Chronique de GJK

CENTRAFRIQUE : JE N’IRAI PAS AU NORD

J’ai décidé depuis longtemps, et j’avais même prévenu, que si cela devait arriver, je n’irai jamais au nord. Donc, je dis et je répète, JE – N’I – RAI – PAS – AU- NORD !

D’ailleurs, nord de quoi, par rapport à quoi, et pourquoi ? Que je sache, je n’ai rien au nord, je m’en fous du nord, et je n’ai pas perdu le nord en le disant.

S’il vous plaît mes frères, mes amis, aidez-moi à bien comprendre. Pourquoi devrais-je partir pour le nord, et laisser au sud, tous mes parents du côté maternel, mes amis, mes biens, bref, toute ma VIE ? On me sort, que c’est parce que je suis musulman. Je viens de découvrir que je suis musulman, depuis qu’on veut absolument, me le faire accepter. Car, depuis toujours, j’ai cru que j’étais simplement un ÊTRE HUMAIN, UN CENTRAFRICAIN. Je me pose la question : dans ce pays, notre pays la Centrafrique, qui est musulman et qui est chrétien ?

Moi, musulman ? En quoi le reconnaissez-vous ?

 Mon physique dites-vous ? Et pourtant, on me prend souvent pour le prêtre du coin, à qui, me dit-on, je ressemblerais comme deux gouttes d’eau. Il a été d’ailleurs ordonné prêtre le même jour que Désiré, mon frère de même père et même mère comme on dit chez nous.

 A la tonalité de ma voix, quand je m’exprime en sango ? Mais, avez-vous déjà entendu parler un Banda Linda, un Yakoma Ngbandi pur jus, et même un ancien chef d’Etat Gbaya de Benzambé ? Eux aussi, on peut les situer géographiquement. Pourquoi ne repartiraient-ils pas où sont nés leurs parents ? En plus, mes parents et moi, sommes du sud de la RCA ; pour quelles raisons veut-on m’expédier au nord comme un colis indésirable?

 Vous me traitez de sale musulman, sans me dire exactement, si ce substantif est désormais synonyme d’infraction pénale ; Ce n’est pas du tout, ou pas encore le cas aujourd’hui ; cependant, quiconque est convaincu d’être musulman, me semble-t-il, est  de ce fait condamné à mourir sous les coups de machette de n’importe quel animiste, porteur de gris-gris fabriqués par des marabouts musulmans ! C’est dommage, car à bien chercher, qui qu’on soit en Centrafrique, on doit avoir certainement un parent, un beau-parent, un ami,…quelque part, qui est musulman ou chrétien. Donc, ceux qui tuent dans un camp ou dans un autre, doivent avoir tué quelqu’un de leur famille proche ou lointaine.

 Ecoutez ! En ce qui me concerne personnellement, je continue de prier 6 fois par jour au lieu de 5, compte tenu de l’énormité de mes péchés, et je fréquente assidûment les mosquées. Cependant, il y’a  belle lurette que mes chers amis dits chrétiens, ont décidé que je n’étais plus musulman, à cause de mon goût très prononcé pour la viande de porc, que je mange tous les jours sous toutes les déclinaisons culinaires ; mais aussi, à cause de mes penchants vifs pour la bière et le vin que, semble-t-il, le coran interdit, mais dont je ne peux m’en passer. Mais diable ! croyez-vous vraiment que c’est une bonne idée de m’envoyer dans un coin privé de nganda, et boîte de nuit ? Admettez que vous n’êtes pas sérieux !

 Quoique certains pensent de moi et de mes parents qui sont les leurs, ils auront toujours besoin du « michoui de viande de bœuf, de cabri ou de poulet » que vend mon cousin Abdoulaye ; des condiments de Fatou, des véhicules de transport de Dodo mon oncle qui est le seul à partir jusqu’à Béma vers Ouango-Bangassou. Mais ce ne sont pas tous les Centrafricains du Km5 mon quartier qui sont commerçants : nous avons des fonctionnaires, des cadres d’entreprises, des étudiants qui ne peuvent pas sortir depuis un certain temps, de ce micro état, pour aller travailler au développement de la RCA. Ce qui est sûr, beaucoup comme moi, sont décidés à ne pas bouger de Bangui. Si le temps risque de tuer certains, beaucoup d’autres réussiront à tuer le temps.

  Ah ! si je comprends bien, peut-être est-ce parce que j’avais crié partout qu’il n’y a pas de chrétiens en Centrafrique qu’on veut m’amener au nord ? Si c’est  pour cela, je répète encore, il n’y a ni musulmans, ni chrétiens en Centrafrique. Il n’y a que des individus qui fréquentent des mosquées et des églises. Pour vous en convaincre, je vous dirai que tous mes amis dits chrétiens, sont officiellement mariés à une seule femme devant Dieu et les hommes. Mais semi-officieusement, la plupart sont quatre fois polygames comme les musulmans, sans compter, les victimes collatérales quotidiennes que font les plus obsédés, ou les coureurs de circonstances. Les amis dont je parle, ne mettent pieds à l’église que les jours de Noël et Pâques, ou à l’occasion des baptêmes. Car pour eux, ce sont souvent des occasions de beuverie, et de chaudes nuits de rêve, passées dans les bras de femmes notoirement infidèles, qu’on appelle « légionnaires », « saint Vincent de Paul », « Sainte Rita », consœurs de ceci ou consœurs de cela. Et, je dirai même plus, étant entendu que « cabri mort n’a pas peur de couteau » : il semble que le Pape, dépassé par le nombre de cas d’adultère et de divorces occasionnés par les prêtres centrafricains, a été obligé d’en licencier la moitié, sans préavis ni indemnités. Heureusement pour ces derniers, le tribunal de travail de Bangui, on ne sait surtout sur quelle base, vu que ce ne sont pas des travailleurs, le tribunal dis-je, vient de condamner l’Eglise à leur verser des dommages-intérêts. Le Pape dépassé pour la seconde fois, a finalement décidé, pour éviter la multitude d’enfants de parents prêtres et sœurs religieuses, d’officialiser à titre « très regrettable », la polygamie des prêtres centrafricains, coureurs de jupon impénitents.

