Chronique du Village Guitilitimô

LES PATHÉTIQUES DIVAGATIONS DE DEUX DÉCONNARDS VIEILLISSANTS

Les voilà une fois encore en présence : lui, Oncle Kengougba dit Kengs – Zawada, ce jeune dandy de grand chemin qui se vêtait de pantalons « alapaga haute pince », de grands- boubous brodés trois pièces et de tenue – directeur ou « abacost » à la mode ; nouait des cravates et nœuds papillon de couleur, portait des lunettes de soleil « Ray-ban », se parait de gourmette et de chaînette en or,  fumait pipe et cigarillos.

En face, Batawaligba alias Couz Bonbon – Glacé, l’homme aux « chemabook » et autres « chemises climatisées », amoureux des tissus en lin ou « 100% mohair » ; sapeur aux chaussures « talon dame » ou « santiago bout pointu » toujours bien cirées ; grand amateur de moto vespa et yamaha, des mobylettes peugeot-cintrée ou « au65 » et « au88 » ; casse-cœur au charme jadis irrésistible, friand de nymphettes à la poitrine naissante.

Deux potes inséparables, deux incorrigibles séducteurs du village Guitilitimô, amis comme cochons et grands « Déconnards » devant l’éternel!

« Déconnards », avez-vous lu ? Grands « Déconnards » en effet !

Oncle Kengs – Zawada et Couz Bonbon –Glacé n’étaient pas des CONNARDS, loin s’en faut. Mais, ils étaient des DÉ-CON-NARDS. Tel fut le nom de guerre, dont on avait fini par affubler les deux ensorceleurs – alors tout jeune, tout beau et tout feu -, tant ils aimaient déconner, et ils déconnaient au propre comme au figuré, déconnement sur déconnement, comme jamais personne n’a déconné en déconnant. Ils déconnaient et décollaient en même temps, emportant tout sur leur passage, ou tirant sur toutes les belles créatures qui avaient le bonheur d’être dans leur viseur. Vous l’aurez compris.

Mais çà, c’était avant. C’était il y’a bien longtemps. Plusieurs décennies au rétroviseur.

Ah la vie ! Quelles pathétiques tribulations que celles de jeunes déconnards vieillissants !

En effet, les années passent vite. Mais en passant les années blessent et la dernière tue ! « Vulnerant omnes ultima necat » aurait préféré le latiniste : toutes blessent, la dernière tue. Et cette dernière tue sans pitié et sans pardon, à feux doux, sûrement, proprement, définitivement et odieusement. D’autant plus odieusement encore, que personne ne pourra en réchapper. Nul n’a le pouvoir d’arrêter ni même de ralentir simplement, la folle course de ces heures qui portent en elles le message final de la mort définitive.

Aussi pour se consoler, a-t-on l’habitude de laisser souvent échapper entre deux soupirs d’impuissance et autres cris de lamentations, cette petite sentence lourde de signification: c’est notre chemin à nous tous. En priant secrètement bien sûr, qu’à défaut d’en être épargné, que vienne pour nous le plus tardivement possible, l’heure épouvantable du verdict affreux.

Tenez ! Á chaque anniversaire que l’on fête, ne célèbre-t-on pas au fond, la vie qui s’éloigne, et la mort qui s’approche ? On prend de l’âge sans le sentir, mais tôt ou tard, le poids de l’âge et autres affronts liés aux vicissitudes du destin personnel, finissent par rattraper et exiger des comptes, même au plus distingué, au plus puissant et au plus robuste des créatures. C’est dire si l’humain se sait d’office condamné à subir les ravages du temps qui l’affectera et lui renverra comme dans un miroir, le reflet d’un « monstre » au visage sans relief, creusé de rides impitoyables et profondes, cheveux gris, dos voûté, peau flasque, écaillée, plissée et terne. Quant aux fières jambes jadis si solides et si lestes, les voici qui peu à peu s’alourdissent, s’engourdissent, fléchissent et trahissent l’homme qu’elles portaient si haut et entraînaient si loin. Et puisque l’on n’a pas les jambes de son âge à tout âge, l’on ne peut avoir que l’âge de ses jambes !

En définitive, lutter contre dame vieillesse, c’est à la fois reconnaître sa vulnérabilité et s’avouer déjà vaincu. Quoique l’on fasse et quoiqu’il advienne, on finira tous lamentablement usés et courbés. Pire, chaque fois que le destin moqueur et mauvais joueur, s’avise de maintenir déraisonnablement un mortel en vie le plus longtemps possible, cela prend l’allure d’un acharnement thérapeutique pas toujours bien vécu, ou d’un parcours du calvaire rempli d’écueils et d’épreuves,  avec au bout,  plus d’usure, plus de courbature, plus de décrépitude et plus de déchéance avant les ténèbres ou l’obscurité et le silence de la tombe.

