Grand format de J.Gréla

CENTRAFRIQUE: NÉGATION DE L’EXISTENCE DE L’HUMANITÉ

Sanctuaire ou refuge des exactions cruelles

L’absence d’obligation de rendre des comptes des infractions, des actes délibérés violents perpétrés sur un individu, la faible structure de commandement corrompu sont quelques-unes des raisons qui ont conduit le pays dans le désastre actuel.  Les personnes responsables et incriminées ne sont presque jamais traduites en justice. Par ailleurs, Centrafrique, qui a hérité, à l’indépendance, de quelques prisons surannées laissées par le colonisateur, n’a jamais trouvé la voie de la politique pénitentiaire, n’a jamais élevé de nouvelles maisons d’arrêt, malgré la croissance des actes normalement punis par la loi. Centrafrique est alors devenue une terre poreuse d’impunité où toutes les rebellions s’y plaisent et nidifient.

 Les lycéennes nigérianes enlevées par Boko Haram

Dans ce contexte, d’après un notable local, qui s’appuie sur plusieurs témoignages d’habitants, une cinquantaine de jeunes femmes anglophones sont arrivées mercredi 30 avril à bord d’un camion à Birao, dans l’extrême-nord de Centrafrique, selon le journal Jeune Afrique de ce vendredi 09 mai 2014. « Elles étaient encadrées par des hommes lourdement armés qui parlaient aussi anglais et des membres de la rébellion de la Séléka », selon une source, proche des anti-balles AK qui a vu le convoi, composé de deux camions et d’un pick-up. Ce convoi, aperçu à Tiroungoulou, environ 170 km au sud-ouest de Birao, serait venu de peut-être du Tchad. « À leur arrivée, certaines étaient apeurées, pleuraient et étaient violemment réprimandées en anglais », a précisé la source de Benjamin Roger du Jeune Afrique. Les adolescentes et leurs gardiens auraient ensuite logé plusieurs jours dans une maison de Birao dont les habitants ne pouvaient approcher. Le groupe aurait quitté les lieux dans la nuit du dimanche 4 au lundi 5 mai sans laisser de traces, selon le journaliste qui a indiqué que l’information reste à confirmer.

Abubakar Shekau, chef de l’organisation terroriste Boko Haram, a revendiqué dans une vidéo la responsabilité de l’enlèvement dans leur établissement de Chibok au nord-est du Nigeria et a affirmé que les jeunes filles seraient vendues et réduites en esclavage. Birao est-elle la nouvelle route vers l’Afrique de l’est ou pullulent de groupes terroristes et islamistes ? Les séléka dans cette région seraient-ils de nouveaux complices ?

Nous avons peur, et nous sommes très inquiets

Dans le sillage du regroupement des sélékas à Ndélé pour une nouvelle stratégie contre la Centrafrique, Kaga-Bandoro, selon la presse a connu de violents affrontements entres les groupes armés, mardi 06 mai. « L’église catholique accueille désormais près de 13.000 personnes » suite à ces « affrontements qui ont donné lieu à des actes de pillages de part et d’autre, et à de nombreuses maisons incendiées par les deux camps », a déploré un officier de la Misca relayé par Press Afrik, hier et Afriquinfos, ce vendredi 09 mai. « Tout est parti d’une attaque des anti-balles AK contre les Séléka, à la suite d’une tentative de vol », a affirmé à l’AFP un officier de la Misca, sous couvert d’anonymat. On dénombre treize personnes tuées, et plusieurs autres blessées. Mais « les Séléka, a confié à l’Afriquinfos avec l’AFP, Suzanne Boymandja, une habitante réfugiée dans l’église, ne cessent de venir à la paroisse pour exiger que les anti-balles AK qui y ont trouvé refuge sortent. Autrement, ils vont entrer les chercher ou bien tirer sur tout le monde. Nous avons peur, et nous sommes très inquiets ». Malheureusement, « l’effectif des éléments de la force africaine à Kaga-Bandoro ne permet pas une interposition, mais nous essayons de faire le maximum pour éviter le pire à la population », a assuré l’officier de la Misca.

