LitteratureVos plumes

QUAND LA POÉSIE BERCE NOTRE SOIRÉE

Par LPB
Nous avons l’habitude depuis quelques temps déjà avec des amis de nous rassembler une fois toutes les deux semaines dans le cadre de ce que nous avons appelé « notre cercle littéraire ». Il faut bien se donner un genre n’est-ce pas ?
Prière toutefois de ne pas se fier au titre pompeux. Il s’agit tout juste de retrouvailles de personnes aimant la lecture et en mal de distraction, qui ont donc décidé de se réunir, de temps à autre, pour partager autour d’un verre et de mignardises leurs univers littéraires. Les participants sont d’origine diverse et variée et les membres sont libres de parler du genre littéraire de leur choix. Ainsi il est tout autant question de romans, de poésie, de nouvelles voire de blogs pour ne citer que ces quelques genres littéraires. Et les livres présentés sont dans toutes les langues possibles, mondialisation oblige.
Il n’est nullement question de lecture imposée à cause de l’inexistence de librairies dans la ville de Bangui, pour ne pas dire sur toute l’étendue du territoire. Chacun parle donc de ce qui lui plait. Même s’il est vrai que les livres circulent énormément entre nous. Il nous est toutefois arrivé, une fois, d’avoir une lecture imposée. Il s’agissait de Oubangui Chari, le pays qui n’existait pas de Jean-Pierre Tuquoi. La raison en était que l’ancien vice-président, M. Henri Maidou avait accepté d’en discuter avec nous. Il m’avait proposé de partager avec mon groupe son point de vue et son regard d’ancien acteur de la vie politique centrafricaine. Nous en reparlerons peut-être une autre fois.
Il nous arrive cependant d’organiser, de temps à autres, des journées ou soirées à thèmes ou encore par exemple de déclamer des pièces de théâtre. Il est agréable de constater qu’il prévaut jusqu’ici, en dépit des fonctions et /ou titres de certains, une très bonne ambiance, plutôt bon enfant.
Nous avons eu aussi l’opportunité d’échanger avec certains auteurs nationaux, dont le célèbre bédéiste Didier Kassai, Landry Ouoko ou encore Florence Koyt Deballet. C’est ainsi qu’ayant découvert que l’un de nos membres, citoyen togolais de son état, avait publié des recueils de poésie, nous lui avons proposé, selon sa disponibilité de nous présenter son œuvre lors d’une soirée qui lui serait dédiée.
La soirée « spéciale Eucher » (c’est le prénom de notre ami) fut vraiment… spéciale. Il suffisait déjà de voir le record de membres réguliers présents, sans compter les invités pour voir que cette session, bien avant même qu’elle ne commence, promettait d’être particulière ! Nous étions plus d’une vingtaine à avoir répondu présents. Et encore… Il y avait quelques absents de dernière minute.
Il convient, à ce niveau d’expliquer que nous avons coutume de nous retrouver chez les uns ou chez les autres. Il n’y a donc pas d’endroit fixe pour nos rencontres. Chacun apporte de quoi boire ou grignoter pour ne pas peser sur l’hôte/ l’hôtesse. C’est ainsi que cette soirée a eu lieu chez l’ami E.M qui a bien voulu nous accueillir dans sa résidence. Nous avons été traités comme des princes. Sa fameuse mousse au chocolat made in Suisse était de rigueur pour la joie de nos palais !
La maestria et la sensibilité de notre ami et collègue, pour la plupart d’entre nous, Eucher a fait le reste. Ce fut une soirée tout en sensibilité qui nous a immergé dans l’univers poétique de l’auteur. Un moment de communion avec l’écrivain, avec la culture togolaise et bien au-delà de celà avec l’Afrique dans sa globalité malgré sa disparité.
L’interaction était de rigueur puisque certains parmi nous ont été désignés séance tenante pour lire quelques poèmes de sa dernière publication « Quand le sourire enrobe la douleur ». Lecture faite sur fond musical de kora du virtuose malien Toumani Diabaté, de Salif Keita, de Peter Holland sans oublier, dès l’entame de la soirée un court extrait, interprété par Eucher, d’une chanson de la diva togolaise Bella Bellow (Blewueee). Ce fut une soirée aux racines profondément ancrées dans la culture africaine, puisque le Djembe était de rigueur avec tout le cérémonial solennel, qu’exige sa pratique.
