Chronique de GJK

CHRONIQUE DÉCALÉE DE GJK : CATHERINE TU PEUX ENCORE… !

Par GJK

N’eût été le bruit de l’aspirateur professionnel que la femme de ménage a mis en marche sans crier gare et sans prêter attention à ma présence, ma douce nuit d’ivrogne ronfleur, se serait sans doute prolongée encore quelques longues heures de plus. Mais cependant, même réveillé aussi brusquement, pourquoi devrai-je me plaindre de suspendre ce temps d’hibernation, pour profiter « les yeux ouverts », encore et toujours, de cette vie si courte ? De toutes les façons, arrivera un jour très certain, où chacun aura tout le loisir de dormir sans pouvoir se réveiller, même si tout autour de lui, des milliers et des millions d’individus devaient « s’amuser » à crier à tue-tête ! Voilà pourquoi à vrai dire je n’aime pas trop dormir pour pouvoir profiter de chaque minute de cette « putain de vie ! ». Voilà aussi pourquoi à peine deux minutes seulement après que j’eus sursauté de mon sommeil du juste à cause de cet insupportable vrombissement de moteur, me voici déjà en pleine forme pour affronter l’épreuve éthylique du jour, car à chaque jour pourri, ses bouteilles de vin rouge !

Ainsi, en même temps que je reprenais mes esprits, je réalisai sans effort particulier de réflexion, que je venais au fait, de passer toute une journée et toute une nuit au même endroit où j’ai pris place depuis la veille à 10 heures le matin. Et c’est bien dans ce tabac de la gare de Melun, la plus grande « ville centrafricaine » proche de Paris. Dans ce tabac qui m’est devenu si familier dois-je avouer, j’aurais tout de même connu toutes sortes d’aventures agréables et désagréables. C’est là également, que j’ai installé depuis un peu plus de deux ans, ce que j’appelle mon bureau ou mon « quartier général » avec tous les « matériels » nécessaires au fonctionnement de ses trois postes stratégiques : poste d’écoute, poste de surveillance et poste d’opération. Bref, un bureau où je joins l’utile à l’agréable, à savoir : réfléchir profondément aux problèmes de mon pays et m’imbiber tranquillement comme une éponge, de plusieurs litres de vin rouge par jour.

Ce matin, contrairement aux autres jours où j’arrive vers 10h, il est à peine 7H et me voilà déjà en train de prendre place « à ma cabine de pilotage », où je suis le seul et unique travailleur et responsable. Et tout en me frottant les yeux rougis par l’abus d’alcool, je passe mon temps à ouvrir grandement et régulièrement ma grande bouche pâteuse de soûlard qui se bat avec sa gueule de bois. De la même manière, je n’arrête pas non plus ce matin, de me gratter continuellement le corps à divers endroits, comme seuls savent le faire, les alcooliques finis de l’espèce pourrie à laquelle j’appartiens !

Quelques minutes s’écoulèrent ainsi, et dans cet environnement de plus en plus monotone pour moi, je retrouvai ma position habituelle : toujours vautré confortablement sur le siège douillet d’un fauteuil rembourré, placé dans l’un des quatre coins à la lumière tamisée de ce bar où je fais désormais partie du décor. Devant moi sur la table, une bouteille à moitié vide de mon vin préféré, le « clochard nouveau » que j’ai dû certainement entamer hier soir avant de me laisser emporter par le sommeil. Dans ma main droite, se trouve mon verre de vin à moitié vide, que je caresse malicieusement. Tout à coup, d’un coup sec et nerveux, je vidai le contenu du contenant en faisant des grimaces ! Aussi, je fis un rapide calcul mental, et me rendit compte d’une chose : j’en étais déjà à mon cinquième tour de verre ce matin alors que l’horloge marque un peu moins de 8 heures et demi. C’est qu’en fait, pour moi, le vin rouge tient également lieu de petit déjeuner copieux. Ma journée venait ainsi de (re) commencer.

Et tel le célèbre Commissaire Derrick de ma jeunesse – manteau kaki et foulard en cachemire accroché au dos de ma chaise, chapeau borsalino noir vissé sur le crâne, grosses lunettes de myopie bien placées au bas de l’arête nasale, et tête plongée dans les pages des différents quotidiens que j’ai achetés hier avant d’arriver à mon « bureau », j’entrepris de « tuer » le temps à faire tranquillement ma petite lecture du jour et à lever de temps en temps le coude. C’est alors que soudainement et à haute voix, je m’entendis laisser échapper de ma propre bouche d’alcoolo résistant, comme un cri de détresse, cette unique phrase que je répétai à plusieurs reprises : « Catherine tu peux encore… Catherine tu peux encore… Catherine tu peux encore… ! ».

