas grand monde. L’Eufor-RCA, installée en Grèce et non en Centrafrique, n’a pas d’ossature. Aucune nation «majeure» ne s’est portée volontaire. La mission n’a reçu que des propositions cosmétiques de contributeurs, pour la plupart, extérieurs à l’UE: les Géorgiens, les Lettons, les Estoniens…

Les Polonais, qui avaient évoqué l’envoi de 140 hommes, se sont dédits. «C’est la débandade permanente !» s’indigne un responsable à Paris. Il dresse un inventaire cruel : «Un Etat a proposé d’envoyer des troupes pour un mois, un autre des soldats mais sans leur chef et un autre encore, des hommes équipés mais sans munition…» relève la libération.

La France qui comptait sur ces renforts européens pour permettre aux soldats de Sangaris de sortir davantage de la capitale reste inopérante alors que la situation dans l’intérieur du pays est très préoccupante en attendant le déploiement des casques bleus attendus pour l’automne.

Le communiqué de Laurent Fabius et de Jean-Yves Le Drian peut-il créer un électrochoc ? Paris n’y croit plus et se résigne déjà à devoir augmenter sa contribution au sein d’une mission «européenne» au format et aux ambitions réduits. Une augmentation en hommes, mais aussi en euros.

 55 gendarmes mobiles sur le départ pour Bangui

Dans ce contexte, la France isolée ne peut donc reculer devant ce « Kosovo africain », son engagement. C’est la raison pour laquelle les gendarmes mobiles s’entraînent pour la RCA depuis hier jusqu’à la fin de cette semaine en vue d’un prochain déploiement. Ils vont assurer la sécurité publique générale sur un secteur encore indéterminé.

Enfin, le déplacement de sa présidente de transition qui se rendra en France puis à Bruxelles la semaine prochaine, installe Centrafrique dans un espoir.

Ce déplacement en personne bouleversera-t-il les européens ? Son discours déclenchera-t-il une réaction concrète et immédiate des européens pour appuyer la France, la Misaca et prioritairement le Centrafrique ?

Joseph GRÉLA

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