Hélas, aucun vivant qui vit et respire ne sortira vivant de cette VIE !

Alors, « Vanité des vanités, dit l’Ecclésiaste, vanité des vanités, tout est vanité… Que reste-t-il à l’homme de toute la peine qu’il se donne sous le soleil ? »

Et Alfred Bossuet de conclure avec élégance et éloquence : « ô mort, nous te rendons grâces des lumières que tu répands sur notre ignorance : toi seule nous convaincs de notre bassesse, toi seule nous fais connaître notre dignité : si l’ homme s’ estime trop, tu sais déprimer son orgueil ; si l’ homme se méprise trop, tu sais relever son courage ; et, pour réduire toutes ses pensées à un juste tempérament, tu lui apprends ces deux vérités, qui lui ouvrent les yeux pour se bien connaître : qu’ il est méprisable en tant qu’ il passe, et infiniment estimable en tant qu’ il aboutit à l’ éternité. »

Vieillir, c’est pathétique. Que n’y a-t-on donc pensé plus tôt !

Fidèles compagnons de tous les jours et de tous les temps, inséparables amis depuis leur plus jeune âge, complices comme qui dirait les doigts d’une seule main, Oncle Kengs – Zawada et Couz Bonbon –Glacé ces « vieux frères », auront quand même chacun sur cette terre fait les cent pas, comme les quatre cent coups, sans jamais chercher ni attendre de gagner des mille et des cents pour être heureux. Á chaque jour suffisent ses peines et ses joies ne cessaient-ils de clamer.

Séducteurs impénitents friands de belles créatures, les Déconnards du village, à vrai dire, se rêvaient inoxydables. C’est l’illusion qu’entretiennent toutes les personnes jeunes, fortes, robustes et pleines de santé. Heureusement, car c’est cette illusion qui assure aussi le bonheur individuel et fait la beauté de la vie.

Cependant, un à un et une à une, les jours, les semaines, les mois, les trimestres, les semestres, puis les années continuent de s’égrener, de défiler et même de filer. Comble de malheur, au lieu de passer, ils se cumulent et s’accumulent, s’entassent quand l’homme lui se tasse au bout du compte. Aussi, Couz Bonbon-Glacé et Oncle Kengs-Zawada, à l’heure où s’approchent pour eux les soixante coups d’horloge, vont se découvrir de plus en plus vieillissants et impotents, en même temps que les circonstances ne cessent de leur rappeler qu’ils ont bien l’âge non seulement de leur deux jambes., mais de la troisième aussi.

Et ça, ça va se savoir.

Ce jour-là, cinq heures du matin n’avait pas encore sonné à l’horloge, que Batawaligba alias Couz Bonbon-Glacé, réveillé depuis longtemps, dû s’extirper de son lit, puis enfila aussitôt son éternel maillot de corps blanc à petits trous. Machinalement, il mit la main sur le pagne de velours bleu – que Yassekouzou son épouse avait fini par lui délaisser -, et se ceignit grossièrement les reins comme à son habitude

Dehors, le ciel était bleu et dégagé. Il faisait beau temps, après les grandes pluies diluviennes de ces dernières semaines, qui ont provoqué de graves inondations, endeuillé des centaines de familles, et déverser dans les rues et les lieux publics, de milliers de sans-abris désespérés, sans que les dirigeants de ce pauvre pays, préoccupés à s’enrichir et à se faire réélire – pour s’enrichir de mieux en mieux encore -, ne daignent leur apporter toute l’assistance nécessaire en pareils cas.

Batawaligba, se mit en tête de faire d’abord le tour du propriétaire. Traînant lourdement ses pas, il s’en alla aussitôt passer en revue, la troupe de sa dizaine de « poulets du village » ou « poulets bicyclette », nourris et élevés avec grand soin, en attendant de caresser un jour les papilles gustatives d’un visiteur de passage ou de faire le bonheur d’une de ces ingrates personnalités ou autorités, grands « mangeurs de poulets crevés », régulièrement en missions inutiles dans le coin.

Batawaligba se rendit ensuite dans l’enclos où sont gardés les vertébrés à sang chaud. Là, il eut droit à la fois, aux honneurs du régiment des brebis indisciplinées, à une vive démonstration de coups de cornes entre cabris récalcitrants, et plus loin, à l’accueil en fanfare du troupeau de moutons timbrés, dont le brouhaha des bêlements, dégénéra aussitôt en une cacophonie monstrueuse à rendre fou.

