Chronique de GJK

RCA : CATHERINE SAMBA-PANZA, DE QUELLE PLANÈTE VENEZ-VOUS DONC ?

Par GJK

Pourquoi s’en cacher ? Au-delà des mots choisis et du ton faussement mesuré de son discours de ce mercredi 22 octobre 2014, il y’a quelque chose de vraiment surréaliste et même d’incongru dans le message que vient d’adresser aux centrafricains, Catherine Samba-Panza à qui « Le Conseil National de Transition (m’) a confié la destinée de ce pays meurtri en (me) la désignant comme Chef de l’Etat de la Transition. »
Il fut un temps où la Présidente disait plutôt : «…ma population continue à espérer en moi, parce que c’est elle qui m’a permis d’être là où je suis… ». Mais ça, c’était avant !

Aussi, à la lecture des premières lignes de ce discours d’environ six pages, m’est revenu de suite à l’esprit le dialogue entre le Petit Prince et le narrateur du classique éponyme de Saint Exupéry au début du chapitre 3. Je cite :

« Il me fallut longtemps pour comprendre d’où il venait. Le petit prince, qui me posait beaucoup de questions, ne semblait jamais entendre les miennes. Ce sont des mots prononcés par hasard qui, peu à peu, m’ont tout révélé. Ainsi, quand il aperçut pour la première fois mon avion (je ne dessinerai pas mon avion, c’est un dessin beaucoup trop compliqué pour moi) il me demanda :

  • Qu’est-ce que c’est que cette chose-là ?
  • Ce n’est pas une chose. Ça vole. C’est un avion. C’est mon avion.

Et j’étais fier de lui apprendre que je volais. Alors il s’écria :

  • Comment ! Tu es tombé du ciel ?
  • Oui, fis-je modestement.
  • Ah ! Ça c’est drôle

Et le petit prince eut un très joli éclat de rire qui m’irrita beaucoup. Je désire que l’on prenne mes malheurs au sérieux. Puis il ajouta :

  • Alors, toi aussi tu viens du ciel ! De quelle planète es-tu ?

J’entrevis aussitôt une lueur, dans le mystère de sa présence, et j’interrogeai brusquement :

  • Tu viens donc d’une autre planète ? »

D’où ma question : Catherine Samba-Panza, de quelle planète venez-vous donc ? Et pour cause !

Une fois de plus et sans risque de me tromper, il m’est difficile de croire que tous les compatriotes Centrafricains qui ont suivi – tant avec bienveillance et attention qu’avec un brin d’esprit critique – la Chef de l’Etat de la Transition, ne se soient pas posés un certain nombre de questions, dont la principale, à mon sens, est bien celle-ci : Samba-Panza vit-elle et parle-t-elle vraiment du même pays que celui de la majorité des Centrafricains ?

Tout d’abord, s’agissant d’un « Message à la nation » comme il a été indiqué par la Présidente elle-même, on se surprend à découvrir que cette « nation » se limite – ce qui n’est pas administrativement actuellement faux – à la seule ville de Bangui. Que l’on me dise et trouve à travers les six pages de discours de Samba-Panza, la véritable adresse à l’endroit de nos compatriotes des villes et villages des provinces ! D’ailleurs, ne sont-ils pas ceux-là même qui paient chaque jour, en silence et dans l’indifférence totale, le lourd tribut de la mauvaise gouvernance des autorités de la transition ? Encore convient-il que la Chef de l’Etat de la Transition en personne n’en souffle mot…

Catherine Samba-Panza, de quelle planète venez-vous donc ?

Quand Samba-Panza déclare sans sourciller « …suite aux récents événements dramatiques que notre pays vient de connaître et qui ont failli encore nous replonger dans le chaos », j’ai bien peur. J’ai bien peur que mes compatriotes en viennent à penser que le chaos – quelle qu’en soit sa nature et son degré – serait différent de ce que la Centrafrique et les Centrafricains connaissent et vivent en permanence et au quotidien !
Et quand la Chef de l’Etat énumère :

  • « Des barricades sont érigées partout dans la ville de Bangui
  • Des armes lourdes et légères ainsi que des billets de banques sont distribués au sein de la population, notamment aux jeunes, pour semer la terreur et paralyser le pays 
  • Les grandes expéditions punitives menées dans les arrondissements de Bangui 
  • des actes de grand banditisme et de grande criminalité ont engendré de lourdes pertes en vies humaines, tant dans la population civile que dans les rangs des forces internationales de maintien de la paix… », 

Ne s’agit-il point là d’actes qui nous installent au plein cœur même du chaos centrafricain ?

Catherine Samba-Panza, de quelle planète venez-vous donc ?

