CENTRAFRIQUE : LE PARI DE LA PRÉSIDENTE SAMBA-PANZA
« Je ne suis pas une femme bête et aucun Président n’est stupide. Sachez que la Communauté Internationale n’a rien à m’imposer. Aussi, je tiens à vous dire que personne ne me dicterait quoi que ce soit. Ce qui est sûr, vous connaîtrez le nouveau Premier Ministre dans quelques heures… » Tel était en substance le discours prononcé en Sango ( Langue Nationale de la RCA) par la Présidente Samba-Panza le Samedi 9 Août 2014, devant un parterre de manifestants pour la paix au Stade Omnisport. D’un ton emphatique, elle a défié ce jour toute la Communauté Internationale. La teneur de son discours laissait clairement entrevoir un bras de fer entre elle et la dite Communauté Internationale sur le choix du nouveau Premier Ministre. A force de discourir, la manifestation pour la paix avait finalement pris l’allure d’un meeting politique. La Présidente en a profité pour sermonner ses détracteurs et tester également sa popularité. Pourquoi la Présidence de la Transition a-t-elle organisé une manifestation en prélude de la nomination du nouveau Premier Ministre ? Etait-elle obligée de faire un discours réprobateur lors d’une plateforme de la paix ?
Souvenez-vous, le site d’analyse « Les Plumes de RCA » a publié le 6 Août 2014 une chronique intitulée : Le joker insoupçonné de la Présidente Samba-Panza pour la primature. Cet article faisait déjà écho du choix de Madame Samba-Panza pour la primature en ces termes: « En dépit de la candidature de Meckassoua âprement soutenue par la Communauté Internationale, le pouvoir de Bangui travaille avec efficacité dans l’ombre pour imposer Mahamat Kamoun au poste de Premier Ministre. Selon certaines indiscrétions proches de la cour, la Présidente est formelle sur le choix de l’ancien Directeur du Cabinet de Djotodia et actuellement Ministre d’état-conseiller à la Présidence au poste de Premier Ministre. Ce faisant, elle n’y va pas avec le dos de la cuillère pour actionner la candidature de Kamoun auprès de la Communauté Internationale » . Cette information a été confirmée le 10 Août 2014, par la promulgation du décret de nomination du Premier Ministre Mahamat Kamoun.
En vérité, il y’avait un enjeu capital dans le choix du nouveau Chef du Gouvernement. Mais désormais les dés sont jetés et les carottes sont cuites depuis que Dame Cathy a officialisé la nomination de son premier ministre.
Pourquoi le choix de Kamoun ? A première vue, tout le monde met en exergue le lien indubitable entre les deux personnalités. Mais selon certains observateurs de la vie politique centrafricaine, cette nomination serait surtout le fruit de l’efficient travail d’un puissant lobby de diamantaires centrafricains. La Centrafrique compte approximativement 175 diamantaires dont 99,5 % ne sont que des Centrafricains d’obédiences musulmanes.
Cependant, ces professionnels de diamants ne versent que 6 % de leurs ventes dûment déclarées dans les caisses de l’état alors que c’est un secteur d’affaires très rentable. Afin d’éviter toute taxation, certains diamantaires s’orientent davantage vers la vente frauduleuse source d’un grand manque à gagner pour l’état centrafricain.
Dès le lendemain de la suspension de la Centrafrique du processus de Kimberly, le secteur du diamant s’est effrité quand bien même son exploitation illicite perdure. A ce qu’il parait, la mise à l’étrier de Kamoun pourrait faciliter la réintégration du processus et la reprise dans ce secteur trop prometteur. Aussi, Monsieur Djono Ahaba, neveu de Djotodia, est pressenti pour occuper le poste de Ministre des Mines. Acceptons-le, ce lobby de diamant est piloté depuis Cotonou par le sulfureux Am-Nondokro. Si la coalition séléka conteste la nomination de Kamoun, Djotodia lui, se frotte les mains car son fidèle lieutenant mettra désormais en œuvre son agenda caché. D’autres débatteurs de la crise centrafricaine pensent que le nouveau Premier Ministre viendra bloquer inévitablement le processus du réarmement des FACA en cours et il se préoccupera surtout de la mise en œuvre des contrats que Djotodia avaient signé pendant sa chaotique présidence.
Il est clair que la Présidente a gagné la première manche de son bras de fer contre la Communauté Internationale mais les autres parties laissent présager une avalanche de difficulté pour son joker.
Espérons que les mots aideront à guérir les maux de la République.
Rodrigue Joseph Prudence MAYTE (RJPM)
Chroniqueur, Polémiste
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