Chronique de GJK

CENTRAFRIQUE : QUI DEMAIN POUR SERVIR DE CONTRE-POUVOIR AU POUVOIR ?

Par GJK

Ces souvenirs resteront pendant très longtemps, gravés dans la mémoire du peuple Centrafricain : le vainqueur de la présidentielle rendant visite au vaincu, figurera sans doute, parmi les images les plus glorieuses de l’histoire de la démocratie en Afrique. Du reste, Faustin Archange Touadera, le Président élu, au domicile du perdant, Anicet Georges Dologuélé, il n’en fallait pas plus pour déclencher la surabondance d’insinuations auxquelles nous avons eu droit ces derniers jours. Espérons simplement que dans les mois ou les années à venir, les initiés sauront nous dire très exactement, quelles furent les motivations à la base d’une initiative aussi singulière.

Pour ma part, quitte à « être suspecté d’être de ces cafardeux qui troublent perpétuellement de leur humeur maussade la joie du peuple », je n’éprouve guère aucune raison particulière de me réjouir et d’applaudir, ni de me convertir à une certaine presse et opinion, qui croient trouver aujourd’hui matière à supputations faciles, dans les moindres faits et gestes de tous nos hommes politiques au premier rang desquels le nouveau Chef d’État centrafricain. Entre les « paroles et les actes », j’estime qu’il faut à l’heure actuelle, savoir garder la tête froide, et se demander à chaque fois, de quel côté de la ligne, se trouve en dernier ressort, l’intérêt de la Centrafrique et du peuple centrafricain. Alors seulement, pourrait-on grâce à la réflexion, servir d’agent d’appui à la consolidation et à la pérennisation de la démocratie (re)naissante en Centrafrique.

Et si idéalement, la démocratie est et demeure « le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple », cela implique avant tout, que l’on puisse se soumettre aux règles de cet exercice équilibré et délicat. En d’autres termes, il faut qu’en face d’un pouvoir responsable qui dirige, puisse se dresser un contre-pouvoir digne et conscient de sa propre mission. D’où l’importance et l’avantage d’éviter autant que possible, toute forme de compromission, qui passerait par un compromis égoïste, mais souvent précaire et même suicidaire. Cette exigence vaut pour la classe politique « politicienne » certes, mais plus encore, pour toutes les organisations de la société civile, les apporteurs de solutions et les forces de propositions.

Si l’objectif principal de la transition politique centrafricaine était de créer les conditions d’un retour à une vie constitutionnelle normale, à vrai dire, le processus électoral actuellement en cours d’achèvement en RCA, ne constitue à mon avis, qu’une étape préliminaire – importante mais minime -, vers l’émergence d’un état de droit et la création de toutes les institutions démocratiques appelées à jouer un rôle capital. Et ce n’est pas parce que l’on a plus ou moins réussi à organiser des élections vivement souhaitées par l’ensemble des populations et des acteurs politiques, et à accepter tous, de se soumettre au verdict final des urnes, qu’il faut croire que l’on a définitivement tourner le dos aux démons du passé. La RCA, il faut le reconnaître, n’a pas encore obtenu son droit d’entrer et de prendre place au banquet où ne sont conviés que les pays d’Afrique et du monde de plus ou moins longue tradition démocratique. Il faut encore à notre pays faire ses preuves.

Cela étant, dans le souci de créer généralement un environnement propice à la sécurité, à la paix et au développement global et efficace d’un pays tel que la RCA – grâce à la contribution de chacun et de tous -, l’on commence souvent par rechercher un consensus politique, qui se matérialise in fine par la formation d’un gouvernement de large coalition, le tout, sur fond de compromis, de « partage de gâteau », de « retour sur investissement », de compensation ou de distribution des récompenses etc… Ces accords politiques, ne sont en réalité, que l’expression primaire d’un unanimisme, une tentative avancée dans la construction d’un système monolithique que d’aucuns appelleraient la « démocratie consensuelle », qui, il faut le dire, ne comporte pas tous les ingrédients d’une véritable démocratie ou d’une démocratie tout court. Au contraire, ces pratiques politiciennes, finissent invariablement, par générer leur propre poison, et à fragiliser la démocratie dans son essence, en portant atteinte au droit fondamental à la libre expression, au débat sérieux et à la nécessaire contradiction.

De mémoire d’homme, bien d’exemples à travers l’Afrique devraient inciter à la réflexion. L’on se souvient par exemple, du cas du brillant opposant Abdoulaye Wade, qui, à cause de ses multiples « séjours » au sein de plusieurs gouvernements des régimes qu’il combattait au Sénégal, avait fini par perdre en crédibilité, en respectabilité et en notoriété, même si plus tard, il réussit à devenir le Chef d’Etat qu’il a toujours chercher à devenir. Mais n’est pas Wade qui veut !
Moustapha Niasse, le faiseur de rois, Sénégalais encore, ne connut qu’un passage éphémère au poste de premier ministre sous la présidence du même Wade. Il est aujourd’hui, grâce à Macky Sall en train de finir – heureusement ? -, sa carrière politique à la tête de l’assemblée nationale.
Au fait, que sont-ils devenus, les sieurs, Raila Amolo Odinga et Morgan Tsvangirai, qui furent respectivement « Opposant- 1er Vice Président », du Président Mwai Kibaki au Kenya, et « Opposant-Premier Ministre » du Président Robert Mugabé du Zimbabwé ?

Tout bien considéré, la RCA, d’un côté, n’a pas intérêt aujourd’hui, à voir germer partout des alliances et des accords politiques, qui tous, auraient vocation à se fondre et à se confondre au seul pouvoir, de manière à créer une ambiance de parti unique. Ce serait là, les prémisses d’une future opposition des déçus, une opposition des faibles et des « serviles alimentaires » éloignés de la mangeoire du pouvoir. En d’autres termes, nos hommes politiques devraient comprendre qu’il n’est pas toujours nécessaire d’attendre patiemment, jusqu’au point d’avoir la ferme certitude de ne plus pouvoir obtenir ce qu’on vise et espère ardemment du Chef de l’Etat, pour que plus tard, déçu et compromis, on se réveille, se ravise et tente de revenir se remettre à jouer les grands opposants au régime de Faustin Archange Touadera.
De l’autre côté, les futurs dirigeants de la RCA devront retenir définitivement, que toute « absence de contre-pouvoir, est toujours et avant tout, un danger pour le pouvoir lui-même»

Dont acte.

Guy José KOSSA
GJK Levillageois
Élève Certifié de l’Enseignement
Primaire,Tropicale et Indigène (CEP-TI)
Écrivain Public du Village Guitilitimö

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