Libre opinion

TOUADERA : UNE IMPOSTURE CENTRAFRICAINE

Pâsko EMBI MAIDOU

Dans les déclarations de ralliement et les appels à soutenir Faustin Touadéra,( FAT, comme ils disent ),le challenger du second tour, les argumentaires soulignent de façon récurrente son intégrité, son expérience, mais surtout sa supposée proximité d’avec le peuple, contrairement à Dologuélé, odieux bourgeois d’n haut, déconnecté et insensible. Voilà donc l’affiche de la lutte des classes dont certains veulent désormais abuser l’électeur centrafricaicain. Qu’importe à ces procureurs de la vertu, que leur champion, l’Archange, compte dans Les rangs de ses soutiens, des enfants de chœur et des moines-ermites aussi irréprochables que Fidèle Gouandjika, ou Edouard Ngaîssona., conférant à cet attelage improbable la crédibilité qu’aurait, à l’avenant : Le candidat Cheikh Salman, aspirant à refonder la FIFA, avec la collaboration du cycliste américain Lance Armstrong, et du sprinter canadien Ben Johnson. C’est donc acté ! La mauvaise foi est une seconde nature irrémédiable chez certains. A tel point qu’au sortir de ce tunnel apocalyptique que nous finissons de traverser, les calculs égoïstes et autres impératifs de repositionnement autour de la mangeoire ont tôt fait de reprendre l’avantage sur la nécessité impérieuse d’un examen de conscience  patriotique -quel gros mot !- et collectif.

Medvedev des tropiques
L’enjeu ici étant la renaissance du pays, examinons un peu la candidature Touadéra, à la lumière des seuls faits et actes posés. Petite rétrospective dans les années 2008 – 2013, en RCA. En ces temps pas trop lointains, le pire régime politique qu’ait souffert la Centrafrique achevait de porter à son paroxysme la caricature d’un Etat voyou, d’une dictature moderne. Cette déclinaison contemporaine de la dictature, qui s’ingénie à parer son pouvoir des oripeaux de la démocratie (onction de légitimité au travers d’élections truquées, tolérance d’une opposition à minima, revendication du libéralisme économique, en réalité fictif, et d’un pluralisme d’opinion. Cette parodie procure à de tels régimes le triple avantage de se rendre fréquentable de la communauté internationale, d’être éligible à l’assistance financière et échapper aux écrans radars des ONG tatillonnes. Cependant, cette période aura aussi été marquée avec constance par une régression constitutionnelle spectaculaire et inédite :  l’affaiblissement du poste de 1er ministre, incarné par un certain Faustin Touadéra. Cet inconnu du sérail politique nommé à la surprise générale, va battre 2 records à la primature : celui de de la longévité et de la docilité. Chef fantôme de gouvernement, car dépouillé de tout pouvoir y afférent, Touadéra consacrera comme jamais en Centrafrique la virtualisation du pouvoir de 1er ministre. Cet avatar de Dimitri Medvedev a avalé toutes les couleuvres, que dis-je-, tous les boas, essuyé toutes les humiliations, n’élevant, face aux dérives ubuesques de Bozizé, aucune réserve de principe, qui pût contrarier son patron et son clan. De l’insoumission méprisante et ostensible des ministres Doutingaï et  Feindiro aux décisions suprêmes qui échappaient à son aval, le déficit d’autorité et de leadership, en creux, était violent d’évidence. Dans la célèbre formule de Chevènement «  un (1er ) ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne », Touadéra semblera avoir choisi la seconde option. Rester, subir et bouffer. A ce stade de trahison du peuple, l’on est fondé à conclure que l’une des seules réformes dont il se targue, à savoir, la dématérialisation de perception des recettes fiscales, centralisée à Bangui, procédait davantage du réflexe de captation des deniers publics, qui était d’usage, que de quelque démarche de bonne gouvernance.

« Homme du Peuple ». Duquel Peuple ?
Le premier des droits du centrafricain est le droit à la sécurité. Mais Yalta a survécu en RCA. Lorsque les éleveurs Mbororo massacraient les villageois, dévastant les plantations et brûlant toutes les habitations, lorsque Baba Ladé colonisait Bambari et sa région, quand Joseph Koni et de multiples groupes armés se partageaient le territoire entier de la Centrafrique, jetant des cohortes de déplacés par brousses et forêts, abandonnés à leurs infernal sort, et que Me Goungaye Wanfio (entre autres) disparaissait tragiquement, où était l’homme du Peuple ?
Que faisait « l’Homme intègre » lorsque Bozizé, présidait le Trésor Public et que son clan verrouillait arbitrairement tout marché public sans contrepartie, au détriment des véritables, opérateurs économiques, « uberisant » jusqu’aux services de police politique ?

