Grand format de J.Gréla

LA REVUE DE PRESSE : DILEMME OU NŒUD GORDIEN – L’ONU DOIT TRANCHER

Le conflit centrafricain devient pour la communauté internationale inextricable. Les forces internationales, hostiles au transfert de la population musulmane ont finalement cédé aux agences humanitaires qui tentent ainsi de soigner leur bonne conscience. Les délocalisations de la population musulmane dans le centre et le nord du pays ont commencé et ne s’arrêteront plus. Les selekas voient ainsi leur nombre augmenté pour organiser une éventuelle riposte, pour exécrer leurs pressions sur l’Onu, sachant que la demande de la partition du pays est présente sur le bureau de Ban. Le débile du Tchad savourerait ces délocalisations pour accentuer la déstabilisation de Centrafrique.

Les élucubrations de Déby

Le correspondant particulier du journal Tchad Actuel, Am Djeress, a conclu son analyse « Deby, la revanche en RCA », du 02 avril, par la phrase suivante : « Les malheurs du peuple centrafricain sont loin d’être terminés ». En effet, le président tchadien, Deby, a séjourné la semaine dernière dans le sud-est de son pays (nord de Centrafrique) dans le plus grand secret  pour deux raisons , précise le journal ce 25 avril 2014: interroger personnellement les prisonniers faits par les forces gouvernementales lors de la bataille d’Am-Doukhoun et dont on ne sait toujours pas ce que sont devenus les prisonniers, d’une part, et réorganiser, armer et positionner les seleka en vue d’une grande offensive, « régler le compte aux antis Balles AK et aux Bantous et laver son honneur et le sang des tchadiens versés gratuitement sur le sol centrafricain », d’autre part.

La propagation de l’insécurité

Dans ce contexte, la communauté internationale craint la propagation de la crise centrafricaine aux voisins et surtout au Tchad selon RFI ce 23 avril. Des hommes armés porteurs d’arcs, de flèches, de sagaies ont envahi les champs et menacé les paysans qui ont assisté impuissants au saccage de leurs champs. « Des milliers de têtes de bœufs sont arrivées chez nous avec la crise centrafricaine », a expliqué Marcel Rogoto, le vice-président d’un groupement agricole basé dans la ville de Goré, près de la frontière. « Le bétail est partout et il détruit les cultures. Quand les paysans essaient de réagir, ils font face à des bouviers qui possèdent des armes à feu » qui ont traversé la frontière centrafricaine avec le Tchad, sur des chevaux, a-t-il précisé à RFI. Le sous-préfet de Békan et un chef de canton ont été retenus captifs pendant plusieurs heures et menacés par des éleveurs peuls mécontents de la mort de l’un des leurs, a rapporté la radio RFI. En vue d’organiser une manifestation, la colère des populations s’est cristallisée sur l’assassinat de quatre jeunes hommes, tués alors qu’ils récoltaient de la paille.

Heurts à Bangui

Alors que des discussions âpres et animées à propos du transfert de la population musulmane vers le nord et le centre s’invitent les organisations humanitaires et les forces internationales à la table du gouvernement, le chef d’Al-Qaïda Ayman al-Zawahiri, interrogé  par La presse.ca du Canada, ce 25 avril 2014, sur l’intervention militaire française en Centrafrique, a déclaré que « la raison» de cette mission « tient peut-être du fait que les États-Unis sont épuisés après leurs défaites en Irak et en Afghanistan et que les activités de ces jihadistes se situent dans des zones de pouvoir de la France». Alors, il a appelé les musulmans centrafricains à s’unir «pour résister à cette agression montée contre eux par la France» et ses alliés, a souligné l’AFP à Dubaï avec La Presse.ca du Canada. Toutefois, le figaro.fr dans son édition en ligne avec l’AFP du 24 avril ont rapporté la mort de 5 hommes armés tués par les soldats de sangaris. Le Parisen, quant lui signale des « heurts violents entre des soldats français et des hommes armés à Bangui », ce 25 avril. Pour leur part, avec l’AFP, La Presse. Ca et Jeune Afrique ont dénombré dans leur titre, « 7 morts dans un accrochage entre soldats français et hommes armés. »

«Des soldats français qui inspectaient une maison suspectée d’abriter des armes au quartier camerounais (du PK5) ont été pris à partie par des jeunes manifestant leur colère», avait relaté le porte-parole de la communauté musulmane du PK5, Abakar Moustapha. «Cette manifestation a dégénéré en échange de tirs entre les Français et certains jeunes armés», avait assuré le témoin Moustapha.

La Minusca a pu déterminer la chronologie précise de l’accrochage. Elle confirme que Sangaris a «violemment riposté» durant des échanges de tirs de «toutes sortes de calibres» avec «des éléments armés non identifiés» et qu’un «soutien aérien» avait été mobilisé. L’accrochage avait fait «cinq morts et plusieurs blessés» parmi les habitants du quartier. Un porte-parole de la Croix-Rouge centrafricaine a indiqué que trois blessés par balle avaient été admis à l’hôpital communautaire du PK5 dans la nuit de jeudi à vendredi, ont commenté les journaux. Trois maisons de la zone ont par ailleurs été «presque complètement endommagées», a fait savoir l’ONU, pour qui la communauté musulmane du 5ème arrondissement de Bangui, où l’incident s’est produit, est «très remontée contre les Français» suite à cette riposte «très musclée». L’armée française n’a pu être jointe pour commenter le rapport onusien.