Batawaligba résolut enfin de revenir sur ses pas. Au passage, il s’empara de sa chaise longue discrètement rangée près de la cuisine, et quelques mètres plus loin, entreprit de la déplier, la posa puis de l’ajusta avec exactitude, toujours à son même emplacement situé en plein milieu de la grande cour. Batawaligba projetait ainsi s’allonger paisiblement, ronfler les narines ouvertes et les yeux fermés, le temps pour le soleil de se lever, et pour lui, d’aller retrouver son compagnon Kengougba dit Oncle Kengs-Zawada avec qui il s’était d’ailleurs séparé tard dans la nuit d’hier, à la fin de leur séance quotidienne d’interminable bavardage.

Mais Batawaligba alias Couz Bonbon – Glacé eut à peine le temps de poser sa paire de fesses dans le fauteuil qui les attendaient, qu’il aperçut, déboulant d’un angle mort de sa concession tout en clôture, son vieux-frère Kengougba dit Oncle Kengs-Zawada. On eut dit un dératé pris en chasse par le diable en personne.

  • Kengs mon grand qu’as-tu donc à afficher cet air inquiet et désemparé que je ne t’ai jamais connu ? S’enquit à brûle pourpoint Batawaligba.
  • Ah laisse Couz! Répondit Kengs qui poursuivit : grosses pluies de colère de ta belle-sœur Suzie sur moi encore ce matin mon frère. Mais cette fois je te dis gars, c’est une « furie diluvienne » qui risque de provoquer de graves inondations nerveuses susceptibles de secouer dangereusement et même d’emporter les digues amoureuses que nous avons érigé depuis tant d’années, même si elles ont souvent paru fragiles ;
  • Yessss Kengs le poèèèèèète – plaisanta Batawaligba en faisant un clin d’œil à son ai et en esquissant un sourire en coin. Ça ne sent vraiment pas bon ça hein vieux frère. Tiens ! attrape ce fauteuil d’abord. Assieds-toi, respire et raconte-moi tout ensuite.

Ainsi va débuter entre Oncle Kengougba dit Kengs – Zawada et son ami et complice Batawaligba alias Couz Bonbon Glacé, une longue journée de conversation qui durera jusqu’à tard dans la nuit. Une habitude qu’ils ont adoptée ces dernières années, question de meubler les heures qui passent et blessent, de caresser le temps qui s’éloigne, et de se souvenir de la bonne vieille époque de leur jeunesse de déconnards impénitents.

Adieu le temps où ils parlaient de leurs exploits téméraires d’antan lors des bals des jeunes ! Finis les comptes-rendus des dimanches d’autrefois sous les manguiers pour causer des les conquêtes féminines de la semaine! Plus question « de belle vie » dans les bars au cri de « poussa poussa jusqu’au petit matin » ! Ils ne sont plus, les beaux jours où ils jouaient tous les deux aux « jeunes premiers » dans les boîtes de nuit de la place « jusqu’à tongossa ».

Tout ça, c’était avant. Des décennies sont passées. Mine de rien.

Á les entendre aujourd’hui faire le récit de leurs tribulations du moment, plus est, en des termes souvent pathétiques, Oncle Kengs – Zawada et Couz Bonbon Glacé, à vrai dire font pitié, suscitent émoi, obligent à la compassion et à l’indulgence. De longues heures de bavardage plus ou moins insipides certes, mais dont l’essentiel est un condensé de grandes jérémiades sur les soucis intimes et les secrets les mieux gardés des couples, mais surtout, sur la « vie de l’Homme » ou sur l’Homme tout court, cet être astreint par cette maudite NATURE ou par on ne sait quel mauvais SORT, à subir dans le meilleur des cas, les pires épreuves de la vieillesse, et à faire ainsi l’expérience de la décrépitude humaine qui n’épargne aucun vivant, avant bien sûr, de le faire disparaître à tout jamais.

Mais malgré tout, malgré le tragique du destin jaloux et toutes les affres de l’existence, la vie vaut bien la peine d’être vécue, la planète terre mérite bien qu’on s’y aventure. C’est alors que le burlesque, le pittoresque et le rocambolesque de l’odyssée de Couz Bonbon Glacén et Oncle Kengs – Zawada, trouvent ici tout leur sens, au point d’ arracher au lecteur cette exclamation : Si les deux Déconnards n’avaient pas existé, il nous aurait fallu les créer !

Déconnement sur déconnement, les deux déconnards vieillisants se retrouvèrent ce matin-là, et passèrent de longues heures de causerie à déconner, et ils déconnèrent au propre, comme jamais personne de leur âge n’a déconné en déconnant.

Après avoir bu une gorgée du café que lui avait entretemps servi Couz Bonbon Glacé, Oncle Kengs – Zawada prit une grande inspiration, et ouvrit le dialogue qui poursuivit le dialogue qui avait commencé à son arrivée.