En un temps deux mouvements, je me servis encore un verre de rouge que je bus d’un seul trait, et saisis mon stylo toujours à portée de main. Je me mis aussitôt à accoucher fiévreusement des lignes que voici.

Catherine tu peux encore… ! bof…mais oui Catherine tu peux encore t’en sortir. T’en sortir et nous sortir de cette m…bon sang de m.. !

Je t’appelle aujourd’hui Catherine, parce qu’après tout tu ne peux pas me dire que tu ne t’appelles pas Catherine. Ton nom de baptême ou plus précisément ton prénom est Catherine. Donc Catherine c’est toi !

Je dis aujourd’hui « tu », parce qu’il existe bien ceux qui te « tutoient ». Qu’ils soient tes enfants, tes parents ou tes amis et « collabos », cela m’indiffère. Et si mon outrecuidance te mets dans tous tes états comme tu sais si bien t’y mettre, je te prie de te ressaisir. Juste le temps d’un article, essaie de faire semblant et de considérer que je fais partie de la catégorie des « élus » précités. Cela t’évitera à coup sûr de te faire mal et de mettre ton âme à l’abri d’une peine que je t’oblige à supporter !

Que disais-je donc ? Que tu me considères comme appartenant à la catégorie de ceux qui te tutoient ? Oui, mais à la différence que ce sont tous des menteurs ceux qui t’entourent. Et ils le savent très bien, eux qui ne peuvent et n’aiment rien tant que mentir ! Ils te mentent nuit et jour, ils te mentent pour ce que tu es aujourd’hui. Ils te mentent surtout pour ce que tu as et que tu n’avais pas hier et qu’ils veulent et cherchent par tous les moyens à te « piquer » et disparaître sans réapparaître le jour où tu auras besoin d’eux.

Moi, je ne mens pas, je ne peux pas te mentir et tu le sais, parce que je n’attends rien de toi et de personne ! Ni argent, ni or, ni pouvoir, ni nomination, ni honneurs et tapis rouge en particulier, ni je ne sais plus quoi encore qui fait courir les Centrafricains ! Je ne mens pas, je ne te mens pas, et puisque je ne mens pas et ne te mens pas, je te dis clairement ceci :

Catherine tu peux encore t’en sortir et nous en sortir tous de cette m…dans laquelle toi et tes prédécesseurs vous avez plongé la Centrafrique et les Centrafricains !

Tes prédécesseurs ? Eux, ils ne sont plus là. Mais toi, te voilà bien qui siège sur le trône de gloire. Et tu dois payer de ta propre personne toutes les fautes et les erreurs qui ont été commises avant toi. Et comme disait Barthélémy Boganda la référence absolue, dans un de ses discours prononcé en 1957 que je me permets de paraphraser à ton attention Catherine :

« Catherine tu as du souffle, je te plains…c’est un théologien qui te parle. Et il existe en théologie une réparation solidaire. Tu es solidairement responsable des actes de tes prédécesseurs…Le péché originel existe. Qui l’a commis ? Ce n’est pas moi. Mais j’en pâtis. »

Tes prédécesseurs Catherine ? Ils sont partis et même s’ils devaient revenir vivre en RCA, je doute qu’ils réussissent encore à reprendre le fauteuil de président qu’ils pleurent tous comme des femmes pour n’avoir pas su le préserver et le défendre comme des hommes ! Tes prédécesseurs sont partis et heureusement pour toi, tu es plus intelligente que les deux réunis !

Ah oui Catherine, je l’avoue, tu n’es pas qu’une femme. Mais une femme intelligente. Et c’est pour cela que tu es plus dangereuse que les hommes qui t’ont précédée. Et plus grave encore, si l’on associe femme – intelligente – présidente, c’est vraiment la quadrature du cercle comme dirait l’autre !

Oui Catherine, tu es intelligente mais je ne sais pas si tu sais que tu es intelligente. Parce que si tu savais que tu étais intelligente, tu cesserais de l’être. Du coup, je sais que tu es intelligente et même très intelligente. Et c’est pourquoi tu as cessé d’être intelligente ! Pour preuve, tu ne réfléchis plus. Ce sont les autres qui le font à ta place et dans leurs propres intérêts. Et toi tu assumes aujourd’hui « bêtement » ce que tu subiras demain innocemment.

Mais tout cela n’est pas grave car « il n’ya que les imbéciles qui ne changent pas » dit-on. Et aussi certain que je le suis de mon existence et convaincu que je mourrai un jour, je sais que Catherine tu n’es pas une imbécile.

