Chronique du Village Guitilitimô

BABA-KITÊ 

Par GJK
L’Élève Certifié du Village Guitilitimö

Les yeux remplis de larmes, le doyen avait assisté impuissant au décollage du Boeing 747 d’Air France, qu’il avait vu fondre les nuages puis disparaître dans l’immensité céleste, emportant dans son sein, Agbâ-Mozâ. Le pharmacien et jeune entrepreneur dynamique, avait décidé de laisser tomber définitivement tous ses projets, notamment Zikobéla-Zivoundou, cet officine de référence dont la réputation n’était plus à faire, et que vingt (20) mois auparavant, il s’était éreinté à courir dans tous les sens, avant de réussir à l’ériger au bout du compte à Karambi la coquette balafrée et martyrisée, capitale totalement méconnaissable de RDK, République DémonCrassique de Karazo.

Et voilà que par une curieuse tragédie de son histoire personnelle, c’est en France son pays d’adoption – et non à Karazo sa terre natale -, que Agbâ-Mozâ venait se ressourcer. La main sur le cœur, il avait cependant promis à Baba-Kitê son « plus que frère », avant de prendre l’avion, que sauf décès, il reviendra coûte que coûte se réinstaller pour le restant de ses jours en République DémonCrassique de Karazo, pour poursuivre et mener sur le terrain son dernier combat, qui cette fois, sera éminemment politique. Agbâ-Mozâ malgré tout, restait profondément convaincu que la résistance au changement manifestée par les Karazoëns, n’était pas en soi une fatalité insurmontable et invincible. Á la seule condition bien sûr, que s’opère une rupture  en profondeur. Et si cette rupture, était réellement voulue et soutenue par des actions concrètes et des comportements visibles, vécue au quotidien depuis le sommet par les principaux acteurs politiques que sont les dirigeants de Karazo, l’ensemble du peuple Karazoën n’hésiterait certainement pas à y adhérer et à suivre volontairement et avec plaisir. L’exemple doit venir d’en haut.

Cela étant, Baba-Kitê le doyen, la soixantaine en vue, comptait, décomptait et recomptait inlassablement les cinq belles années de travail intensif qu’il pouvait encore offrir à son pays, avant de se décider à ranger ses gants de haut fonctionnaire de l’administration publique karazoënne. Ensuite, Il regagnerait tranquillement ses pénates, avec la conscience très apaisée de celui qui aura rempli tout son devoir patriotique. Á vrai dire, Baba-Kitê n’était pas de ceux qui pensent que la vie s’arrête au moment du départ à la retraite. Bien au contraire, il lui paraissait inadmissible et même « infanticide », de s’accrocher au service de l’état, pour y faire son temps, le temps de ses enfants, et même d’ajouter celui de ses petits-enfants sans aucune honte, au risque de voir ces derniers prendre leur retraite au même moment que « papy ou pépé ».

Baba-Kitê le doyen, s’il venait à être retraité, comptait se livrer aux activités captivantes de ses rêves, et si possible, consacrer une partie de son temps à aider les autres, à mettre éventuellement son expérience, son savoir et savoir-faire,  au profit des regroupements associatifs non lucratifs.

Mais depuis plusieurs mois qu’il est revenu au pays, Baba-Kitê le doyen, attendait toujours à la maison ou dans les couloirs des bureaux de la Direction générale de la fonction publique dépourvue de salle d’attente, la régularisation de sa situation administrative. Une situation qui n’allait jamais être régularisée.

En effet, Baba-Kitê, ancien haut cadre de l’administration karazoënne, de retour de son exil parisien, va sans tarder, se heurter durement à des comportements détestables qui lui rappelèrent – aussitôt et à plus d’un degré au-dessus -, les mauvais souvenirs des traitements inadmissibles auxquels il refusait naguère de se soumettre, et qui l’avaient obligé quinze années plus tôt, à partir de Karazo vers d’autres horizons. Et voici aujourd’hui, que refaisaient surface et regagnaient droit de cité, à nouveau, un népotisme et un clanisme clairement affichés, exacerbés autant qu’exaltés et assumés par les barons actuels de Karazo atteints d’un incurable complexe d’infériorité apparemment inné chez eux. Du coup,  le pays se retrouve sur le plan national, condamné à vivre dans une médiocrité indescriptible, tandis que sur le plan international, les dirigeants Karazoëns, ne cessent d’étaler leurs incompétences  et de livrer leur indigence à la face du monde entier. Ces spectacles désolants et ces exercices affligeants, ont fini par faire des Karazoëns du monde,  une véritable risée publique pour les  autres citoyens d’Afrique et d’ailleurs.