Oncle Kengs – Zawada : Couz j’ai encore raté ! Complètement raté je te dis mon frère. Pourtant j’avais bien démarré aussitôt que nous sommes entrés nous coucher. Je voulais me venger de la nuit dernière et prouver à ta belle-sœur que j’étais un vrai garçon. J’ai donc mis le gaz à fond. J’étais sûr de décoller puis d’atteindre rapidement la vitesse de croisière. Á peine la piste, que voilà, patatras ! Décollage et atterrissage en même temps. Lamentable et catastrophique. Alors, toute la nuit, j’ai enduré injures sur injures…

Couz Bonbon Glacé : Eh eh eh eh Kengs qu’est ce qui nous arrive à tous les deux ! (Il jette un coup d’œil derrière comme pour s’assurer que Yassekouzou ne les écoutait pas). Moi-même j’ai ronflé encore cette nuit. Toi, tu as pu démarrer. Moi, c’est une panne totale de mon moteur. Grave et complète. Alors, j’ai fait semblant de ronfler moi qui ne ronfle jamais. C’est ici que j’ai aggravé la situation. Au final, depuis cinq heures du matin j’ai fui la chambre, pour fuir la foudre qui se préparait à s’abattre sur moi.

Oncle Kengs – Zawada : Comment est-ce possible Couz. Moi, Oncle Kengs – Zawada l’homme qui démarrait au quart de tour et n’atterrissait qu’à la demande de la passagère embarquée, et encore !

 Couz Bonbon Glacé : Et moi alors ! Moi qui multipliais en une seule journée les voyages longs courriers, aller et retour sans escale avec différentes passagères, chacune son tour s’il te plait!

Oncle Kengs – Zawada : Écoute Couz ! On était jeudi la semaine dernière et il pleuvait abondamment. Malgré tout, ta belle sœur Suzie est sortie chercher au marché un gros poisson « mboto » comme j’aimais en manger quand j’étais encore le vrai Kengs – Zawada que tu as connu. Elle voulait vraiment me faire plaisir et tenait à être très agréable ce jour, au point qu’elle m’a même transmis sa bonne humeur, ainsi que des bouffées odorantes d’un bonheur inhabituel à chaque coin de notre maison. La journée se passa comme nous n’en avions plus connu depuis fort longtemps. Entre la cuisine, la véranda et la salle à manger, nous avons passé le temps à causer paisiblement, à plaisanter comme des tourtereaux, à nous moquer de nous-mêmes et de nos disputes de gamins, même à nous rappeler pour en rire, de mes multiples infidélités et de mes mensonges grossiers quand elle me prenait sur les faits et me posait des questions. Bref, nous avons parlé de tout et de rien. Le repas une fois servi, nous avons mangé et poursuivi agréablement la soirée jusqu’au moment d’aller nous coucher. Couz ! Á peine j’ai posé ma tête sur l’oreiller, que je me suis laissé emporter sans la moindre résistance, par un sommeil de mort. J’ai ronflé comme jamais homme n’a ronflé à côté d’une femme, et j’ai passé toute la nuit à ronfler d’un ronflement qui dépassait le vrombissement du moteur de la vieille 403 bâchée du vieux Sidiki le mécanicien. Aux environs de cinq heures du matin, quand j’ai ouvert les yeux, Suzie était assise au bord du lit et pleurait en silence. Je me suis alors souvenu que dans mon sommeil j’avais senti sa main parcourir le long de mon corps, sa bouche effleuré la mienne, sa voix me supplier de la toucher juste un peu sans réussir à me faire réagir. Pas le moindre du monde. Toute la semaine qui a suivi, le silence de tombe qu’elle a imposé entre nous a failli me tuer Couz !

Couz Bonbon Glacé : Oncle toi au moins tu as la chance ! Moi c’est devant le chef du village que Yassekouzou m’a convoqué l’autre jour, en présence de ses parents et du seul frère vivant qu’il me reste, moi qui suis « sans famille ». Les badauds du quartier eux, ne poulaient pas rater une si belle occasion, eux qui savent tout de nos disputes matinales. Et quand le chef a donné la parole à Yassekouzou, il ne fallait pas l’entendre :

« Chef cela fait depuis plusieurs mois que mon mari Bonbon – Glacé n’est plus bonbon mais seulement glacé. Plus de lumière à la maison. Coupure totale entre nous et délestage à durée indéterminée. Tel que vous le voyez assis devant vous, sa pipe ne charge et ne fume plus de tabac, son matériel de travail complètement rouillé. Je suis devenu plus que sa sœur. Quand je lui sers la nourriture, il mange comme un porc, et c’est pour ensuite ronfler dans mes oreilles toute la nuit sans se soucier de récompenser mes efforts et ma bonne volonté. Chef je n’en peux plus, je veux rentrer chez mes parents ».

