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HISTOIRE D’UNE HÉCATOMBE QUI « DURERA ENCORE UN MOMENT »

REVUE DE PRESSE

Vingt morts, onze morts, six blessés, horreurs, exactions, victimes, tueries, impunités, crise sans précédent, violences, séléka, anti-balles AK, milices, sangaris, Misca tchadienne, musulmans, chrétiens, machettes, grenades, armes lourdes, kalachnikovs, des viols et abus sexuels, sont désormais les mots, non – les maux – servis quotidiennement au centrafricain. Cette litanie de mots et expressions s’égraine aisément et, en ligne, se transforme immanquablement en liens vers la République Centrafricaine. La musique qui, jadis, berçait le centrafricain, le faisait trémousser dans les bars et bistrots ou dans les gargottes « zougoulou », devant la bière s’est convertie en paroles (sons)  d’armes, en crépitements assourdissants des grenades.

Dans ce contexte, le président du CICR, Peter Maurer, a appelé, le samedi, 29 mars 2014, les protagonistes du conflit à savoir, les sélékas, les anti-balles AK à arrêter de s’attaquer aux populations civiles. «Des violations du droit international humanitaire sont profondes. Il est important que tous les acteurs armés dans ce conflit comprennent qu’ils sont redevables pour ces actions et que l’attaque contre la population civile est illégale et ne peut pas être tolérée », a averti Peter Maurer, par le Réseau des Journaliste des Droits de l’Homme. Le droit international humanitaire est clair à ce sujet : «on ne peut pas attaquer une personne civile qui ne participe pas au conflit. Il y a des règles très strictes », a-t-il insisté.

Le combat des ONG pour la  Centrafrique

Les ONG ne fléchissent pas devant cette situation infernale de tueries, d’exactions perpétrées en toute impunité par les hommes armés. Heureusement, MSF est là et compte bien poursuivre et même accroître ses activités en 2014. « On compte rester et répondre aux urgences et poursuivre notre plaidoyer », a plaidé Marie-Elisabeth Ingres, par Amélie Pelletier, dans Les News Santé de Doctissimo.

CCFD-Terre solidaire, dans sa plaidoirie pour ramener la paix en Centrafrique,  a opté, par son chargé de mission Afrique, Bruno Angsthelm, que « les Centrafricains doivent être au cœur du processus de retour à la paix ». Son discours s’articule autour de la réhabilitation des infrastructures et du dialogue, le plus tôt possible, entre communautés. « Il ne faut pas tout miser sur les ONG internationales. Les acteurs locaux ont été pillés, mais ce sont eux qui doivent être prioritaires car ils sont proches des populations et seront toujours là demain, quand les ONG internationales seront parties », explique le chargé de mission Afrique, sous la plume de Sabine Cessou.

Pour sa part, le président du CICR, Peter Maurer, rapporté par le RJDH/RCA, ce 29 mars, a invité les dirigeants de la Transition à concentrer leurs efforts sur la mise sur pied d’un processus politique inclusif pouvant ramener la sécurité et la stabilité dans le pays. Cette démarche est soutenue par le CCFD dans ses pistes de solutions pour la RCA.

Sur le plan politique, il s’agit d’éviter que le pays et ses immenses besoins ne retombent dans l’oubli, même si, estime Bruno Angsthelm, « les politiques ont échoué et sont responsables de la crise. Il faut construire des outils plus larges, des mécanismes de représentation qui donnent de la légitimité à d’autres acteurs, susceptibles de jouer le rôle de contre-pouvoirs », a-t-il insisté.

Choquée par l’indifférence dont fait preuve la communauté internationale face à la crise centrafricaine, MSF/RCA lance un nouvel appel et demande des moyens humains et financiers pour venir en aide à la Centrafrique. La situation, déjà difficile pour les populations, s’aggrave, a soutenu, ce jeudi 20 mars 2014, Marie-Elisabeth Ingres, chef de mission à MSF dans Les News Santé du site de Doctissimo. Elle a témoigné de l’horreur dont sont victimes chaque jour, des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants, dans l’indifférence générale : massacres, tortures, déplacements, exodes… « Cela fait maintenant, a-t-elle martelé devant son auditoire, plus d’un an que les populations centrafricaines vivent dans la peur » permanente.