Le dilemme : impératif humanitaire et risque de scission du pays

Dans ce tumulte quotidien, le gouvernement centrafricain, fait face et s’oppose à la délocalisation de 1300 autres habitants du PK-12 devant suivre la direction de la frontière avec le Tchad. Des questions fusent dans ce nœud gordien que doit trancher l’Onu et les organisations humanitaires. « Faut-il les déplacer au risque d’accroître la division du pays ? Les laisser où ils sont, sous la menace des sanglantes milices anti-balaka ? Le sort de milliers de musulmans est au coeur d’un dilemme politico-humanitaire en Centrafrique », s’interrogent les journaux.

De son côté, ont relevé Jeune Afrique et l’Afriquinfos, le vendredi 25 avril, que la ministre de la Réconciliation, Antoinette Montaigne, a convoqué le Haut commissariat aux réfugiés de l’ONU (HCR) et l’Organisation internationale des migrations (OIM) pour leur exprimer son mécontentement. « Je me suis invitée dans le débat car on ne s’était pas soucié des enjeux vitaux de réconciliation », justifie-t-elle, « ces déplacements pouvant créer des déséquilibres culturels et sociologiques ».

Le sud de la Centrafrique s’est presque vidé de ses populations musulmanes qui ont gagné le Nord, ou les pays voisins, où ils étaient déjà fortement représentés. Alors, l’organisation d’un nouveau convoi humanitaire, escorté par des soldats français ou africains, pour déplacer plus de musulmans au Nord renforcerait encore cette division, au détriment de l’hypothétique réconciliation nationale prônée par le gouvernement. « Tous les Centrafricains ont le droit de demander que les pays amis n’aillent pas dans le sens d’une séparation de fait de ce pays », a protesté la ministre.

Centrafrique sous tutelle de l’Onu
 Indépendance perdue, marche vers la scission

Conséquence, selon Jeune Afrique, ce 25 avril 2014, les contours d’une partition du pays de facto – un projet des Séléka les plus extrémistes – se dessinent progressivement, si on se réfère aux lignes précédentes. 

Selon les RJDH-RCA ce 26 avril le gouvernement centrafricain a suspendu de la relocalisation des déplacés musulmans dans le centre et le nord du pays. Ce transfert ne favorise pas la cohésion nationale, entreprise par les autorités de transition, a indiqué aux RJDH-RCA madame Margueritte Samba Maliavo, ministre de la Santé publique, des affaires sociales de la promotion du Genre, et des Actions Humanitaires. Le gouvernement n’avait pas été informé de la date du départ des musulmans de PK12 vers le centre et le nord du pays. « Nous avons envisagé une mission conjointe sur Bambari pour pouvoir visiter les sites qui devront abriter les personnes […] Une planification a été faite sans l’implication du gouvernement », a déclaré Margueritte Samba Maliavo. Les humanitaires ont anticipé et n’ont pas respecté le calendrier de relocalisation. « C’est à ce niveau que le gouvernement n’a pas partagé l’approche » a justifié la ministre.

Au sujet de cette relocalisation, les agences des Nations Unies en charge du dossier, avaient fait savoir que le gouvernement a été associé à toutes les étapes de préparation et qu’il n’est pas dans leur intention de favoriser la partition du pays. Elles ont justifié l’opération par le souci de mettre en sécurité les personnes relocalisées.

Néanmoins, dix-huit semi-remorques, chargés de biens, sur lesquels étaient assis les déplacés, ont quitté la capitale en milieu de journée, sous protection d’un lourd dispositif militaire de la force d’interposition africaine en Centrafrique. Les déplacés, selon les organisations humaitaires, rapporté par la Libération ce 27 avril, iront vivre à proximité de la frontière tchadienne. « Cette relocalisation ne sera pas forcément de longue durée », a assuré Emmanuelle Schneider une porte-parole d’Ocha, le bureau onusien en charge de l’urgence humanitaire. Elle a insisté que dans le cadre d’un impératif humanitaire deux options s’offrent pour les musulmans du PK-12 à Bangui : les « laisser mourir » ou « les relocaliser […] On espère pouvoir créer un jour les conditions propices à leur retour », a rélévé l’Afriquinfos, Le Monde avec l’AFP, ce vendredi 25 avril.

Prochaine étape, le transfert des 10 000 musulmans de Boda, selon AFP.

« Dans cette affaire, les agences humanitaires ont soigné leur bonne conscience, sans voir que l’enjeu central de ce pays est de ne pas céder aux forces qui veulent tout détruire », observe un diplomate à Bangui. « Dans deux ou trois ans, on va se retrouver avec le nord du pays contrôlé par les Séléka. Le pouvoir civil aura alors des difficultés », observe, sous couvert d’anonymat, un cadre du gouvernement, selon qui des populations chrétiennes, tout autant « à risque», sont délaissées.

Les humanitaires ont soigné leur bonne conscience. La Centrafrique, elle, est en marche inexorable vers la scission…

Joseph GRÉLA

Commentaires

0 commentaires

@Lesplumes

www.facebook.com/lesplumesderca - www.twitter.com/lesplumesderca

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Bouton retour en haut de la page