Couz ! Tel que je voyais le vieux chef, j’ai compris tout de suite qu’il n’avait rien compris au discours de Yassikouzou. Et dès qu’il m’a donné la parole, je me suis mis à déconner, déconnement sur déconnement comme le déconnard vieillissant que je suis !

« Chef je sais que vous avez bien compris que ma femme n’a aucun respect pour vous ni ses parents. Et je vais le prouver. 1- Chef elle dit que je refuse de lui donner du bonbon. Est-ce de ma faute si elle est diabétique et que le docteur lui a interdit tout ce qui est sucré ? D’ailleurs à son âge qu’à-t-elle à aimer ainsi le bonbon ! En plus Chef il fait chaud, très chaud ces derniers temps, n’est ce pas qu’on nous conseille de boire beaucoup d’eau et d’en offrir de glacée à ceux qui nous entoure? 2- Cette histoire de lumière, de coupure et délestage Chef je n’y comprends rien. Demandez-lui si je travaille à l’ENERCA. Posez la question à l’ENERCA et à tous ceux qui sont ici s’ils ne subissent pas le même délestage chez eux 3- Matériel de travail rouillé ? Qu’elle me laisse le temps de dérouillé.Pipe qui ne charge pas tabac ou pipe qui ne fume pas tabac, je n’ai jamais fumé de ma vie et je ne supporte pas l’odeur de la cigarette elle le sait bien. 4 – Elle dit qu’elle n’est pas ma sœur ? Chef, pour moi elle est plus que ma sœur. Entre Yassekouzou et n’importe laquelle de mes sœurs, je choisis Yassekouzou ma femme. Ce n’est pas normal chef ? 5 – Enfin chef comme vous le savez, roter après un repas cela fait du bien, comme dormir et ronfler après un bon plat, est la preuve que ma femme sait préparer et que j’aime tellement ce qu’elle me sert tous les jours. Quelle faute ma femme me reproche ? D’ailleurs quel paysan est capable de cultiver même son champ chaque jour ? Quel travailleur n’a pas droit au repos hebdomadaire et au congé annuel ? J’en ai fini Chef ».

Oncle je te dis ! Le Chef a tranché pour conclure. Á Yassekouzou il a donné tort et à moi il a dit que j’avais dix fois raison. En plus, il a failli même ajouté une amende à ma femme parce qu’il ne comprenait pas qu’on convoque tout une assemblée et qu’on ose déranger la tranquillité des gens et du village pour une simple question de bonbon, de coupure d’électricité, de tabac ou de pipe qui ne fume pas…(Et Couz Bonbon Glacé partit d’un fou rire)

 Oncle Kengs – Zawada : Couz là je te reconnais. Ah ! Batawaligba alias Couz Bonbon – Glacé, le pilote de grande ligne et l’infatigable tireur d’élite ! Vraiment nous avons vieilli !

Couz Bonbon – Glacé : Kengs Devine qui était à côté du Chef le jour de notre palabre !

Oncle Kengs – Zawada : Son éternel « Capita », le vieux Kolifadoli alias « Bastos » !

Couz Bonbon – Glacé : Juste ! Kolifadoli lui-même. Quatre vingts ans, quatre jeunes femmes et toujours jeune ! Le vieux avait tout compris du fond de mes problèmes avec Yassekouzou. Alors un matin, il envoya me chercher de bonne heure et j’accourrai aussitôt le trouver à son domicile. Après les échanges de courtoisie et les amabilités habituelles, il me fit asseoir et s’est mis à rire et à se moquer de moi en faisant allusion à notre dispute conjugale. Puis, il héla la plus jeune de ses épouses et lui demanda de me servir un demi-verre de sa boisson personnelle. Au moment de nous séparer, il me fit remettre environ un litre de sa potion avec la consigne stricte que voici : tu ne devras jamais te servir toi-même. Remets cette bouteille immédiatement à ton épouse et dis – lui de te faire boire une grosse cuillère tous les soirs pendant sept jours. La lumière ne s’éteindra plus jamais dans votre foyer. Plus de coupure ni de délestage. Reviens me voir dans un mois pour la suite du traitement. Kengs vieux frère ! Quand j’ai expliqué ça à Yassekouzou, elle est rentrée dans une fureur, m’a arraché la bouteille des mains et l’a envoyée se briser contre le mur de la maison, en me disant lançant au visage : « Fais-çà avec tes putes que tu va chercher dehors, je ne suis pas une femme de rue » ! J’ai simplement secoué la tête en répondant ainsi : cette fois peut-être ce n’est pas la coupure de l’ENERCA que tu vas avoir, mais tu viens d’éteindre même la lumière du le soleil, la lune et les étoiles.