Euh que dis-je ? « il n’ya que les imbéciles qui ne changent pas » Or Catherine n’est pas une imbécile. Donc Catherine peut…C’est tout le malheur que je te souhaite Catherine.

Catherine tu n’es pas une imbécile donc tu peux changer. Et si tu peux et veux changer, tu peux t’en sortir et sortir tous les Centrafricain de la grosse m…actuelle !

Ainsi donc, la question qui reste posée est une question de résilience personnelle : CATHERINE VEUX-TU VRAIMENT CHANGER ?

Catherine, il y’a douze mois que tu es au pouvoir. En douze mois, j’au vu ma petite fille naître, ramper sur ses genoux et bras, se lever puis marcher sur ses deux jambes. Aujourd’hui elle commence à courir comme seuls les enfants de cet âge savent et peuvent le faire. Aujourd’hui, cette petite fille, ma petite fille sait dire « papa, maman ». Et même si elle a tendance à vouloir jouer avec le feu, ceux qui l’entourent savent l’en empêcher. Et à force de lui dire non, on ne s’amuse pas avec le feu, l’enfant petit à petit, arrive à intégrer dans son subconscient que l’on ne s’amuse avec le feu. Mais il peut arriver malheureusement que cette prise de conscience passe par une brûlure.

Pour tout dire, le feu comme chacun le sait, a deux propriétés principales: il réchauffe, il éclaire. Mais autant le charbon qui réchauffe peut brûler, autant une ampoule ou la bougie qui éclaire, peuvent aussi brûler. Et il en est ainsi du pouvoir à mon avis.

Aujourd’hui, tous ceux qui t’entourent Catherine, ne retiennent du feu du pouvoir que sa chaleur bienfaisante et sa clarté qui transforme la nuit de nos pauvretés en ambitions personnelles, de nos malheurs en un montagne de merveilles souvent éphémères.

Mais que chacun veuille bien prendre garde, le feu brûle ! 

Catherine tu peux encore t’en sortir et nous sortir tous, de cette m…mais il te faut vouloir, vouloir et changer par rapport à ces quelques points :

  • Abandonner toute ambition présidentielle qui fausse le sens de toutes tes actions
  • Te réconcilier avec toute la communauté nationale et internationale
  • Nommer dès à présent un nouveau premier ministre
  • Mettre fin à l’enrichissement personnel et à la prédation
  • Arrêter d’entretenir l’insécurité et mener une lutte sans merci contre tous ceux qui en sont les auteurs
  • Organiser des élections crédibles et accepter de passer à ton successeur le flambeau de la relève.

Tous les comptes faits, à titre personnel, que te manque-t-il Catherine pour entrer dans l’Histoire par la grande porte ?

  1.  L’argent ? Tu en as amassé aujourd’hui suffisamment et tu as dû te rendre compte qu’il peut sentir mauvais et même très mauvais
  2.  Le pouvoir ? Quiconque l’a exercé un temps et est honnête avec lui-même, dira qu’il a pensé au moins une fois l’abandonner. Je parie qu’il en est de même pour toi surtout quand le pays que tu diriges s’appelle RCA. Seulement, tout homme de pouvoir ne s’appartient plus. Il ne voit, ne respire, ne mange, ne boit, n’entend plus que par procuration. Toi Catherine tu peux encore te ressaisir.
  3. Les honneurs ? ils n’empêchent pas d’avoir des insomnies. Catherine tu n’es pas née avec le tapis rouge et le tapis rouge ne te raccompagnera pas à ta dernière demeure. Aujourd’hui Catherine quand je t’observe et t’examine, je me dis que ton entourage ne t’aime pas. Regarde même tous ces habits fluorescents – sôlè ou « ça fait mal aux yeux » – que tu portes très souvent, comme si tu devais participer à chacune de tes sorties à un mauvais dîner de gala ou à un défilé de mode du 23ème siècle.

En définitive Catherine, il ne te restes qu’une chose à ta portée : Te battre pour entrer dans l’Histoire comme la dame qui aura permis à la RCA de reconquérir sa place et sa dignité au sein des nations respectables d’Afrique et du monde.

CATHERINE TU PEUX ENCORE T’EN SORTIR ET NOUS EN SORTIR TOUS DE CETTE M…DANS LAQUELLE TOI ET TES PRÉDÉCESSEURS VOUS AVEZ PLONGE LA CENTRAFRIQUE ET LES CENTRAFRICAINS !

Guy José KOSSA
GJK – L’Élève Certifié
De l’École Primaire Tropicale
Et Indigène du Village Guitilitimô
Penseur Social

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