« Nous assistons à une évolution de la violence, avec la participation des populations civiles aux combats ». Si les hommes restent les premières cibles, femmes et enfants ne sont pas épargnés, et les blessures par balles, à la machette ou la grenade sont souvent atroces, comme en témoigne avec tristesse, Marie-Noëlle Rodrigue, directrice des opérations à MSF, de retour de RCA. « Ce qui se passe en RCA est choquant. Nous avons l’habitude de travailler dans des contextes très violents mais là, même les plus aguerris d’entre nous ont rarement vu un tel niveau de violence. La vulnérabilité sécuritaire et sanitaire des populations est absolue ».

Pourtant, l’urgence doit perdurer

Les ONG présentes en Centrafrique déplorent le manque de personnels soignants, les ruptures de stocks de médicaments – dues aux pillages des structures mais aussi à l’absence de moyens logistiques et financiers pour leur transport -, et la violation du droit humanitaire international compliquent considérablement leur travail. A titre d’exemple, 85 expatriés et environ 600 centrafricains travaillent pour MSF-France en RCA. Ce qui est insignifiant devant l’ampleur de l’hécatombe. « Nous avons des équipes chirurgicales mobiles pour nous déplacer au plus près des populations, mais cela nécessite des moyens importants ».

Le président de la Croix-Rouge centrafricaine, quant à lui, a déploré, ce lundi 31 mars 2014, l’Agence de Presse Xinhua, le manque de moyens roulants dont une ambulance pour faciliter le travail.

Et les moyens, qu’ils soient humains ou financiers, font cruellement défaut. « Nous avons besoin de plus d’acteurs humanitaires pour agir sur le moyen terme ». Mais ce que réclame MSF, c’est surtout un engagement politique. « Cela fait des années que MSF plaide pour la Centrafrique, mais c’est un pays qui n’intéresse pas la communauté internationale », a regretté Marie-Elisabeth Ingres. Et Marie-Noëlle Rodrigue de renchérir : « La situation humanitaire et médicale était déjà catastrophique avant le coup d’Etat. Depuis un an, elle ne fait qu’empirer. Nous le savons, la crise en RCA durera encore un moment. Or aujourd’hui, sur le terrain, nous sommes encore trop peu nombreux pour répondre à la masse des besoins. Pourtant, l’urgence perdure. »

Malheureusement, quand on parle de Centrafrique, « c’est la débandade » des partenaires.

Or, il est urgent de conjuguer au plus vite tous les efforts possibles pour sauver la RCA qui a été trop longtemps négligée et se trouve à présent au bord du gouffre. « J’ai lu le désespoir dans les yeux des Centrafricains traumatisés par la violence ; ce désespoir interpelle toute la communauté internationale », a déclaré madame Keita-Bocoum, l’Experte indépendante des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en Centrafrique, à l’Afriquinfos, ce vendredi 28 mars 2014 à Genève.

L’insécurité perturbe également l’aide humanitaire, dont les personnels sont parfois directement visés. Dans cette situation invivable, « nous travaillons dans des conditions très difficiles, sous la menace des groupes armés », a signalé Antoine Mbao Bogo lors d’un point de presse au siège de la Croix-Rouge à Bangui, lundi 31 mars 2014  selon l’Agence de Presse Xinhua. « La Croix-Rouge a perdu un volontaire il y a trois semaines, abattu à son domicile par des hommes armés encore non identifiés. Six autres volontaires ont été attaqués vendredi et dépossédés de leurs téléphones portables par des hommes armés près du marché de KM5, alors qu’ils allaient assister les victimes de l’explosion d’une grenade » s’est-il plaint avec amertume.