Oncle Kengs – Zawada : Oualaï Yassekouzou aussi t’a sorti qu’elle n’était pas une pute ? Tu sais, le jour où j’ai voulu préparer Suzie à une expérience originale, j’ai commencé à lui expliquer que lui l’amour entre l’homme et la femme, vit, se nourrit et s’entretient aussi grâce aux fantasmes. Alors je suis entré dans les détails de certaines choses qu’on pourrait faire jusqu’à lui montrer des photos et des films que j’avais pris le soin de choisir. Couz ! Ma femme m’a déclaré que j’étais devenu définitivement fou, que je n’avais aucun respect pour elle, qu’est-ce qu’elle m’a fait pour que je la traite en pute et que je choisisse de la ridiculiser jusqu’à ce point…et patati et patata pendant une semaine elle a parlé et pleuré !

Couz Bonbon – Glacé : Oncle écoute moi ! Mon Cousin qui vient d’arriver de Paris m’a parlé d’un comprimé qui s’appelle viagra. Se pourrait-il que cela nous aide à régler nos difficultés ?

Oncle Kengs – Zawada : Ah mouf ! Pourquoi ne le prennent-ils pas eux-mêmes là-bas France ? D’ailleurs, ma cousine qui vient aussi d’arriver de Paris m’a dit qu’en France il n’ya pas d’homme vrai ni de vrai mari. Ils sont tous « flagada » !

Couz Bonbon – Glacé : Eh eh eh Kengs tu m’apprends des choses hein ! Moi qui croyais que c’était tous des vrais gars !

Oncle Kengs – Zawada : Tu parles ! Écoute-moi bien Couz. D’abord, tous ces gens que tu vois jouer les fiers en arrivant ici, travaillent là-bas comme des bœufs, bien évidemment quand ils travaillent, parce qu’à vrai dire ce n’est pas tout le monde qui trouve du travail en France. Donc ceux qui travaillent, les soirs à la maison, ils n’ont qu’un seul souci. Manger et dormir. Et même dans leur sommeil ils rêvent de travail, du transport du matin, des grèves etc. Finalement ils dorment mal. Le matin, ils se réveillent fatigués mais ils n’ont pas le choix, ils doivent partir. Au final, ils se réveillent fatigués, ils partent fatigués, ils travaillent fatigués, ils reviennent fatigués, ils dorment fatigués et ainsi de suite…

Couz Bonbon – Glacé : Walaï Kengs le travail des blancs peut vraiment tuer les noirs deh ! Quand je pense que chez nous sur huit ou sept heures de travail par jour, les gens passent 5 heures ou plus à boire et à manger dans les « ngandas », ou à courir après les « nanas » !

Oncle Kengs – Zawada : Mais ce n’est pas tout Couz. Quand arrive la fin du mois en France, nos « immigrés » ne savent plus où donner de la tête. Ils ont l’argent en main ou sur leur compte mais ils « pleurent ». Entre les factures, les impôts, les huissiers, les crédits à rembourser, ils ne savent que faire. Sans compter ces fainéants et bras cassé qui vivent ici au pays et qui passent leur temps à réclamer ou à attendre tous les mois les « westerns-union », devenus pour eux une forme de salaire mais sans contrepartie. En définitive, l’on se sent si harceler, que de guerre lasse, on décide souvent de gagner en paix ce que l’on perd en argent. Alors avec tout ça mon gars, les femmes ont du souci…D’ailleurs ma cousine m’a confié un secret que je vais te dire mais à toi seul…

Couz Bonbon – Glacé : Oncle Fais-moi confiance comme « dhab » vieux frère !

Oncle Kengs – Zawada : Tu remarqueras qu’en France il y’a beaucoup de divorce. Par ailleurs, ma Cousine m’a dit que toutes ces filles et ces femmes « mariées » qui reviennent régulièrement au pays sous différents prétextes, c’est souvent parce qu’elles entretiennent des relations ici. Ah ma cousine ! Elle n’a même pas eu peur de moi et droit dans les yeux elle m’a sorti exactement ceci « Oncle ! Tu sais je te dis la vérité : moi-même quand je viens ici, c’est pour me faire tanner le cuir, me laisser bien secouer et fortifier les os par un vrai « Centro » à la corde de la guitare bien tendue, et capable de faire faire vibrer une femme à fond. Franchement Oncle ton bof de là bas n’est que le père des enfants. Il ne sert plus à rien ce ronfleur! »

Couz Bonbon – Glacé : yé yé yé yé Oncle France « m’a tuer » ! Je dirai à mon cousin de faire attention sinon elle va perdre sa femme bientôt. D’ailleurs que vient cherchercelle-là ici tous les deux mois ou presque si ce n’est pour vibrer comme dit ta cousine ? Á ma connaissance, elle ne construit pas et ne fait pas de commerce ici. En plus, son père, sa mère, ses frères, ses sœurs, toute sa famille est en France depuis plusieurs années !

