Chronique de GJK

ANTIBALAKA, VOUS AVEZ BIEN DIT ANTI-BALLES-A-KA ?

Depuis l’apparition en RCA,  il y’a plusieurs mois, des groupes villageois d’auto-défense, formés à l’origine, pour résister aux  diverses agressions, exactions et autres dérives des éléments de la coalition SELEKA, qui s’était  accaparée du pouvoir centrafricain en mars 2013 avant d’être démantelée, l’étymologie réelle du nom « Antibalaka » semble ne pas faire l’unanimité.

Sans se poser des questions, sur son sens véritable, tout le monde, à commencer par les combattants eux-mêmes, ainsi que tous ceux qui  maîtrisent un tant soit peu le « sango », la langue nationale de la R.C.A,  a fini par accepter et intégrer dans le langage courant, le mot « antibalaka», composé du préfixe français « anti »,  et du nom sango « balaka », qui signifie « machette ». Autrement dit, la résistance Antibalaka, serait une opposition « anti-machettes ».

Mais pour l’observateur attentif de la société centrafricaine, intéressé par l’analyse des différents phénomènes socio-politiques, une petite recherche, permet peut-être, de comprendre et expliquer,  sans trop d’ambigüité, ce fameux concept de « antibalaka ».

En effet, aucune tentative de traduction de ce nom, suggérée par les journalistes, aussi bien centrafricains qu’étrangers, n’arrive à persuader totalement et à donner entièrement satisfaction aux plus sceptiques. Moins persuasive encore, la rhétorique abracadabrantesque, des politicards, qui ont cru devoir  récupérer le soulèvement populaire légitime des combattants Antibalaka, pour lui donner des ailes, politique et militaire. Quant à certains « chercheurs », auteurs de  différents textes publiés çà et là, ils ont peut-être convaincu, car leurs démarches intellectuelles, ont, sans nul doute, abouti à rétablir la vérité historique sur les origines, l’apparition et l’évolution du phénomène « antibalaka ». Cependant, sur la connotation très approximative donnée au mot même « antibalaka », le doute méthodique reste admis, pour plusieurs raisons:

  1. En « sango » courant, machette se dit aussi « ndjè –ndjè ». Ceci étant, l’emploi de « Antibalaka » plutôt que celui de « Anti-ndjè-ndjè », doit pouvoir s’expliquer.
  2. Antibalaka, mot à mot traduit par « anti-machettes », sonne faux. Il paraît nul et vide de tout sens. Car, comment comprendre et accepter que, des porteurs, utilisateurs, et « amoureux » de machettes, se soient donnés à eux-mêmes, le nom « d’anti-machettes » ? Cela manque de logique.
  3. « Milices chrétiennes d’autodéfense » ? C’est à ce niveau, que se situe le summum même, de l’absurdité béante, conduisant à  tromper grossièrement  les  masses populaires ignorantes. Cette duplicité foncière et ignominieuse, reste savamment entretenue et alimentée depuis des mois, par des commentateurs malveillants de tous bords. Des médias orientés, des hommes publics vicieux, et autres leaders de mauvais genres, dont l’innocence des propos est sujet à caution, persistent volontairement à utiliser  le substantif, « milices chrétiennes ». Leur seul but,   inavoué bien-sûr, est de confondre « antibalakas » et chrétiens, afin de parvenir à attiser durablement le feu de la guerre civile.  En faisant croire que le conflit qui déchire la RCA, oppose des frères Centrafricains, musulmans contre chrétiens, avec toutes les conséquences que l’on connaît, ils réussissent ainsi,  à détourner l’attention, des prétextes et des motifs qui animent de part et d’autre,  les différents protagonistes de la crise centrafricaine. Ces derniers, quant à eux, ignorent pour la plupart, la réalité des intérêts souterrains en jeu, dont les seuls véritables bénéficiaires sont des pays étrangers. Tout bien considéré, il faut  comprendre en effet, si l’on veut bien comprendre, que mise à part les machettes, les principaux apparats et autres signes distinctifs qui caractérisent l’« antibalaka »,  original et fondamental, demeure le port d’amulettes et gris-gris. Tous ces blindages,  sont ordinairement qualifiés d’occultes et sataniques par les croyants chrétiens. Plus est, ils  ne font nullement partie, de l’arsenal d’objets sacramentaux de la religiosité populaire chrétienne. Enfin, s’il arrivait à un digne chrétien Centrafricain, protestant, catholique ou évangélique,  ce qui n’est pas rare et impossible, de porter ces gris-gris et amulettes, il se  passerait bien de les exposer aussi ostensiblement, comme le font les « antibalakas », pour s’en vanter. Bref.