Une attaque funèbre

La violence s’est amplifiée depuis quelques jours à Bangui en proie aux assauts des hommes armés. Dans ce tourment infernal, les bénévoles n’abdiquent pas malgré les attaques, précise Libération/AFP du 28 mars 2014. Le ministre de la Sécurité publique, Denis Wangao Kizimalé qui s’est exprimé à la radio nationale, a affirmé qu’ « aux environs de 23 heures au quartier Kango, un groupe d’extrémistes bien connu des services de police a lancé une grenade offensive sur une foule qui assistait à une veillée funèbre. Au moins 20 personnes ont été tuées. Onze autres personnes ont été blessées et suivent en ce moment des soins à l’hôpital communautaire», a-t-il ajouté. Pour la première fois une autorité s’exprime officiellement sur ces attaques attribuées à des musulmans.

«Le gouvernement condamne avec fermeté cet acte odieux. […] Les auteurs seront recherchés et traduits en justice», a poursuivi Denis Wangao Kizimalé.

Selon l’agence de presse Xinhua publiée par l’Afriquinfos, (l’actualité africaine à la minute) de ce lundi 31 mars 2014, Jean-Marie Michel Mokoko, représentant spécial du président de la Commission de l’Union africaine à Addis Abeba, a demandé aux autorités de transition de « traduire en justice les auteurs lâches de ces actes atroces » à la grenade qui ont causé une vingtaine de morts.

Il a aussi appelé les dirigeants communautaires, les leaders religieux, les chefs des partis politiques ainsi que les leaders des organisations de la société civile à s’exprimer et à utiliser leur influence pour aider à mettre fin aux violences actuelles dans le pays.

Le représentant spécial de l’UA a, par ailleurs, exhorté les médias locaux et internationaux à faire preuve de sens de responsabilité dans la couverture des événements en Centrafrique.

Carnage à la tchadienne, Sangaris impuissante

À la une du Point.fr du samedi 30 mars 2014, des soldats tchadiens ont tué au moins huit personnes et plusieurs blessées, a indiqué la Misca. « Des soldats tchadiens venus de leur pays pour rapatrier leurs compatriotes qui désirent quitter (la Centrafrique) ont ouvert le feu sur les habitants des quartiers nord, faisant au moins huit morts et plusieurs blessés », a souligné à l’AFP un officier de la Misca sous le couvert de l’anonymat. « On ignore à présent ce qui a entraîné ces tirs sur les habitants des quartiers nord. Mais nous tentons de recouper les informations pour savoir ce qui s’est exactement passé », a-t-il ajouté.

Selon une source au sein de la gendarmerie centrafricaine, les soldats tchadiens sont entrés dans la capitale en début d’après-midi, et « dans leur progression, on a entendu des tirs aux environs de Gobongo, Galabadja, Foûh », des quartiers majoritairement chrétiens. Confirmant le bilan donné par la Misca, cette source a fait état de « près de 10 morts et plusieurs blessés », a rapporté l’AFP par le Point.fr. « Les soldats tchadiens ont tiré dans tous les sens. Les habitants des quartiers nord, pris de panique, se sont mis à fuir, provoquant ainsi une débandade généralisée dans le secteur », ont témoigné des habitants de la zone, joints par téléphone.

D’après un officier de la Misca s’exprimant toujours sous couvert d’anonymat, « les soldats tchadiens ont été visés par une grenade qui a blessé l’un d’entre eux, et ils ont riposté ».

Des sources contraires, comme La Croix, le RJDH/RCA évoquent qu’un des porte-paroles des milices anti-balle AK, Brice Namsio, a réfuté cette version de l’affaire : « Il s’agit d’une provocation (…), personne n’a attaqué les Tchadiens ».

Ces mêmes sources contraires ont souligné, cependant, ce dimanche 30 mars 2014, qu’ « il y a déjà 24 corps recensés et ramassés, et plus de cent blessés graves »  dans les quartiers nord de Bangui, selon la déclaration à la presse de madame Odette Dombolo, maire de Bégoua, à la périphérie nord de la capitale.