Mais, plus surréaliste encore que tout ce qui précède, la Présidente de la transition s’oublie au point d’« oser » prononcer devant les Centrafricains les phrases du genre :

  • «… les auteurs de ces actes odieux et crapuleux seront pourchassés jusque dans leurs derniers retranchements, jugés et punis.
  • …tous les indicateurs étaient au vert,
  • J’ai également relevé que, sous mon leadership, le peuple centrafricain a affronté avec courage la crise… »

Franchement, j’ai envie de dire à Madame la Présidente comme cela se fait chez nous en Centrafrique « kpè nga mbéto ti Nzapa kètè si maaa ! », pour ainsi dire « si vous ne craignez pas les hommes, ayez au moins crainte de Dieu ! ». Vous entendez-vous parler, Exxxcellence ?
Où sont les criminels auteurs du massacre de Fatima ? Des mois d’arriérés de salaires et l’insécurité permanente, ce sont là vos indicateurs au vert ? En plus vous parlez de leadership ? J’ai envie de dire heureusement que vous avez ajouté « mon leadership », cela donne à ce mot une autre connotation.

Mais enfin, Catherine Samba-Panza, de quelle planète venez-vous donc ?

En parcourant le texte du discours de la Présidente de la Transition, je crois avoir lu, « Sauf erreur,  je ne me trompe jamais – comme dirait l’autre –», les lignes suivantes :

« …m’étant engagée, conformément à la Charte Constitutionnelle de Transition à conduire une transition apaisée, consensuelle et inclusive. Dans cet esprit, j’ai reçu dès le début de cette crise une délégation des Anti- Balakas afin de recueillir les motivations de leurs revendications. Comme j’ai déjà eu à le déclarer, il s’agit fondamentalement de questions de partage de postes, de l’élargissement du Conseil National de Transition aux Anti Balaka mais surtout du sort des nombreux jeunes de ce mouvement, véritablement sans perspectives et obligés d’être à la charge des responsables du mouvement. Dans un esprit d’ouverture, il a été convenu de la mise en place d’un groupe de travail mixte devant examiner les principales revendications formulées. En contrepartie, les barricades devaient être levées afin de permettre une reprise des activités dans la ville de Bangui »

N’eût-il pas été plus à votre avantage, Madame la Chef de l’Etat de la transition, d’escamoter cette partie de votre discours qui, à mon avis, n’a absolument rien de reluisant pour votre autorité ?

  • Si les Antibalaka se sont, une fois de plus, livrés à des exactions, vous ne nous dites nullement quelle en fut la cause. Le don « machin » n’est-il pas passé par là ?
  • Par ailleurs, parler de trouver un consensus dans le cadre de la présente transition, avec les seuls Antibalaka me paraît mal à propos et, dans tous les cas, contreproductif. Car la transition consensuelle, si elle n’est pas unanimisme absolu, elle exclut toute tendance ou volonté de chercher des solutions « à deux » sans impliquer les autres acteurs et protagonistes de la crise.
  • En voulant régler les problèmes des Antibalaka, comme vous le faites, Madame la Présidente, n’y a-t-il pas risque que cette milice se transforme en une nouvelle agence nationale pour l’emploi ?
  • Quid de l’impunité zéro ?
  • Enfin, comme d’habitude, certains Antibalaka ont clairement laissé entendre qu’ils sont sortis des rencontres avec vous les poches remplies des « mesures d’accompagnement » sonnantes et trébuchantes. A qui donc reprocher la distribution des billets « craquants » ?

Catherine Samba-Panza, de quelle planète venez-vous donc?

Vous avez parlé, Madame la Présidente de la transition, de sécurité, d’impunité, de la réconciliation nationale et dialogue politique.

J’ai envie de faire remarquer que, désormais, il convient de faire passer l’impunité avant la sécurité. Car s’il est une chose que tous les Centrafricains s’accordent à reconnaître, c’est l’extrême complaisance de ce régime de transition vis à vis des criminels. Et c’est une atteinte à l’honneur du peuple centrafricain que de parler de « pardon consenti par le peuple ». Bien évidemment,comme en RCA ce mot recouvre n’importe qui et n’importe quoi, certaines personnes investies d’une petite parcelle d’autorité croient souvent incarner le peuple dans son ensemble. En vous engageant à « siffler la fin de l’impunité en République Centrafricaine », il convient également qu’avant de demander « à tous les magistrats d’enregistrer toutes les plaintes des Centrafricaines et Centrafricains victimes des diverses crises », vous puissiez vous-même prouver par des actes concerts et forts que vos paroles sont véridiques. Il faut le dire clairement : si aujourd’hui certains des grands criminels continuent de narguer les Centrafricains, c’est bien par votre faute.