Oncle Kengs – Zawada : Ah ah ah Couz entre le bois et l’écorce ne met jamais le doigt sinon tu vas regretter. Tu seras rejeté à la fois par cette femme et surtout par ton cousin. D’ailleurs qui te dit que lui et les autres ne le savent. N’as-tu pas remarqué sur Facebook ?

Couz Bonbon – Glacé : Non Oncle dis-moi !

Oncle Kengs – Zawada : Quand tu vois un homme ou une femme commencer à publier les anciennes photos du couple, c’est qu’ils ne peuvent plus faire de nouvelles ensemble sans doute parce qu’il y’a des problèmes. Et quand le couple passe son temps à envahir les réseaux sociaux de belles photos de vacances et de fête, dis-toi qu’il y’a anguille sous roche, que la face immergée et rayonnante d’un iceberg enfoui dans un océan de larmes. Donc encore une fois Couz sache que les cocus sont de grands amoureux !

Couz Bonbon – Glacé : Tu as parfaitement raison vieux frère. Á vrai dire les hommes ne sont pas mieux non plus. J’en connais qui sont venus en vacance au pays et qui sont restés collés derrière les petites ici. Ils ont fini par abandonner femme et enfants en France mais quand tu vois aujourd’hui comment ces mêmes filles les traitent tu as envie d’avoir pitié…

Oncle Kengs – Zawada : Ah « ces petites filles aux jupes courtes qui bousillent les ménages des bons pères de famille de ce pays » !

Couz Bonbon – Glacé : Ouiiiii ces petites filles qui n’ont plus peur de rien et ne respectent même plus les hommes qui ont l’âge de leur grand-père !

Oncle Kengs – Zawada : Couz je vais encore de raconter une de mes mésaventures avec ces petites (et il éclata de rire en se tenant les côtes)

Couz Bonbon – Glacé : Raconte vieux frère qu’est-ce que ces petites là t-ont encore fait ?

Oncle Kengs – Zawada : Tu vois Couz à vrai dire c’est nous-mêmes qui cherchons notre mort. La dernière fois je ne sais plus d’où je revenais. Ah je crois que j’étais pati voir le médecin parce j’avais mal dormi la nuit d’avant. Il était 11 heures et j’étais presque proche de ma maison. Subitement, je repère une petite qui attendait son taxi. Je ne sais plus ce qui m’a pris, mais voilà que je ralentis et viens garer ma mobylette devant elle, et lui propose l’emmener à sa destination. Curieusement, je n’avais même pas fini de parler qu’elle était déjà montée. Chemin faisant, je lui demande où elle allait, et à quel niveau veut la déposer. Elle me répond du tic au tac « emmène là où tu veux ». Ouaoooh je me suis dis ça commence bien. Je l’emmène donc boire un coup dans le premier « nganda » situé sur notre chemin et géré par une tenancière de mes connaissances. Bref, le temps de demander son goût, « l’enfant » commanda du whisky. J’eus droit à mon éternel vin et puisque j’avais fainm, je fis venir deux plat de « yabanda » que nous avons mangé. Les minutes passèrent, puis les heuresse mirent à s’écoulent et enfin la nuit qui tomba. Un moment elle s’approcha et me fit dans l’oreille : « tonton je connais un bon coin pas très loin d’ici. Les chambres sont à mille franc seulement et les draps sont propres ». Je te passe les détails Couz. Je lui proposai plutôt un hôtel de mes aventures. Dans mon cœur, je priais le Dieu de l’amour : « pourvu que ça démarre…que je décolle…vivement que ce soit un long courrier sans escale… ». Couz tu me suis ?

Couz Bonbon – Glacé : Je te suis tout ouïe Oncle !

