CENTRAFRIQUE : UNE NÉGOCIATION EN COUPE REGLÉE
Pendant trois jours de discussions, de négociations, de tractations, de doutes et de suspens, la délégation séléka aura réussi à imposer un rythme endiablé à tous les participants du forum inter centrafricain de Brazzaville. Tout se passait comme si la séléka était le maître du jeu et la seule entité forte autour de la table des négociations. Dès l’entame du dialogue, elle présenta une kyrielle de revendications qui dépassait l’entendement. La partition du pays figure au premier rang de leurs revendications.
En réalité, la nébuleuse séléka utilisait juste ces revendications comme paravent pour mieux faire monter les enchères et cadencer l’ambiance des discussions dans l’unique but d’imposer in fine l’application des accords non-écrits de N’Djamena. Tout porte à croire que le scenario, la mise en scène et le casting de cette concertation ont été scrupuleusement et minutieusement peaufinés par les stratagèmes de cette coalition.
D’entrée de jeu, la délégation conduite par Daffhane a suspendu sa participation au processus du dialogue, créant ainsi une psychose qui s’empara de tous les participants au forum et qui se généralisa un peu partout. Par cette suspension, l’équipe de Daffhane voulait mettre la barre des négociations du cessez-le-feu suffisamment haute afin d’atteindre leurs objectifs. Aussi, la nébuleuse séléka s’est saisie de la marche du Mercredi 23 Juillet 2014 de certains musulmans au KM 5 qui soutenaient la partition du pays, pour accentuer la pression et la panique collective.
Comme si cela ne suffisait pas, la nébuleuse a positionné dans la même journée, un nombre exorbitant de véhicules militaires à l’embouchure de Bambari. Cette théâtralisation de l’armement des sélékas a suscité de vives protestations au sein de la société civile à Bangui. Entre temps, la séléka faisait croire à l’opinion nationale et internationale que le mouvement traversait une crise interne. A force de mettre en amont la division, nombreux sont les analystes voire les professionnels de médias qui pensaient que la séléka disposait de deux groupes distincts à savoir le groupe de Djotodia et celui d’Abdoulaye Hissein.
L’enfumage fut tellement méthodique qu’il était difficile de suspecter quoi que ce soit. Tout le monde croyait à la scission un temps soit peu des sélékas. A priori, le médiateur Sassou voulait surfer sur cette division pour amoindrir l’intransigeance de Daffhane. Aussi imaginaire que cela puisse paraitre, la surenchère des Sélékas et l’immobilisme stratégique des Anti balakas avaient permis le déploiement spectaculaire à Brazzaville de 9 autres sélékas par le médiateur congolais.
L’idée initiale était de contrarier Daffhane dans la négociation en cours mais la tentative s’est très vite érigée en échec à cause de la complicité, de la solidarité et de la discipline de la coalition séléka. Grâce à cette parfaite entente, la délégation conduite par Daffhane a obtenu l’application des accords non-écrits de N’Djamena en échange d’un arrêt des hostilités.
En effet ! La tentation de croire à une répétition de l’histoire est très grande.
Pour rappel, la coalition séléka avait jadis utilisé les mêmes méthodes pour demander la démission de l’ancien président Bozizé aux pourparlers de Libreville. On se souviendra qu’au sortir des discussions, les sélékas avaient obtenu plusieurs postes ministériels très stratégiques. En outre, lorsque la coalition séléka devait lancer l’assaut final sur Bangui, il a fallu l’ingénieuse idée du kidnapping des ministres. Et la suite tout le monde la connaît.
Quoique la coalition séléka ait obtenu pendant cette rencontre, il aisé de rappeler que plusieurs points obscurs nécessitent un déblayage minutieux au niveau national. Espérant que le départ des mercenaires tchadiens et soudanais contribuerait au rétablissement de la cohésion sociale. Il est clair que les mercenaires congolais qui soutiennent les Anti Balakas sur l’axe Mbaïki doivent également repartir chez eux.
Avec les mots contre des maux, la Centrafrique renaitra certainement de ses cendres.
Rodrigue Joseph Prudence MAYTE
Chroniqueur, Polémiste
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