Chronique de GJK

REGRET MAIS DE QUEL REGRET… ?

L’on a beau gloser au sujet du retrait Tchadien de la Misca, et des regrets répétitifs clairement exprimés par les autorités Centrafricaines;  une chose est certaine, Idriss Deby Itno, l’enfant terrible de l’Afrique Centrale n’a pas encore dit son dernier mot.

C’est bien connu, le Tchad, membre de la CEEAC (Communauté Economique des Etats d’Afrique Centrale), dispose de l’une des armées les plus redoutables d’Afrique. On a bien vu, sur le terrain des hostilités du Mali, membre de la CEDEAO (Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest), cette armée de soldats très courageux, expérimentés et aguerris aux combats, faire les démonstrations pratiques convaincantes, et apporté suffisamment, toutes les preuves, de ses capacités opérationnelles. Les combattants tchadiens, ont fini par forcer l’admiration, autant que l’inquiétude de la France, laquelle préfère désormais le Tchad comme allié, pour mieux s’en servir en Afrique.

Mais la Centrafrique n’est pas le Mali. Le jeu et les enjeux des deux « guerres », sont loin d’être comparables. Et à tous ceux qui seraient tentés d’en douter, nous leur demandons simplement de poser la question aux soldats Tchadiens, de savoir, sur quels ennemis clairement identifiés, ont-ils  été amenés à tirer ce 29 mars 2014 ?

Que le Tchad ait décidé et amorcé officiellement son retrait de la RCA, peut et doit même donner  lieu à des réjouissances populaires de la part des Centrafricains, dans l’imaginaire desquels, s’imposent, se juxtaposent et passent en boucle, des images cauchemardesques accumulées depuis plus de dix ans, et qui rappellent à chaque instant que :

– Tchadiens soldats = Libérateurs assassins = Bozizé Président assassin = Bozizé chef anti-balle-a-ka tueurs
– Tchadiens soldats = Séléka tueurs et destructeurs = Djotodja traître assassin voleur
– Tchadiens soldats-Misca =  Assassins tueurs de civils centrafricains = défenseurs de la partition

Vox Populi Vox Dei! les Centrafricains disent aux mercenaires Tchadiens qu’ils partent! « …qu’ils partent, et que nos femmes et nos enfants jettent derrière leur avion, le tison ardent, symbole du départ définitif et d’un souvenir couvert de honte et de malédiction populaire » (B.Boganda) 

A partir de là, on peut comprendre assez aisément, la fulgurante sortie des Centrafricains, qui ont envahi depuis plusieurs jours, tous les médias, et plus particulièrement les médias sociaux. Ces compatriotes, en effet, n’ont pas eu de mots suffisamment forts, pour exprimer leur indignation et leur dégoût, et surtout qualifier de « trahison », « d’irresponsable»,  de  « connivence et intelligence avec l’ennemi  tchadien », le communiqué de presse daté du 3 avril et signé du Ministre Centrafricain des Affaires Etrangères, communiqué élaboré et publié depuis Paris, et dans lequel se trouve à la première ligne, le substantif « beaucoup de regret » .

En ce qui me concerne, je n’arrivais pas à saisir en première lecture, les raisons de ce déchaînement « inutile»,  suscité par trois petits mots. Dans un premier temps, j’ai  donc voulu en toute sincérité, partir au secours, et porter assistance à Ministre Centrafricain en danger. Fallait-il donc m’élever immédiatement contre toutes les « dérives », ainsi que les récupérations de mauvais aloi, visant à jeter en pâture aux politiciens tarés, un technocrate du gouvernement technocratique, et pas des moindres.  Pour cela, il suffisait de demander alors à tous, pourquoi s’époumoner pour un mot, quand on sait que le vrai combat à livrer et qui nous attend est ailleurs? Je devais aussi recourir à l’argument que fourni des figures de rhétorique, que sont la  « prétérition » et la « litote », utilisé régulièrement dans les rédactions de type administratif, pour tenter de «sauver »  le soldat, Chef de la Diplomatie Centrafricaine. Mieux, on sait que dans la vie courante, il  nous arrive  souvent d’exprimer des regrets sur la forme, sans rien « regretter » vraiment dans le fond ; de servir par exemple du « désolé » à un ami qui nous sollicite pour un prêt, alors qu’au fond, nous ne manquons de moyens de lui répondre favorablement.