Centrafrique est malade de sa division et du manque de nationalisme
Je n’avais pas conscience que ça serait aussi difficile

Pendant ce temps, la présidente de transition a accordée a des interviewes à la presse internationale dont la Voix de l’Amérique et  Le Monde en ligne ce vendredi 09 mai, pour faire le bilan des cent jours. Son bilan, dit-elle, est mitigé. « L’insécuritéperdure parce que, a-t-elle affirmé à Cyril Bensimon du Monde,le désarmement n’a pas été correctement fait ». Par ailleurs, selon la présidente, « il était difficile pour les forces internationales, dans ce contexte de violences, d’effectuer un désarmement intensif ». Elle a pensé que des groupes armés essaient de se positionner pour pouvoir faire pression demain en vue de négocier. D’autres forces qui apparaissent dans le nord du pays et contribuent à cette insécurité et manifestent leur volonté de partition du pays contre laquelle elle s’oppose à l’instar de tous les Centrafricains.

En ce qui concerne les anti-balles AKA, la Présidente de transition a répondu à Nicolas Pinault  de la Voix de l’Amérique qu’« il a fallu prendre des actions contre eux » parce qu’ « ils ont commis des actes décriés ». Catherine Samba-Panza  a reconnu que septembre est très loin. Elle souhaiterait que l’agenda des Nations-Unies en matière du déploiement de la Minusca soit avancé. « La période de soudure, entre mai et septembre, est une période de tous les dangers. Les groupes armes vont essayer d’occuper le terrain » a-t-elle concédé.

Malheureusement, suite au débat mené par une sous-commission du Congrès américain sur la crise centrafricaine, Robert Jackson, sous-secrétaire d’Etat adjoint aux affaires africaines, relayé par la Voix de l’Amérique du mercredi, 07 mai  2014 a relevé que le déploiement de la MINUSCA est bien prévu à la mi-septembre, maistrouver les effectifs requis pose encore problème. Le Sénégal, par la voix de l’opposition politique, demande à son gouvernement de ne pas engager ses troupes dans la Minusca.

Quant aux musulmans, ils sont des centrafricains et « ils sont chez eux. Ils ont connu des moments difficiles », mais « progressivement, nous essayons d’améliorer notre vivre ensemble », a-t-elle martelé.

Des crimes graves et des atrocités sans pareilles le territoire centrafricain

Pendant que les violences se poursuivent dans le pays, pendant que la Présidente présente son bilan des cent jours, la Cour pénale internationale (CPI) est à la recherche de ses premiers coupables de crimes contre l’humanité en Centrafrique. Elle y a dépêché jeudi 08 mai sa première mission. L’objectif défini consiste à poursuivre l’enquête préliminaire ouverte en février 2014 sur les crimes commis notamment par les Séléka et par les miliciens anti-balles AK. Les responsables de nombreuses exactions sur les populations civiles musulmanes sont également concernées, a rapporté Jeune Afrique vendredi 09 mai.« Des crimes graves ont été commis depuis 2012 en Centrafrique », a déclaré Amadi Bah, le chef de section de la Coopération internationale de la CPI, lors d’une conférence de presse jeudi à Bangui selon La Presse.ca avec l’AFP.

Œil d’Afrique en ligne de ce vendredi 09 mai 2014, remarqué la CPI n’a jamais tari d’enquêtes sur la Centrafrique. Des enquêtes ont été ouvertes depuis 2003 après le coup d’état de François Bozizé contre le régime d’Ange Félix Patassé par rapport aux crimes commis sur son territoire par les combattants du Mouvement de libération du Congo (MLC). Elles se poursuivent à la Haye. Autrement dit, « elles sont toujours en cours et n’ont jamais livré de résultats, plus de dix ans après » malgré l’arrestation de son chef, l’ex-vice-président congolais Jean-Pierre Bemba précise La Nouvelle Tribune  avec Olivier Ribouis dans sa rubrique ‘Monde Afrique’ ce vendredi 9 mai 2014.

La Centrafrique pour moi, c’est fini

« C’est la première fois de ma vie que je vois un tel déchaînement de violences. Beaucoup de personnes ont été tuées par les anti-Balles AK dans mon village », a lâché sur un air d’amertume Adama Yerima, ce vieil homme de 77 ans, après trois mois de marche à pied dans la brousse.

Afriquinfos, ce vendredi 09 mai, dans son reportage, raconte les mésaventures d’Adama Yerima pour fuir les violences de son pays. Désormais sous la protection du HCR à Garoua-Boulaï, à l’Est du Cameroun, à la frontière avec la Centrafrique, ce miraculé des exactions des milices anti-Balles AK tente de reprendre ses forces, après cette incroyable chevauchée de trois mois. « Je suis ici depuis quatre jours, avec ma femme (40 ans) et notre fils de 24 ans. Les autres membres de la famille sont dispersés, nous n’avons pas de nouvelles d’eux », a-t-il dit en sango, la langue nationale centrafricaine». Couché sur une natte à l’ombre d’un manguier au centre de transit des réfugiés centrafricains et d’autres nationalités, il continue de porter les mêmes vêtements depuis quatre mois, souligne le journal.

