Grand format de J.Gréla

REVUE DE PRESSE : POUR AIDER LA CENTRAFRIQUE, C’EST MAINTENANT

Les musulmans ne seraient-ils plus des centrafricains, fils du pays ?

Forces de sécurité, protection des populations, l’urgence des aides humanitaires, des locutions désormais le leitmotiv de tous les politiques et les organisations humanitaires intervenant en Centrafrique. La Minusca, une des plus grosses opérations de maintien de la paix de l’ONU, doit répondre à ces préoccupations lors de son déploiement tant militaire que civil. En attendant, les musulmans centrafricains sont, malheureusement encerclés, pris en étau, par les anti-balles AK sous les yeux impuissants de la Misca et Sangaris. Ces Centrafricains, dans un état de vie indescriptible et inhumaine, meurent par énervation autrement dit à petit feu dans plusieurs villes de Centrafrique l’insu de la presse et des caméras. La situation humanitaire partout se dégrade au point que l’homme est comparable à un animal dans cette jungle urbaine en déliquescence.

Nous n’avons pas à négocier avec les gens, nous avons à désarmer

Toutefois à Bria, les forces internationales jouent à l’apaisement en menant d’intenses négociations avec les groupes armés selekas, les maîtres de la ville, a-t-on entendu, lundi 14 avril sur les ondes de RFI. Des hauts responsables rebelles, de Sangaris et du gouvernement sont venus de Bangui pour faire baisser les tensions à la suite des manifestations d’hostilité organisées et des affrontements, jeudi 10 avril, qui ont fait au moins deux blessés au sein de la Misca.

Le général Yaya reproche aux troupes internationales de s’en être prises aux musulmans de Bangui, laissant le champ libre aux anti-balles AK. Par la même, il critique le colonel Ousta pour sa proximité avec Sangaris et la Misca. En effet les forces Seleka sont eux-mêmes divisés entre les partisans du compromis, menés par le commandant de la zone, le colonel Ousta, et d’autres dirigés par le général Yaya, auquel on reproche, notamment, d’avoir piloté les manifestations, hostiles, a constaté le correspondant de RFI. Une réunion entre les deux adversaires a permis d’apaiser un peu plus les esprits. Chacun, au domicile d’un sage, a exposé ses griefs et s’est voulu conciliant : « Nous sommes au contraire ensemble. Il n’y a pas de problème avec le colonel Ousta », a conclu le général Yaya. Néanmoins, par la voix de son porte-parole Amat Amadine, a précisé le correspondant ce dimanche 14 avril, le colonel Ousta lui a demandé de rentrer dans le rang : « Nous ne voulons pas remettre en cause le processus du DDR (désarmement démobilisation réinsertion, ndlr), que nous avons engagé avec le gouvernement. Nous sommes en train de lui dire de cesser avec cette façon de faire. Nous, nous allons lui accorder le pardon, mais qu’il ne recommence plus. ».

Toutefois les deux hommes sont d’accord pour le  désarmement, mais pas sans condition.  La réponse du général Tumenta, commandant militaire de la Misca, a qui on reprochait d’avoir fait paniquer la population à leur arrivée, est sans ambiguïté. « Nous n’avons pas à négocier avec les gens, nous avons à désarmer. Lorsque nous arrivons dans une ville avec une force musclée, c’est normal que la population puisse s’inquiéter, mais après, le calme est revenu et tout se passe bien. » Mais des Seleka lourdement armés tiennent toujours des positions. « La population vit dans la psychose. Certains rebelles promettent de s’en prendre à nous si Misca et Sangaris partent », confie un habitant à RFI.

On avance dans le bon sens 

Tous deux réclament un processus clair et sécurisé, afin que les hommes soient pris en charge, mais aussi protégés contre les anti-balles AK. Selon plusieurs sources, a souligné RFI, des éléments rebelles pourraient ensuite servir de guides en ville aux troupes internationales, pour les familiariser avec le terrain. « On va dans le bon sens », dit un des membres du comité des sages de la ville, car les selekas seraient prêts à rentrer dans le rang. « Le mouvement a accepté le principe d’un cantonnement et d’un désarmement », explique Gilbert Dalkia, du conseil des sages, ajoutant que le cantonnement est en cours près de la préfecture. Mais avant d’en arriver là, les Seleka exigent des garanties. « Les anti-balaka ne sont pas loin. Nous sommes sous leur menace. Donc on ne va pas désarmer pour rien »,  a relevé un officier rebelle.