A Bégoua et dans les quartiers Gobongo et Galabadja, « on continue de ramasser des corps et les blessés sont de plus en plus nombreux. On est dépassés », a ajouté Mme Dombolo. « Des maisons ont été incendiées par des tirs de roquettes. Un poteau électrique a même été coupé en deux vers Gobongo, ce qui démontre que les dégâts sont très importants du fait des armes utilisées », a-t-elle précisé au journal.

Un responsable de l’organisation caritative a déclaré à l’AFP publiée par L’express, lors d’une conférence de presse, ce dimanche 30 mars 2014, que « trente tués et 60 blessés » ont été ramassés par la Croix-Rouge au cours des trois derniers jours dans les rues de Bangui.

Nécessité d’une action urgente
et d’un plan Marshall pour la Centrafrique

Malgré ce rouleau compresseur meurtrier, indique le RJDH/RCA du 29 mars 2014, le président du Comité International de la Croix Rouge appelle de tous ses vœux le gouvernement à redémarrer les services sociaux essentiels, notamment les services de santé et l’éducation « afin de permettre aux enfants qui sont dans les sites de déplacés, de reprendre les activités scolaires ». Le CICR se dit prêt à appuyer les efforts du gouvernement de transition et invite les acteurs politiques à focaliser les efforts pour stabiliser le pays.

L’Afriquinfos rapporte, ce vendredi 28 mars 2014, à Genève, que l’Experte indépendante des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en Centrafrique, madame Marie-Thérèse Keita-Bocoum, a averti que le gouvernement de transition avait moins d’un an pour préparer les élections et améliorer la situation des droits de l’homme. Elle a également insisté sur le fait que ces avancées ne pourraient intervenir sans un soutien fort et durable.

Appuyant la déclaration du CICR, elle a déclaré lors de la présentation de son premier rapport que « sans une assistance réelle, il sera impossible de faire fonctionner l’Etat et d’améliorer la situation des droits de l’homme dans le pays ». Les limites des capacités de l’Etat, qui sont d’ailleurs reconnues tant par les autorités que par l’ensemble des parties prenantes, exigent des mesures intérimaires plus robustes et audacieuses. Certains interlocuteurs ont même avancé l’idée, sinon la nécessité, d’un plan Marshall pour la Centrafrique, a précisé Mme Keita-Bocoum.

Dans Ouest France.fr du 28 mars 2014, une douzaine de premiers gendarmes mobiles ont quitté la France pour la Centrafrique. Cependant l’UE n’a pas encore réussi à constituer sa mission EUFOR/RCA.  Toutefois, un petit pas vient d’être posé par Berlin qui a proposé de renforcer son soutien à la mission EUFOR/RCA, en mettant à disposition deux avions de transport Antonov.

« La situation humanitaire en Centrafrique est alarmante », a déploré enfin la ministre de la défense allemande, Ursula von der Leyen. De source française, on s’inquiétait que l’Allemagne tarde à concrétiser le soutien qu’elle avait promis. On espère que cette annonce de vendredi incitera d’autres pays européens à s’engager dans l’opération.

La chef de la diplomatie de l’Union, Catherine Ashton, s’était alarmée jeudi de « l’escalade de la violence» en Centrafrique, appelant la communauté internationale à « agir rapidement ».

Embargo : FACA encore inopérante

Enfin, selon le commandant de l’opération Sangaris, la reprise du travail des FACA attendra une décision de l’ONU. « Il y a tout d’abord un embargo sur l’armement en Centrafrique. Ce qui veut dire que les Forces Armées Centrafricaines ne peuvent pas être armées. Et deuxièmement, on ne peut pas utiliser les forces centrafricaines. Ça, c’est la loi. C’est la résolution de l’ONU qui le dit », a avancé le Général Soriano ce 28 mars 2014.

« Ça, c’est la loi », parole de militaire.

Joseph GRÉLA

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