Chronique du Village Guitilitimô

CONNAIS-TU LA RÉPUBLIQUE DE KARAZO TON PAYS ?

Par GJK
L’Élève Certifié du Village Guitilitimö
Immigré au village frère de KOUÂKÊMBI

Lorsqu’ils furent arrivés à Karambi la coquette balafrée et martyrisée, capitale totalement méconnaissable de RDK, la République DémonCrassique de Karazo, les trois amis de toujours, Baba-Kitè le doyen, Agbâ-Mozâ l’entreprenant, et Étêgui-Têngô l’incorrigible, n’avaient pu résister à l’émotion jusqu’aux chaudes larmes. Comme la plupart des Karazoëns de retour au pays après de longues années d’absence, ils avaient eux aussi, subi à leur tour et depuis l’aéroport, ce terrible et très profond choc intérieur totalement imprévisible, dès qu’on mettait le pied hors de l’avion. Et ce choc ira en s’aggravant, durant tous les jours des premières semaines qui leur furent nécessaires, aussi bien pour l’indispensable acclimatation, que pour les  inévitables épreuves de bienvenue Karazoënne en vue d’une réinsertion véritable .

L’indescriptible et innommable réalité du pays, dépassait au fait la pire des fictions que les trois amis auraient pu imaginer et écrire ensemble. Tout ce qu’on avait su leur peindre de triste et d’insupportable avant leur départ de Paris, se révélaient être d’une béatitude paradisiaque, comparé aux stigmates de l’ouragan dévastateur qui entretemps avait traversé Karazo de part et d’autre, ne laissant partout sur son passage, que tristesse et désolation. Presque heureusement, au fur et à mesure des rencontres et des déplacements, le trio d’amis apprendra très vite, à découvrir les choses et à s’habituer aux réflexes assez étranges du Karazoën nouveau, victime d’une crise qui a profondément bouleversé les comportements et déformé les mentalités. Pour se fondre parmi leurs compatriotes et se confondre à tous, dans le but de se faire accepter et passer incognito, il a fallu aux trois amis, mais chacun à sa manière, tout essayer pour intégrer le réel de l’environnement et se familiariser à la sévère défiguration de Karambi la coquette, naguère ville de pari, mais désormais ville fantôme et de famine. Comme du reste, toutes les villes de Karazo, ce beau pays qu’ont connu certaines générations dont l’enfance et l’adolescence ne furent que bonheur et insouciance. Mais ça, ce ne sont des souvenirs très lointains!

Passé le temps des émotions et de l’adaptation, pour sa part, Agbâ-Mozâ le jeune pharmacien et entrepreneur dynamique, s’est aussitôt à s’investi à fond, dans la réalisation de son projet d’installation d’une officine de pharmacie. Il avait pour ce faire, déployé toutes les économies de sa famille, reçu des contributions substantielles de ses amis de France et d’ailleurs, et surtout, contracté un crédit important auprès de sa banque en France. C’est ce qui explique d’ailleurs,  qu’en moins de trois mois, la pharmacie Zikobéla-Zivoundou a vu le jour. Les prestations de qualité, le professionnalisme de Agbâ-Mozâ, la disponibilité d’un personnel toujours au petit soin et à l’écoute de la clientèle, ainsi que le niveau des prix adaptés à la bourse du Karazoën moyen et pauvre, firent aussitôt leurs effets. Zikobéla-Zivoundou, la nouvelle pharmacie, gagna en réputation, plomba la concurrence, et devint l’enseigne la plus prisée et la  la plus fréquentée de la place.

En revanche et  comme d’habitude dans ces cas  en République DémonCrassique de Karazo, le rejet, la jalousie et la haine de tout de qui se distingue par sa qualité, n’ont pas tardé à déployer et à déclencher leurs impitoyables, détestables et très misérables armes de destruction déloyale, odieuse  tyrannique et malhonnête. Sans merci, elles s’abattirent contre Zikobéla-Zivoundou. C’est ainsi qu’un jour, arriva ce qui ne devrait pas arriver dans un pays en destruction continue, qui avait fait appel à ses enfants d’ici et d’ailleurs pour tenter une difficile reconstruction. N’y tenant plus, Agbâ-Mozâ finit par jeter l’éponge. Il décida de quitter une fois Karambi pour toutes les raisons qu’il explique :

« Comment pouvais-je résister au-delà de ce que j’ai connu et vécu en moins de deux ans que je me suis battu pour avoir un crédit et ouvrir mon officine de pharmacie? Un État où la CRASSE a pris la place de la grâce et où la Démocratie se transforme chaque jour en DémonCrassie, tel s’est révélé à moi, être au final Karazo mon pays bien-aimé. Voyez-vous comment se comportent cette « CRASSE » et cette engeance de fonctionnaires véreux et d’hommes politiques corrompus ? Chaque matin ou presque, j’avais au minimum, le contrôle d’un service de l’état. Des impôts à l’inspection du travail, en passant par l’inspection sanitaire, la mairie, la douane, le cadastre, l’inspection du commerce…tous les motifs étaient bons pour me soumettre à une épreuve. Même le service d’immigration s’était mise en tête de vérifier et de revérifier ma nationalité, tout simplement à cause de mon épouse blanche et de mes deux enfants métis. Pire, l’on a estimé que ma façon de m’exprimer dans la langue nationale de Karazo, était très peu Karazoënne, tandis ma diction française était d’une limpidité suspecte.