D’après des analyses approfondies, le mot « antibalaka », a été effectivement prononcé pour la première fois, dans un groupe villageois d’auto-défense, au cours d’une conversation très animée entre deux jeunes. Dans leurs échanges amicaux en sango, un  des interlocuteurs, a bien voulu répondre aux interrogations d’un de ses « frères d’armes »,  au sujet d’un lot de colliers  d’amulettes et de grigris, que cet intrépide guerrier,  portait toujours autour de son cou, et ne s’en séparait jamais. Sans aucune intention de trahir la manière dont le dialogue original s’est déroulé, voici en substance, ce qui a été dit par l’un et l’autre amis combattants au cours de la causerie en « sango » :

  • « A gnè-là mo you ti mon lakwe lakwe gbani-gbani na tèrè ti mo so di » ? Phrase qui peut se traduire littéralement en français : « quelles sont toutes ces choses que tu portes tous les jours et en nombre sur toi, cher ami ? » (entendre  par ces choses, le lot de colliers de gris-gris et  d’amulettes)
  • « Di, mo yinga ti mo apè ? so kwè mo kè ba so, à kè a « anti balles ti a kala » ti a Séléka  là », ce qui veut dire : « cher ami, ne le sais-tu donc  pas ? tout que tu vois, ce sont des anti-balles contre les tirs de kalachnikov des Séléka. »

On le sait, en Centrafrique, les jeunes ont pour habitude d’appeler, « kala », toutes les mitraillettes kalachnikov de fabrication soviétique. Autrement dit, « anti-balles ti a kala », prononcé à l’origine, traduit et explique bien le pouvoir réel ou supposé, des amulettes et gris-gris portés par le combattant, pouvoir de protéger ce dernier contre les blessures et la mort, infligées par les balles de kalachnikov tirées par les criminels de la SELEKA. Depuis lors, ce substantif, à commencer à se répandre et s’imposer, pour finir par désigner,  d’abord,  les objets protecteurs dont se parent les combattants des groupes d’autodéfense, qui ne s’étaient pas encore affublés de la dénomination de « Antibalaka ».

« Anti – balles ti a kala », donnera « anti-bal à kala » qui, prononcé de bouche à oreilles par les uns et les autres, finira par devenir « anti- balaka ». Cette dernière appellation, s’est  répandue rapidement, car,  surtout  facile à prononcer et à  retenir,  à cause du nom connu en « sango » de « balaka », la machette, un des outils  les plus prisés et utilisés par les paysans,  pour leurs différents travaux au village.

Voilà donc, l’origine et la signification de ce nom de « antibalaka » ou « anti-bal- à -kala », qui, de simple mot de passe, a fini par devenir le nom que se sont donnés les groupes d’auto-défense : ANTI-BALLES- A- KA

Cela paraît-il plus logique ? Mais au delà, existent-ils encore aujourd’hui, de véritables combattants nationalistes, ANTI-BALLES-A-KA, dont la seule raison d’exister, était de se battre pour défendre à tout prix, la RCA, et tous les Centrafricains, sans distinction de race et de religion?

GJK – L’Élève Certifié 
De l’École Primaire Tropicale 
Et Indigène du Village Guitilitimô
Penseur Social

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