Quant à Baba-Kitê, la jalousie gratuite et surtout la haine que lui vouaient ses anciens collègues, ses anciens subordonnés et même ceux qu’il avait autrefois contribué à former, étaient devenue viscérale et impossible à contenir. Une guerre « asymétrique », inexplicable et inexpliquée, opposait désormais Baba-Kitê aux nouveaux maîtres de Karazo et leurs affidés qu’ils n’hésitent plus à pourvoir en argent et moyens divers,  aux fins seules d’accomplir de basses besognes t de s’attaquer à quiconque résiste à leurs manœuvres honteuses  et dénonce leur incurie lamentable.

Tout cela excédait Baba-Kitê, l’homme à plus d’un tour dans son sac, aux ressources multiples et à l’imagination fertile. Après une courte réflexion, il décida de recourir au plan « B » de sa stratégie de résistance face aux multiples agressions de « l’ennemi » riche mais sans idées..

Baba-Kitê, contrairement à son « frère » et ami Agbâ-Mozâ le pharmacien et jeune entrepreneur dynamique, commença d’abord par prendre une décision personnelle et courageuse:  quoiqu’il advienne il ne quittera plus jamais Karazo son pays natal. Et sa décision, il  le fit savoir en ces termes:

« Karazo, la terre de nos aïeux, reste le seul bien que nous ayons reçu en héritage commun. Ce pays nous appartient, à nous tous karazoëns. Chacun y a sa place et peut encore s’approprier autant de superficie qu’il voudra. Mais que ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui, n’oublient jamais qu’ils ont été précédés par bien d’autres. Demain est toujours un autre jour! Que chaque jour au coucher comme au réveil, chacun se pose des questions sur son sort futur. On ne récolte que ce que l’on a semé soi-même. Parole de Baba-Kitê qui ne craint rien, ne recule ni n’abandonne jamais ».

Baba-Kitê allait ensuite frapper les esprits en posant l’acte le moins attendu qui soit: un beau matin, il fit son baluchon et le posa sur sa tête, claqua la porte de la maison où il logeait, et d’un pas décisif, marcha cinq kilomètres à pieds tout au long des grandes avenues, pour regagner l’un des « ledgers des pauvres », ces tristes camps des réfugiés internes qui jonchent çà et là, de larges surfaces de Karambi la coquette balafrée et martyrisée, capitale totalement méconnaissable de RDK, République DémonCrassique de Karazo. Baba-Kitê s’y installa, avec la ferme résolution de partager les conditions de vie de ses compatriotes qui depuis des années, survivent ici dans la promiscuité et meurent dans l’indifférence.

Mais qui  était-ce donc cette personne qui en voulait tant à Baba-Kitê? Qui était à l’origine et à la manœuvre, qui tirait ainsi dans l’ombre les ficelles qui ont valu à Baba-Kitê  tant de déboires et sa non réintégration dans ses anciennes fonctions antérieures? Étêgui-Têngô alias Agâwa-Ipké ! Étêgui-Têngô l’incontournable maître du jeu, oreille et bras « assassin » de Kêtènguéré-Lonaélo-Langögba, le nouveau Président « démonCrassiquement venu » de la République de KarazoÉtêgui-Têngô l’ami insoupçonnable de Baba-Kitê le doyen !  Étêgui-Têngô venait  une fois de plus de frapper durement un « ancien frère ». ( Á suivre…)

Par GJK-Guy José KOSSA
L’Élève Certifié du Village Guitilitimô

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