Aussi, quand à l’issue d’un contrôle, il se trouvait que j’étais en règle, le vérificateur lui, se retrouvait subitement mal à l’aise et n’arrivait même pas à dissimuler son agacement. Par contre, quand je n’étais pas en règle et que je réclamais à verser à la caisse du Trésor public l’amende prescrite au titre de l’infraction relevée dont j’exigeais auparavant de savoir à quelle disposition légale elle correspondait, tout se passait comme si je venais « d’injurier la mère » de mon interlocuteur. Et quand on sait qu’injurier la mère d’un Karazoën est un « crime » en vertu du code d’honneur non écrit de Karazo, en être accusé ou soupçonné, se paie souvent cher et cash.  En d’autres termes, un tel affront se répare généralement par tous les moyens, y compris celui de la bastonnade organisée pouvant entraîné la mort que tout le monde banalise désormais à Karazo. Bref, tous à la ronde et chacun à son tour,  n’arrêtaient de me réclamer des pots de vins par-ci, un service financier par-là. Sans exclure bien sûr, cette fâcheuse tendance à croire que les produits et médicaments de ma pharmacie, seraient devenus en fait des denrées ordinaires destinées à la distribution gratuite, sous réserve d’en exprimer simplement le besoin.

Je refusais systématiquement de donner pour donner, quand bien je donnais et continuais de rendre service non sans avoir au préalable discerné. Pourtant Zikobéla-Zivoundou ma petite pharmacie, en moins de deux ans avaient révélé tous les indicateurs d’une affaire qui pouvait non seulement bien marcher et évoluer, mais surtout, répondre aux besoins de santé des citoyens Karazoëns. Hormis cela, j’avais identifié plusieurs projets pour lesquels j’avais dénormes capitaux étrangers étaient déjà mobilisés. Mais là encore, c’est sans compter avec la vénalité et la gloutonnerie des hommes du pouvoir. De guerre lasse, à bout de souffle, d’énergie et de nerf, et de peur d’y laisser ma vie après avoir perdu en santé, j’ai fait ma valise un matin sans préavis, et le soir je prenais le même avion qui m’avait emmené à Karambi dix huit mois plus tôt, mais cette fois, en direction de Roissy Charles De Gaulle à Paris.

Mais je le jure, quoiqu’il advienne, je ne me laisserai pas faire. Je retournerai en RDK, et cette fois-ci, c’est décidé : je m’engage en politique. Il faut bien que tout de change un jour et ça va changer! »

De cette manière, fut scellé le destin contrarié du jeune Pharmacien et entrepreneur dynamique venu investir dans son propre pays.

Mais qui pouvait alors s’imaginer qu’à l’origine de tous les malheurs de Agbâ-Mozâ, se trouvait un ami de plus de trente ans, un compagnon des jours fastes comme des jours néfastes,; quelqu’un avec qui, il a toujours tout partagé;  un « plus que frère » comme on dit à Karazo, que le pharmacien a toujours financièrement soutenu depuis l’Europe, et qui la veille encore, se trouvait dans la pharmacie Zikobéla-Zivoundou, d’où il en ressortit avec un carton plein de médicaments et une enveloppe ventripotente pleine à craquer de billets de banque ? Non, le Karazoën est vraiment mauvais ! Plus mauvais que le mot mauvais même, comme disent les ouest-africains.

Comment croire que Étêgui-Têngô alias Agâwa-Ipké qui lui, s’était taillé une place au soleil et devant la mangeoire de Kêtènguéré-Lonaélo-Langögba, le nouveau Président « démonCrassiquement venu » de la République de Karazo, en soit encore à jalouser un « plus que frère » au point de l’empêcher de vivre à défaut de le tuer ?

Que les dirigeants de Karazo, vivent, pillent et gaspillent, détournent et tournent le dos au peuple, cela ne suffit pas, ne suffit plus ! Encore faut-il empêcher tous ceux qui le souhaitent, t d’entreprendre et de gagner honnêtement leur vie.

Cher Agbâ-Mozâ, connais-tu au moins ton pays la République DémonCrassique de Karazo ?

Tu l’as dit, tu reviendras et les Karazoëns t’attendent car c’est ton pays. Des Étêgui-Têngô – Agâwâ-Ikpè, la République de Karazo en a connu des milliers et il en connaîtra encore. Dis-toi simplement que sous le soleil, rien n’est éternel !

( Á suivre…)

Par GJK-Guy José KOSSA
L’Élève Certifié du Village Guitilitimö
Immigré au village frère de KOUÂKÊMBI

Commentaires

0 commentaires

@Lesplumes

www.facebook.com/lesplumesderca - www.twitter.com/lesplumesderca

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Bouton retour en haut de la page