Droit d’inventaire
Touadéra accédait aux responsabilités dans une conjoncture économique, il est vrai, aux indicateurs déjà alarmants et le taux de pauvreté culminait en 2008 à 63 %. Quelques chiffres, cependant, pour faire simple : croissance du PIB, 3,3% ; mortalité maternelle, 850/100 000 naissances ; etc… (source FMI). Il quittera son poste avec une récession estimée à 20%, 80% de la population en-dessous du seuil de pauvreté en 2013, zéro IDE (Investissement Direct Privé), dette extérieure à plus d’1 milliard de dollars, taux d’alphabétisation (-15ans) à 45%. Renonçons au massacre de l’état des lieux. Le bilan, à l’évidence est accablant ! Il y’ a 2 mois, des militants et cadres du Parti KNK eux-mêmes ont adressé une lettre ouverte à Bozizé, confessant tous les crimes infligés au Peuple Centrafricain. Un homme d’Etat, à la place de Touadéra, eût dû en faire pareil, avec humilité avant de demander une deuxième chance. Je ne l’ai toujours pas entendu à ce jour demander pardon à ce Peuple dont il se prétend proche. Ce n’est pas une question de personne, mais du devoir de vérité que nous devons aux électeurs. Touadéra  est un compatriote dont je respecte le parcours académique et en suis fier. C’est un méritocrate, pur produit d’une république où les humanités, et le système éducatif étaient à l’époque, appréciés à l’étranger. A cet égard, il est amusant de voir  l’opposer artificiellement et de manière puérile, comme candidat du peuple, à Dologuélé. Issus de familles au CSP relativement comparable, ils appartiennent pourtant tous 2 à l’élite politique et sociale de ce pays.

Culture de l’impunité
Avec un tel bilan « Zéro pointé » et disqualifiant, m’objecter que Touadéra n’était qu’un Premier ministre, est une excuse facile et irrecevable. Etre responsable de la mise en œuvre du programme politique d’un président élu, n’empêche guère d’avoir une personnalité et des convictions. Or, si on s’attarde sur l’un quelconque des domaines régaliens suivants : sécurité intérieure, justice impartiale, gouvernance orthodoxe des finances publiques etc.., on observe que Touadéra a échoué (c’est un bel euphémisme). Il a démontré ne pas avoir l’étoffe pour diriger la RCA. Le remboursement au Trésor Public (cela reste d’ailleurs à vérifier), du reliquat des frais de missions ; le paiement régulier des salaires « double sim » dont on se gargarise, pour moi c’est de l’enfumage, c’est de l’économat. Pour un épicier, c’est louable, mais à l’actif du bilan d’un candidat à la présidence, cela manque de souffle, cela manque d’ambition. Nous en sommes réduits aujourd’hui en Centrafrique à applaudir les trains qui arrivent à l’heure, à revendiquer des comportements certes salubres, mais relevant dans un pays normal, d’une déconcertante banalité. Mon Pays mérite, non pas un poney, mais un cheval de trait, pour l’arracher aux affres de la misère. Mon Pays a besoin d’un Président de convictions, et non d’un Président par accident, ou par défaut. Rappelons sous ce rapport, que Touadéra avait conditionné sa candidature à l’éligibilité ou pas de Bozizé. Quelle affligeante loyauté, quand même ! à l’égard de « Dernayo », celui que l’Histoire retiendra comme le pire de tous les présidents centrafricains. Elire, par malheur Touadéra serait ramener par la fenêtre, Bozizé jeté aux poubelles de l’Histoire par la grande porte. Touadéra est autant comptable de nos souffrances actuelles que Bozizé. Coresponsable par action et/ou par incompétence. Le degré de responsabilité peut s’en discuter, cela n’absout rien ! Facteur aggravant, nous ne l’avons pas entendu prendre position, comme démocrate, lorsque « Président-Fondateur » du Gondwana), fomentait son projet de révision constitutionnelle en vue d’un 3è mandat. Sous d’autres cieux, Touadéra n’aurait même pas eu, par éthique politique, et par respect du Peuple centrafricain, l’outrecuidance de se présenter à ces élections-là. Au Burkina Faso, contre-exemple parfait et miroir déformant de nos mœurs politiques, beaucoup ont été écartés du jeu immédiat pour moins que ça. Mais la culture de l’impunité chez nous est indécrottable. Passe à peine la tempête et les mêmes fossoyeurs, les mêmes transfuges opèrent sans gêne un rebranding indécent pour à nouveau brimer ce pauvre peuple qui n’en finit jamais de subir. En conséquence, je m’autorise enfin, avec candeur les questions suivantes, à partager avec l’électeur du dimanche prochain : Mon frère, peut-on faire confiance à celui que déjà Doutingaî terrorisait, pour nous débarrasser de Nourredine Adam ? Celui qui, 5 ans durant, en temps de paix relative, n’a pas changé ta vie, mais a semé les ferments de l’Enfer que tu as vécu, peut-il encore te relever de là ? Â éré andé mo gnèn ? Ton destin est entre tes mains, qu’elles ne tremblent pas dans l’isoloir. Pour pas être de nouveau la risée du monde entier, qui ne comprendrait pas une telle prime à l’impunité, un tel masochisme, pour barrer la route aux revanchards, renvoies l’élève Touadéra à ses études pour le punir. Pour ton honneur, retiens bien ces 3 lettres :TDP.TOUADERA DOIT PERDRE.

Pâsko EMBI MAIDOU
Electeur Centrafricain

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