L’urgence vitale: la sécurité
Et les musulmans centrafricains ?

L’ambassadrice américaine à l’ONU Samantha Power, de retour d’une visite à Bangui, a souligné jeudi à Matin.ma du Maroc, ce mardi 15 avril «l’urgence vitale de ramener la sécurité en RCA». «Le Rwanda en 1994 nous a enseigné le prix de l’inaction», a-t-elle ajouté en référence au génocide. Mais le calme semble loin d’être atteint. Dans contexte, les divers reportages des journaux déplorent la situation des musulmans tant à Boda, à Bossangoa qu’à Bangui.

Pour le Figaro.fr du jeudi 10 avril, le rêve de partir s’est transformé en chimère au PK12, sortie nord de la ville. Plusieurs tentatives de les faire partir ont échoué. Action contre la faim (ACF) fut l’une des premières ONG à plaider pour l’évacuation, a rapporté Tanguy Berthemet, le correspondant. «Il n’est pas question d’une évacuation de masse. Il faut agir au cas par cas, en écoutant le désir des gens», a suggéré Samatha Power, l’ambassadrice américaine aux Nations unies de passage à Bangui. « À organiser les convois, les Nations unies, comme la France, redoutaient de se voir accuser de jouer le jeu de l’exode, voire de la partition. C’est un véritable cas de conscience», explique un diplomate. Les ONG, elles aussi, ont tergiversé. Car le PK 12 n’est qu’un cas parmi d’autres. Des enclaves similaires existent dans tout l’ouest de la Centrafrique et regrouperaient 19.000 personnes, selon le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), un chiffre sans doute très sous-évalué.

Les raisons de ce retard tiennent pour beaucoup aux difficultés à trouver un point de chute à ces malheureux. «Ce n’est pas tout, de nous critiquer, de dire que l’on agit trop tard. On peut évacuer ces gens, encore faut-il que l’on nous dise vers où». Les choses sont d’autant plus complexes qu’au PK 12 la majorité des exilés sont des Peuls, une ethnie de bergers nomades stigmatisée par les autres communautés.

Pour Jeune Afrique, le PK12 de Bangui, « est l’Alcatraz de l’Afrique » où vivent des 2. 500 musulmans « prisonniers »  dans leur mosquée et quelques maisons noyées sous des trombes d’eau en ce début de saison des pluies. « C’est l’enfer de l’enfer », s’offusque l’un des réfugiés noyés au PK12, Ibrahim, « Ce matin l’un de nous a été tué par balle par les anti-balles AK, un autre blessé. Vers neuf heures », chuchote-t-il, en désignant un corps allongé sous un voile blanc. Au PK12, les peuls mbororos, éleveurs nomades de bétail font partie de ceux qui, avec leurs armes ancestrales, assurent la sécurité des lieux sur cette unique et dangereuse «  voie de sortie : vers la mort » ponctuellement contrôlée par des anti-balles AK.

Dans son 2ème reportage 08 avril 2014, Jeune Afrique décrit la vie de 14.000 musulmans peuls centrafricains de Boda, encerclés par les miliciens anti-balles AK, sans issue de sortie, sans ravitaillement, affamés, malades, qui ne savent pas quand, ni comment, ils pourront échapper au piège infernal. Les musulmans « doivent quitter ». Aller où ? Et pourtant, ils sont des centrafricains.

RFI, qui les qualifiera plus tard, des « naufragés du quartier PK-12 » a annoncé le 13 avril que la Misca se réorganise pour combler le vide laissé par le retrait des troupes tchadiennes dans les villes du Nord et Nord-Est dans lesquelles elles étaient postées, a confirmé, samedi 12 avril, par le chargé de communication de la Misca, Francis Ché. « Le contingent tchadien s’est désengagé de Bossangoa, Bouca, Batangafo, Kaga-Bandoro et Ndélé. Il est en train de regagner son pays », a confirmé Francis Ché, chargé de communication de la Misca. De nouveaux éléments de la Misca ont aussi rejoint ces villes après le départ des Tchadiens à l’exception de Kaga-Bandoro, et sans précisions pour Ndélé.