Accueilli dans un état de fatigue générale, il affirme avoir, malgré tout, une meilleure santé relate les péripéties de son qu’il a été « victime d’un tir d’arme, à la cuisse droite lors d’une attaque, il y a quatre mois de ces inconditionnels de l’ex-président centrafricain François Bozizé contre la localité de Baoro, son village natal, il avait été transporté vidé de son sang et dans un état d’inconscience à l’hôpital public de cette bourgade de la sous-préfecture de Nana Mambéré (Nord-Ouest) où il avait été soigné » a transcrit l’agence de presse Xinhua pour Afriquinfos. Cinq personnes avaient été tuées au cours de cette attaque, dont un de ses fils, un frère cadet et trois autres habitants de Baoro.

De Baoro à Bouar puis Kentzou et Gbiti dans l’Est du Cameroun avant de se signaler, son trajet est fait de cueillette et parfois de viande de bœufs offerte par des bergers musulmans comme lui. Il arrive à Garoua-Boulaï, au terme, cette fois-ci, de son voyage en camion, grâce à une aide de personnes de bonne volonté de Gbiti.

C’est alors qu’il va tenter de retrouver d’autres membres de sa famille qui y étaient annoncés.

Il en est de même pour Asta Baïro, 80 ans, arrivée depuis une semaine dans cette ville frontalière Garoua-Boulaï, qui affirme avoir été contrainte, elle aussi, à l’exil après avoir quitté son village de résidence de Yaloké à cause des anti-Balles AK. Il lui a également fallu un parcours de deux semaines de marche à pied en brousse, sans nourriture. « Les vêtements que je porte m’ont été offerts par des habitants de Garoua-Boulaï », a-t-elle confié à Afriquinfos avec Xinhua, celle qui s’efforce tout de même de garder la tête haute, le visage illuminé de sourire. Les anti-Balles AK ont tué trois de ses 10 enfants.

Quant à Idrissa Oumarou, 45 ans, emporté par la colère, maudit les responsables des violences qui déchirent son pays. « Les anti-Balakas, ce n’est pas bon. La Centrafrique, ça va, je reste ici au Cameroun ».

Combien de personnes dans les cas de ce vieil homme ont souffert et souffrent encore dans la brousse ou dans la forêt à la recherche des leurs dans cette crise innommable ?

80.000 réfugiés centrafricains au Cameroun
60% de ces réfugiés sont des femmes et des enfants
Situation intenable

Enfin depuis la grande offensive des anti-Balakas le 5 décembre 2013 à Bangui, quelque 81078 Centrafricains ont franchi le territoire camerounais, dont 79107 enregistrés par le HCR dans cinq régions : 57305 dans l’Est, 14243 dans l’Adamaoua, 2751 dans le Nord, 1932 dans le Centre et 2876 dans le Littoral, selon un recensement du 02 mai 2014 communiqué à Xinhua. Les trois quarts de ces réfugiés se concentrent dans l’Est. A Garoua-Boulaï, la situation est « dans la phase critique », selon Ghislaine Télémaque, coordonnatrice médicale des activités de MSF dans la ville. Face aux besoins importants en lait et autres aliments thérapeutiques, « on essaie de faire le maximum », a-t-elle assuré à Xinhua. « Depuis trois mois, nous faisons face à un surcroît de malades. C’est le même épisode à chaque fois qu’il y a des problèmes en Centrafrique. Mais cette fois, ça a été très fort », a témoigné à son tour le Dr. Solofo Rakotoarivelo, directeur d´hôpital. L’on recense 15% de cas de malnutrition, notamment en ce qui concerne les enfants, et 17% d’infections respiratoires. Puis un fort taux de paludisme, ajoute Télémaque.

« Pour les réfugiés, il n’y a pas suffisamment de médicaments et de nourriture, les conditions sont très difficiles » a déploré, pour sa part, Kristalina Georgieva commissaire européenne chargée de la coopération internationale, de l’aide humanitaire et de la réaction aux crises.

Je n’ai plus de racines là-bas (en Centrafrique).

Joseph GRÉLA

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