Où sont alors les chrétiens ? Où sont-ils en train de tuer des musulmans qu’ils obligeraient à se délocaliser vers le nord ? Qu’on arrête de nous saouler, avec cette histoire de guerre confessionnelle. D’ailleurs, on a finalement cessé de parler des Anti-balles-à-Ka, en tant que combattants villageois porteurs de machettes. Personne, aucun étranger, fut-il travailleur humanitaire, militaire de la force internationale, ou politologue et journaliste spécialiste de la RCA, personne ne peut aimer et parler de la Centrafrique, plus que les Centrafricains eux-mêmes. Il nous faut résoudre nos problèmes sans toujours nous sentir obliger de courber l’échine, devant des gens qui finissent toujours par nous contraindre, d’appliquer des solutions étrangères, à des problèmes centrafricano-centrafricains.

Hier, il avait été reproché, y compris par le plus grand Imam, à nos frères Centrafricains musulmans, d’être complices de la Séléka; de n’avoir rien pu faire, voir laissé faire, les éléments de cette Séléka.  Aujourd’hui, on veut,  les rendre malgré eux, complices de leur relocalisation.

Les Centrafricains dits musulmans, devraient pouvoir saisir la double meilleure opportunité qui leur est ainsi offerte, d’affirmer leur centrafricanité, leur identité spirituelle, leur attachement profond à leur mère patrie la RCA: d’une part, en se désolidarisant, de toutes les initiatives de Abakar Sabone, et comparses, qui appellent à la partition de la RCA; d’autre part, en refusant catégoriquement de se soumettre aux incongruités des prétendues organisations internationales humanitaires, qui veulent utiliser leur relocalisation inopportune, à des fins inavouées.

Aux autorités religieuses, je lance un vibrant appel afin que le dialogue islamo-chrétien, si souvent prôné mais jamais concrètement mis en mouvement, trouve à travers la crise centrafricaine, l’occasion d’expérimenter un jeu de rôle grandeur nature dont le prolongement devrait pouvoir se traduire dans les cœurs, mais surtout  dans les actes quotidiens.

A vous tous chers compatriotes épris de paix, de justice et de concorde; moi votre serviteur, illustre inconnu sans prétention, sans ambition et sans aucun mandat ni du ciel ni de la terre ; moi le Centrafricanoptimiste incurable, animé par l’esprit des grands Centrafricains que furent entre autres :

  Les Sultans de Zémio, Mbomou, Rafaï, Bangassou

 Karnou le grand vainqueur de la guerre de Kongo-wara (1928-1931)

 Le lieutenant Koudoukou, distingué officier Centrafricain de la guerre de Bir-Hakeim

 Barthélémy Boganda, « L’Elu du peuple et l’Elu de Dieu »

 Maître Zarambaud Assingambi, l’homme de tous les combats : combat pour la dignité, combat pour la liberté, combat « pour le triomphe de l’ange sur la bête, de la lumière sur l’ombre » 

 Donatien NGUIMÉ enlevé aux premières heures du 5 décembre 2013 pendant une interview en direct devant les caméras de Itélé et devant des milliers de téléspectateurs dans le monde.

 Le Député-Maire Saleh Dido, dernier musulman de Mbaiki tué le 28 février 2014

 Tous les milliers de centrafricains, enfants, femmes et hommes, jeunes, adultes et vieillards, victimes de la barbarie humaine

Je demeure convaincu que la RCA, peut et doit surprendre. Ils seront surpris, tous ceux qui croient que les fiers détenteurs de Yassitoungou, ne sauront pas défendre leur diamant, or, coltan, bauxite, uranium, pétrole.

Du sud au nord et de l’est à l’ouest, tous les Centrafricains devront  se tenir prêts. Tel est le sens de l’appel à la GRANDE MOBILISATION INTERNATIONALE DE TOUS LES CENTRAFRICAINS POUR LA PAIX ET L’UNITE que nous comptons lancer dès demain. A la tête de cette manifestation, le peuple Centrafricain convie à prendre place, Mme Samba-Panza et son gouvernement, les autorités religieuses et les leaders de la société civile.

LA RCA OU LA RCA, LA RCA RESTERA LA RCA, UNE ET INDIVISBLE.

GJK – L’Élève Certifié
De l’École Primaire Tropicale
Et Indigène du Village Guitilitimô
Penseur Social

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Un commentaire

  1. C’est ici le véritable cri d’un digne fils du pays. Prions pour l’unité de toutes les filles et fils de la RCA.

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