Cependant, tous ces arguments que j’avais préparés, se sont étouffés malgré ma bonne volonté. En voulant aller plus loin en profondeur, et « ratisser large » pour peaufiner ma « plaidoirie en faveur de mon client accablé», j’ai  été très  vite déçu.  Du simple « regret » ministériel défendable « prononcé » le 3 avril 2014, ledit «regret » est devenu  indéfendable, dès lors qu’il a été e clairement et  plusieurs fois repris, par le Premier Ministre et La Présidente de la Transition. Solidarité gouvernementale oblige ou « conspiration du regret »? Errare humanum est sed perserverare diabolicum. Du coup, l’expression d’un tel « regret », participe de la provocation.

En effet, le discours diplomatique, semble-t-il,  a bien mauvaise réputation, car il est dit banal et euphémique, langue de bois ou mensonger. On peut ainsi  donc penser, que l’emploi du  « regret  ministériel » n’est donc pas « sincère ». Par contre, j’ai beau chercher, et n’arrive cependant pas à me convaincre moi-même d’une chose: dans tout l’espace virtuel de la discursivité diplomatique, l’ambiguïté pragmatique et sémantique, en était-il à ce point réduite absolument, à l’utilisation du seul vocable de « regret », dans ce communiqué très sensible du Ministre des Affaires Etrangères? Quid alors des discours de la Présidente et du PM? Tous les comptes faits, pourquoi nos autorités n’ont-ils pas cru devoir déclarer simplement « prendre acte » du retrait du Tchad? De mon point de vue, ils auraient certainement réussi de ce fait, à allier à la prudence du langage diplomatique, le nécessaire consensus et respect dû au peuple Centrafricain, meurtri et échaudé par de vrais-faux soldats Tchadiens de la Misca.

Quoiqu’il en soit, et si on y prend garde, la nouvelle saison des relations Centrafricano-Tchadiennes qui s’ouvre, peut se révéler porteuse d’orages plus violents, et de tempêtes déstabilisatrices beaucoup plus fortes. Il faut se dire, en plus de sa puissante armée, Idriss Deby Itno, le Président que ses homologues osent à peine contredire et défier frontalement, reste encore « l’ami incontournable », de la France « soldat de la paix » de Hollande et Le Drian. Il dispose surtout à volonté, d’énormes ressources  financières que lui procure « son » pétrole.

 Armée et argent, deux atouts qui manquent cruellement à la RCA. D’une part, l’extrême indigence du pays, le contraint à tendre à la ronde, la sébile du mendiant à tous ses voisins et au-delà. D’autre part, les FACA (Forces armées centrafricaines), cette institution naguère constituée de milliers de braves soldats guerriers, a été méthodiquement désossée, réduite en lambeaux difficile à recoudre. Pire, Idriss Deby Itno, nul n’ignore, connaît de l’intérieur les FACA, mieux que l’ensemble de tous ses officiers supérieurs, chômeurs embourgeoisés réunis.

Ceci expliquerait-il cela? Car comment comprendre autrement, l’air délibérément et publiquement rampant, des autorités Centrafricaines? Plus est, même si l’on veut invoquer une certaine courtoisie, que requiert le langage et l’attitude diplomatiques, pour leur accorder des excuses, on se rend compte malheureusement, que cet argument ne résiste point à l’analyse et à la critique objectives.

En définitive, la Présidente et le Gouvernement de la transition, ainsi que tous les futurs dirigeants Centrafricains, ont de quoi s’inquiéter pendant les prochains mois et années. Ils  doivent se demander chaque jour, d’où viendra le prochain coup de Idriss Deby Itno, l’homme à la rancune tenace, humilié par la Centrafricains et contraint au retrait par la communauté internationale.

GJK – L’Élève Certifié
De l’École Primaire Tropicale 
Et Indigène du Village Guitilitimô
Penseur Social

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