Oncle Kengs – Zawada : Depuis une heure que nous avons pris la douche et que la petite est partie se coucher et moi m’asseoir sur la chaise je n’ai plus bougé. D’ailleurs pour faire quoi et avec quoi ! Alors, j’ai commencé à divaguer et à parler à la petite de mes problèmes de santé : je lui ai expliqué les troubles de l’hypertension chez un homme de mon âge, des conséquences des arthroses des genoux, des douleurs de la sciatique, n’importe quoi. Tu parles Couz. La petite a simplement répondu « tonton c’est à l’école qu’on apprend tout ça mais moi j’ai quitté l’école depuis le CE1 ou le CM1 je ne sais plus. Mais si tu viens ici je peux bien te masser. Ça c’est ma spécialité ». Mon sang n’a fait qu’un tour. Entretemps le téléphone fixe de l’hôtel a sonné, je décroche, et le standardiste s’excus parce qu’il s’était trompé de numéro de chambre. Mais au lieu de raccrocher, je suis resté à parler dans le vide tout paniqué. Quand j’ai déposé le combiné, j’ai dit à la petite que des qui nous avaient vus au nganda et qui nous ont vu certainement entrer ici, sont partis dire à mon épouse qui vient de débarquer à la réception de l’hôtel. En même temps que je parlais, je lui glissai 2000 FCFA rapidement dans la main et je lui demandai de détaler si elle ne voulait pas mourir parce que je connais ma femme quand se fâche. Une fois qu’elle est partie Couz j’ai poussé un ouf de soulagement. En fin de compte, je suis arrivé devant ma porte vers 3 heures du matin. J’imaginais aisément ce qui m’attendait, mais cabri mort n’a plus peur de couteau.

Couz Bonbon – Glacé : Oh vieux frère ! Á moi il est arrivé plus ou moins la même chose. La petite fille est restée sur le lit et moi dans la douche en train de supplier ma troisième jambe de ne pas me faire la honte. J’ai même invoqué l’esprit des ancêtres pour qu’ils viennent à mon secours, moi leur fils en difficulté. Un moment j’ai décollé et sans tarder j’ai couru rejoindre la petite dans le lit et j’ai pris la piste sans autres formalités d’usage. Kengs je te dis ! Survoltage, décollage et atterrissage le tout en même temps et en moins d’une minute. La petite voulait se plaindre alors j’ai déconné ! Je lui ai tendu ma carte d’hypertendu et de diabétique en ajoutant : « que je meurs ici comme tous ces vieux pervers qu’on a retrouvé dans leur bureau nu et sans vie à côté d’une poubelle rempli de condom c’est ça que tu veux ? Si tu es venue à cause de l’argent, tiens voilà dix mille francs et file vite avant que je ne m’évanouisse ». La fille n’a pas demandé ses restes.

Oncle Kengs – Zawada : Vraiment Couz il arrive bien des mésaventures aux hommes sur cette terre. Et nous voilà aujourd’hui vieillissants. Nul mérite, aucune médaille, et personne non plus, ne nous érigera le monument du « dandy de grand chemin » ou celui du « Séducteur impénitent ».

Couz Bonbon – Glacé : Mais qu’à cela ne tienne Kengs. Nous aurons vécu la vie qui est la nôtre. Tiens ! Nous sommes en train de parler comme des vieux que nous ne sommes pas, que nous sommes loin d’être. Qui dit que nous n’atteindrons pas les quatre vingt dix ans ?

Oncle Kengs – Zawada : Que Dieu t’entende Couz et il t’entend très bien !

Couz Bonbon – Glacé : Cela veut dire Kengs qu’à bientôt soixante ans, nous aurons vécu les 2/3 de notre vie sur terre.

Oncle Kengs – Zawada : Et donc qu’il nous en reste encore un bon tiers pour jouir des merveilles d’ici bas et préparer le Ciel !

Couz Bonbon – Glacé :
« 
Ô temps ! Suspends ton vol, et vous, heures propices !
Suspendez votre cours
Laissez-nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours ! »

Oncle Kengs – Zawada : Alphonse de LAMARTINE !

Couz Bonbon – Glacé : 5/5 Kengs ! On voit que tu n’as rien perdu de ton esprit brillant.

Oncle Kengs – Zawada : Il se fait tard Couz.

Couz Bonbon – Glacé : La séance des déconnements de ce jour est suspendue !

Oncle Kengs – Zawada : Elle reprendra demain après-midi chez moi pour calmer la colère de mon épouse Suzie.

Couz Bonbon – Glacé : J’arriverai donc en compagnie de Yassekouzou avec quelques petits cadeaux en main.

Oncle Kengs – Zawada : Bonne idée COUZ. J’irai chercher deux pagnes wax chez notre client Aladji Kouayanga au km5. Ensemble nous présenterons des excuses à nos épouses et demanderons pardon pour tout le mal que nous leur avons fait.

Couz Bonbon – Glacé : Sait-on amais ! Peut-être que grâce à ce geste nous redevenir, nos flûtes pourront enfin émettre de belles notes musicales.

Kengs – Zawada : sacré Couz ! Toujours une longueur d’avance. Á demain et bonne nuit vieux frère.

Couz Bonbon – Glacé : Á demain compagnon de bonheur et de misère !

Ainsi vieillissent les déconnards invétérés et les séducteurs impénitents.
Et que celui qui n’a jamais déconné s’approche.

GJK – Guy José KOSSA

 

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