EN VEDETTE

LE CHARME D’UNE APRÈS-MIDI DE LECTURE AVEC MOHAMED MBOUGAR SARR- PRIX GONCOURT 2021

Du mercredi 29 mai 2024 au mercredi 5 juin 2024, se déroule à Paris le « FESTIVAL QUARTIER DU LIVRE ». Encore une belle occasion de célébrer le livre et la lecture. Au menu, 200 aventures littéraires et culturelles, collectives et solidaires. En somme, débats, théâtre, spectacles immersifs, concerts, signatures et balades littéraires, sont gracieusement offerts par des libraires, maisons d’édition, bibliothèques et écrivains qui participent à cet événement.
Ce Vendredi 31 mai 2024 de 16 heures à 18 heures, dans l’enceinte de la mythique LIBRAIRIE PRÉSENCE AFRICAINE – sise au 25 bis rue des écoles (Paris 5) -, j’ai eu le précieux privilège de prendre part à un rallye lecture ou séance de lecture à haute voix et en public, aux côtés du jeune prodige sénégalais MOHAMED MBOUGAR SARR qu’on ne présente plus.
Mais à titre de rappel – pour ceux qui ne l’auraient pas encore connu ou ne se rappelleraient plus de son nom -, MOHAMED MBOUGAR SARR est né au Sénégal en 1990. Écrivain de génie, il est l’ auteur de trois premiers romans, tous récompensés par différents prix littéraires : 2015 « Terre ceinte », 2017 « Silence du Chœur », 2018 « De purs hommes ». En 2021, soit un siècle après René Maran qui fut le premier homme noir à obtenir en 1921, le prestigieux Prix Goncourt pour son roman BATOUALA, MOHAMED MBOUGAR SARR a été couronné- ô quelle merveilleuse surprise – , grâce à « LA PLUS SECRÈTE MÉMOIRE DES HOMMES », son 4ème livre unanimement salué par la critique : roman lumineux, passionnant, captivant, initiatique…
Pour le FESTIVAL QUARTIER DU LIVRE de cette année 2024, le thème choisi a trait au rêve que nourrit souvent chaque individu : celui de partir « À L’AVENTURE ». C’est donc à juste titre que les extraits qui ont été proposés au public au cours de la séance de lecture à haute voix de ce vendredi 31 mai, ont été tous tirés de SILENCE DU CHŒUR, le roman de l’immigration africaine. En effet, MOHAMED MBOUGAR SARR y dépeint, le parcours émouvant et parfois dramatique des migrants qui au péril de leur vie, décident de quitter leurs pays d’origine, pour ensuite traverser des terres qui leur sont souvent inconnues, l’hostile désert, puis l’océan, avant d’arriver en Sicile où ils attendent et espèrent leur régularisation. Des personnages touchants, des scènes bien ficelées et des histoires captivantes qui tiennent en haleine, font de ce roman un véritable délice malgré le tragique de certaines situations.
Voici d’ailleurs quelques courts extraits :
« Il avait un léger handicap : il lui manquait trois doigts à la main droite : l’auriculaire, le pouce et l’annulaire. On les lui avait coupés dans le désert libyen, où les trafiquants d’esclaves arabes l’avaient capturé. Ils lui demandaient une rançon qu’il ne pouvait donner en échange de sa libération. Ils prirent ses doigts pour le décider à appeler sa famille et leur demander de l’argent. Thialky refusa. On l’abandonna alors dans le désert – ce qui était un châtiment pire que l’exécution sommaire. »
« L’Europe ne peut pas accueillir toute la misère du monde, oui, c’est vrai, mais j’ajoute : parce qu’elle est elle-même misérable. La valeur de la vie humaine même lui échappe, l’effraie… Nous sommes les premiers à prêcher la morale aux autres, nous sommes les premiers à parler des Droits de l’Homme, mais regardons-nous ! Humanisme dégénéré. Phare brisé d’une civilisation en pleine tempête… Et l’Église… La Sainte-Église même… Elle se trompe… Elle accueille pour la grâce de Dieu là où il faudrait accueillir pour le salut des Hommes… Sa charité est un dogme, pas un élan du cœur. »
« Et ce qui se passe, c’est qu’une grande partie de l’Europe ne veut pas de nous ici, et ils le disent clairement, de la façon la plus violente qui soit. Ils disent que l’Europe ne peut pas accueillir toute la misère du monde, alors qu’elle a contribué à créer cette misère. Qui est le plus misérable, entre celui qui n’a rien et celui qui lui a tout volé ? Qui est le plus misérable, entre celui qui fait la guerre et celui qui l’entretient ? »
« Mon erreur est que je cherchais un coupable. Ne vous demandez pas qui est coupable. Tout le monde l’est dans cette affaire. D’abord, leurs pays d’origine. Ensuite, nos pays. Eux. Nous. L’histoire. Le système. Les passeurs. La géopolitique. Le capitalisme mondial. La colonisation. Tout cela a sa part de vérité et sa part de culpabilité. »
« « Courage, ça ira ». Comme tout le monde ou presque, on m’a dit cette phrase lorsque je n’allais pas bien. Et comme tout le monde ou presque, je sais que ça ne change rien. Mais faut bien faire semblant. Lorsqu’un homme qui veut réconforter un autre homme lui dit que « ça ira », je ne vois que deux hommes qui souffrent. L’un baigne dans sa tristesse. L’autre se noie dans son incapacité à parler à la douleur de l’autre. »
Pour un livre à lire, SILENCE DU CHŒUR est un régal.
Le style de l’auteur est superbe.
Quant à l’épopée des migrants, voilà un thème qui n’a pas fini et peut être ne finira jamais de nous dévoiler tous ses mystères, ses misères, et ses tragédies…
Entre l’Afrique et l’Occident, l’Histoire ne serait-elle qu’un éternel recommencement en attendant un éventuel retournement ?
Bonne lecture.

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