A vrai dire, que de l’impunité dépend en grande partie la sécurité est désormais une évidence.

Quant à la réconciliation nationale et au dialogue, je vous questionne à nouveau, Catherine Samba-Panza, de quelle planète venez-vous donc ?

Vous dites, Madame la Présidente : « je vous ai tous écoutés. En réponse à vos observations, propositions et engagements au service de notre pays, j’ai d’ores et déjà pris les orientations et décisions… Je vous ai entendu au nom du peuple ».

Alors, pourrions-nous savoir de quel peuple vous parlez et exactement ce que vous avez entendu ?

  • Avez-vous entendu que pour avancer et terminer cette transition dans la paix, vous n’avez pas d’autres choix que de de nommer un nouveau premier Ministre ? Kamoun n’est pas et ne sera pas l’homme de la situation. Ceci pour plusieurs raisons que nous n’avons cessé de rappeler ici. Tenez, est-il prêt pour les deux mois de salaires promis pour le 27 octobre ? Et que dire de tous ces discours pour, à la fin, reconnaître platement qu’il y a bien eu détournement du don angolais ?
  • Avez-vous entendu que le peuple n’est pas dupe et que toutes vos manœuvres visant à prolonger cette transition sont bien perçues ?
  • Qu’attendez-vous pour entamer les véritables réformes qu’on attend de vous, au lieu des discours toujours creux et non suivis de mesures concrètes ?
  • Pensez-vous avoir ainsi enterré par un tour de passe-passe avec Nguendet le problème du don angolais ?
  • Tout au long de « votre message à la nation », l’on ne vous a pas entendu, pas une seule fois parler de la Séléka et des innombrables crimes qu’elle continue de perpétrer sur toute l’étendue de territoire national. Est-ce à dire que la partition du pays est définitivement consacrée ? « La RCA une et indivisible » n’est pas un slogan de « transition ». Elle doit être une réalité.
  • Qu’en est-il de la poudrière très bien entretenue du Km5 ? A quand le désarmement ?

Catherine Samba-Panza, de quelle planète venez-vous donc ?

La réconciliation nationale et le dialogue politique, certes, mais pas à n’importe quel prix ! Aucune question ne devrait être taboue lors de ces assises. Aucun débat préliminaire ne devrait être interdit. C’est à ce prix et à ce prix seulement que la Centrafrique et les Centrafricains pourront alors dialoguer véritablement et se réconcilier.

En définitive, j’ai du mal à me convaincre que le discours du 22 octobre 2014 de Madame la Chef de l’Etat de la Transition, dont de très nombreux points semblent requérir encore un examen minutieux, ait pu accomplir le « miracle » de marquer un tournant décisif pour cette transition. Tout au plus, a-t-il été « servi » aux Centrafricains à titre de sédatif, mais malheureusement sans effet. Car le peuple mérite plus et mieux.

Catherine Samba-Panza, de quelle planète venez-vous donc pour ne pas comprendre depuis neuf mois ?
« Comment ! Vous êtes tombée du ciel ?
Ah ! Ça c’est drôle…
Vous venez donc d’une autre planète.
Le peuple centrafricain désire que l’on prenne ses malheurs au sérieux » (Paraphrase du dialogue cité ci-dessus)

Guy José KOSSA
GJK – L’Élève Certifié
De l’École Primaire Tropicale
Et Indigène du Village Guitilitimô
Penseur Social

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3 commentaires

  1. Depuis le choix manipulé de Samba Panza; c’est après 10 mois quelle va parler de réconciliation; et de problème de sécurité; dialogue… alors qu’il ne reste que 4 mois a passer? Les mots me manquent….Les 10 mois n’ont servis qu’aux vols en bande organisée qualifier par ses technocrates a elle? AyoooHoooo so ye ti mawa mingui.

  2. permeté de vs apelé sn excellence paske je trouve mieux comxa,a propos de ce ptit mot ke vs avé ecri ns les centrafricains ns some d’accord par rapport a votre question posé ki es ceci (dekel planète sort-elle)et elle doit vraimt ns repondre sinceremt sur ceux je vs laisse.

  3. CSP vient de la planète qui a vu naître tous les monstres qui ont gouverné la RCA jusqu’à maintenant. Toutes les questions posées par GJK sont d’une telle pertinence que le doute est permis quant à la capacité de CSP et sa cour de pouvoir y répondre positivement.Au demeurant, l’on ne peut plus rien attendre de mieux sous le soleil CSP sauf que de devoir se battre pour nos droit et nos remparts…

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