Tribune de A.Pakoua

OU SONT PASSES LES GÉNÉRAUX DE L’ARMEE CENTRAFRICAINE ?

Il y a des sujets qui fâchent et d’autres qui font fâcher. En posant la question de savoir où sont passés les généraux de l’armée centrafricaine qui se comptaient à une époque très récente, en dizaines pour ne pas dire en vingtaines, trentaines et autres unités qui pourraient venir en mémoire, nous sommes sûrs que ces derniers se réveilleront certainement de leur torpeur pour nous tenir rigueur d’avoir évoqué un sujet aussi brûlant, qui permettra au peuple de se rendre à l’évidence et penser effectivement qu’à l’époque, les rues de BANGUI étaient sillonnées par des 4X4 frappés de trois ou quatre étoiles, marque de fabrique des éminences militaires de ce pays, aujourd’hui livré aux mains des bandes armées hétéroclites venues de tous les horizons.

Les étoiles de cette horde de généraux brillaient partout dans les quartiers de Bangui, à un point tel qu’on avait l’impression que l’armée centrafricaine n’était constituée que d’officiers supérieurs, la garantie d’un pays sécurisé à outrance. Malheureusement, ces étoiles accrochées fermement aux képis et frappées sur les 4X4 ne reflétaient en rien la reconnaissance du mérite des exploits militaires. Elles découlaient pour la plupart de l’alliance de parcours ou de parenté avec le porteur de couronne du pays, cela au mépris de la valeur réelle et de la fonction à assumer avec une telle élévation.

De là à comprendre qu’avec à peine cinq mille hommes de troupe, on ne peut avoir un aussi grand nombre d’officiers supérieurs, il n’y a qu’un pas à faire, pour ensuite comprendre pourquoi la présidence des conseils d’administration de certaines sociétés, la direction générale de certains services ou le pilotage de certains départements ministériels devaient être chapeautés par des hommes bardés d’étoiles, qui ont fini par tourner le dos aux casernes, avec leurs corvées non rémunératrices et qui ne permettaient nullement de se faire le bidon qu’on exhiberait partout, en signe de réussite sociale.

Et comme dans ce pays on ne vit que de politique, les généraux ont trahi leur corps, pour passer l’alliance au doigt de la fiancée politique, plus doucereuse, plus mielleuse et plus attendrissante, et le budget militaire, dont il ne convient même pas de parler, s’est volatilisé et s’est fondu dans la paie des services administratifs. Ayant trahi leur corps et les casernes censées les contenir, casernes qu’ils ont d’ailleurs désertées depuis au profit de villas cossues, ils n’ont pas trouvé mieux, que de confirmer leur désertion en applaudissant à l’ouragan de la SELEKA, qui les a aidés à mieux prendre la poudre d’escampette, pour purement et simplement disparaître dans la nature, aux quatre coins du monde.

Et pendant ce temps, le terrain est laissé libre, aussi libre que les résidus de la SELEKA et les ANTIBALAKA, conscients du fait que la nature a horreur du vide, s’en sont emparés, pour continuer les uns, à défendre une cause perdue, les autres à tenter de se venger des crimes commis par le camp adverse.

Au vu du malheur du peuple centrafricain, nous avons beaucoup de mal à imaginer dans quel état d’âme se trouvent nos « anciens officiers supérieurs ». Nous avons beaucoup de mal à croire que de là où ils se trouvent, ils voient les mêmes images que nous voyons. Ces images d’un peuple perdu, d’une génération sacrifiée, en larmes dans les rues de BANGUI, pour crier à qui voudrait l’entendre, sa peine, sa douleur, son malheur, à cause de la barbarie d’une horde de gens sans âme et sans conscience, qui ont décidé d’aller jusque dans les lieux de culte décimer de pauvres innocents sans défense, et sortir de ces lieux sans être inquiétés par la moindre force de maintien d’ordre ou de sécurité.

Où sont passés ces hommes qui hier se prenaient pour des demi-dieux, des hommes intouchables puisque hyper-gradés, gardés  et armés jusques aux dents ? Où sont-ils passés pour ne pas voir le calvaire du peuple ? Ce calvaire dont les rivières de sang inondent les pages des réseaux sociaux et des écrans de télévision ? Où sont-ils pour ne pas voir ce que tout le monde voit ?

Le CENTRAFRIQUE est déjà passé presque champion d’Afrique des coups d’État et nous n’encourageons pas une telle pratique en demandant où sont passés les généraux. Notre interrogation n’a comme objet que de savoir si dans ce pays il y a encore des militaires, des hommes capables de se lever, de parler et d’agir pour la défense du peuple et du territoire. Et si ces hommes existent, il est de leur devoir de s’exprimer, d’autant plus que la classe politique dans son ensemble, chacun étant préoccupé par ses calculs personnels, est incapable de s’organiser dans une action commune concertée, pour trouver la solution à l’insécurité généralisée qui gangrène la vie des centrafricains, et mettre un terme aux calculs néfastes des uns et des autres.

Adolphe PAKOUA

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