Les moments d’échanges avec Eucher nous ont permis, à travers son œuvre, de mieux le connaître. Nous avons ainsi découvert un artiste ayant de multiples facettes puisqu’il s’est aussi essayé à la mise en scène, qu’il fait aussi de la décoration et prendrait également des cours de Kora ! La soirée fut tout sauf guindée, ponctuée de nombreux fous rires provoqués par les boutades des uns et des autres ou encore par des anecdotes narrées par la « star » de la session littéraire. Qui ne s’est pas esclaffé à sa lecture des « Des mains d’une masseuse » par exemple ? Ou encore à la narration des réactions choquées qu’il a reçues de proches à la découverte de poèmes jugés un tant soit peu osés selon leur sensibilité ? Il nous a par ailleurs pudiquement laissé entrevoir quelques pans de son intimité.
Nous nous souviendrons encore longtemps des réactions suscitées par le poème « La saint-louisienne » avec cette immersion dans la culture sénégalaise et les codes de timing d’utilisation des différents encens après la dégustation du fameux thiéboudienne, ce fameux riz au poissons sénégalais. Nous avons eu droit entre autres à un partage d’informations sur les bayas, ces perles utilisées dans le protocole de séduction dans de nombreuses régions du continent africain. Je vous fais grâce des commentaires. Il s’est avéré qu’il y avait pas mal de connaisseurs de la chose parmi nous !
Comme il l’a si bien souligné et dit, il est important de se laisser guider par son inspiration et de ne pas tenir compte de l’avis des autres lorsqu’on écrit ! Eucher nous a par ailleurs informés de la publication de son prochain recueil de poésie qui est prévue pour ce mois de décembre. Et l’année prochaine, de celle de son tout premier roman.
C’est durant la fameuse crise liée à la Covid 19 et le confinement mondial qu’elle a occasionné qu’il a « pris » la décision de rassembler et de publier ce qui était au départ juste un hobby qu’il partageait avec des amis. Comme quoi, de belles choses peuvent sortir de situations plutôt dramatiques. Et ce pour le plus grand bonheur des lecteurs que nous sommes.
Eucher a réussi en toute douceur avec la sensibilité qui est la sienne, à rendre la poésie sympathique à quelques-uns des nôtres qui n’étaient pas très fans de ce genre littéraire. Un exercice de vulgarisation de ce courant littéraire qui n’est pas des plus simples. Nous avons découvert un extraordinaire artiste dans l’âme cachant son talent derrière sa timidité et sa réserve, un professionnel qui tout en faisant la part des choses, a su aussi nourrir son inspiration de son expérience professionnelle d’activiste des droits de l’homme. Pour preuve, le titre du recueil dont il a été question ce soir. Nous avons écouté parler un africain qui croit en la dignité de l’Homme et en sa résilience, la vraie, qui ne subit pas, n’accepte pas la fatalité mais qui relève la tête et se bat pour construire un avenir meilleur pour les siens.
Nous avons été honorés de recevoir, durant cette même soirée, un autre auteur togolais, Moïse Olouwadara Inandjo, en mission professionnelle à Bangui et par ailleurs très bon ami d’Eucher. C’est d’ailleurs à lui qu’est revenu l’exercice de présenter de manière succincte l’auteur à l’honneur ce soir-là. Nous espérons qu’il nous fera le plaisir de nous parler de son œuvre lors de sa prochaine mission. Son évocation de son dernier roman Le retour de l’ex a arraché bien des sourires à l’assistance…
Quand le sourire enrobe la douleur d’Eucher Ekouevi Eklu-Koevanu s’est donc imposé dans la liste de nos livres de chevets et nous vous le recommandons. Et si jamais, par le plus grand des hasards vous aviez l’opportunité d’assister à une “conférence “ de l’auteur, n’hésitez pas !

Louis-Philippe BANGANZONI

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