Tentative d’intimidation de la presse ou retour du bâton

Alors que les yeux de centrafricains sont en même temps tournés vers la communauté internationale et vers le futur, pendant qu’il pleurent leurs morts, tentent de s’essuyer les larmes pour poser un pas vers le pardon, pour poser un regard concilié sur son voisin, les journaux Le Démocrate et Palmarès sont suspendus de parution respectivement pour une et deux semaines, a indiqué le RJDH dans son journal en ligne du 14 avril par l’Observatoire des Médias Centrafricains (OMCA). Au premier, l’Observatoire dénonce la publication d’un article « contenant des propos injurieux, orduriers et portant atteinte à la vie privée de la chef de l’Etat, à sa dignité de femme et son honneur, en n’ayant aucun respect à l’endroit de l’institution qu’elle représente ». Régis Zoumiri, Directeur du journal Palmarès a été entendu au tribunal de Bangui par le 1er substitut du procureur Narcisse Foukpio. Puis à la gendarmerie territoriale où Patrick Stéphane Akibata, du journal Le Peuple a été transféré, ce mardi 15 avril et entendu, il lui a été signifié les motifs suivants : « Diffamation, injures publiques, outrage au chef de l’Etat, délit de presse, ce sont les motifs qu’on m’a indiqués » a-t-il résumé sa sortie l’après midi. Le procureur de la République Gislain Grézenguet n’a pas souhaité faire de commentaires sur cette affaire, mais il a précisé « l’heure a sonné, la répression va s’abattre sur vous (les journalistes) » selon le RJDH.

C’est maintenant qu’il faut aider Centrafrique. Pas demain, aujourd’hui

Dans ce contexte, L’Union africaine (UA) a réitéré, vendredi, sa détermination à ne ménager aucun effort pour faciliter la stabilisation de la situation en Centrafrique, saluant le travail de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous conduite africaine (MISCA) et les «progrès significatifs» accomplis dans la mise en œuvre de son mandat. L’UA a, également, rendu hommage aux pays contributeurs de troupes et de personnels de police pour leur engagement en faveur de la paix, la sécurité et la stabilité en RCA, à rappelé ce vendredi 11 avril le journal Matin.ma du Maroc et Afriquinfos.

A New York, ce mardi 15 avril 2014, M. Ban Ki-moon, qui ne se lasse pas d’attirer l’attention des bailleurs sur la Centrafrique, a une nouvelle fois exhorté la communauté internationale à aider le plus tôt possible la centrafrique à surmonter la très grave crise à laquelle elle est confrontée, mentionné l’agence de presse Xinhua à  Afriquinfos. « J’ai visité ce pays alors que je me rendais au Rwanda pour le 20ème anniversaire du génocide. Avant de partir, j’ai dit aux dirigeants de la Centrafrique qu’ils devaient retenir les leçons de cette tragédie historique et ne pas répéter ses erreurs », a-t-il déclaré, dans un point de vue publié dimanche dans le journal américain The Washington Post.

Il n’a pas manqué de signalé que des communautés qui ont connu de très grands traumatismes peuvent apprendre à vivre de nouveau ensemble dans une relative harmonie. Il a appuyé sa déclaration en encourageant les dirigeants et le peuple centrafricains à  « raviver » l’esprit de vivre ensemble. La communauté internationale a l’opportunité d’apporter son aide et une obligation d’agir. « Pas demain, aujourd’hui » a-t-il ajouté.

Il a rassuré le centrafricain que le déploiement des casques bleus est « une décision bienvenue, […] très anticipée par ceux que j’ai rencontrés dans le pays ». Mais la mission ne sera pleinement déployée qu’en septembre, et le temps n’est pas du côté des gens vulnérables », a-t-il asséné, content des renforts européens en troupes arrivés à Bangui.

Enfin, selon l’agence de presse Xinhua à Afriquinfos, M. Ban a déclaré que « le gouvernement de transition a immédiatement besoin d’aide pour gouverner, notamment une aide pour permettre que policiers, juges et gardiens de prison retournent à leurs postes de travail. […] En même temps, le pays a besoin d’un processus politique inclusif pour trouver le chemin vers la paix» et qu’ « il faut lutter contre l’impunité ».

Joseph GRÉLA

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