Chronique de GJK

RCA : UNE ALLIANCE OFFENSIVE DU DUO EXECUTIF POUR LA CANDIDATURE DE NZAPAYEKE A LA PRESIDENTIELLE ?

L’actualité politique en Centrafrique, on s’en doutait, reste assez calme en ces derniers jours, et peut-être le sera-t-elle encore toute la semaine. Mais s’agirait-il d’un calme qui précède la tempête ? Nul ne sait. Dans tous les cas, si le Centrafricain lambda ne perçoit pas grand-chose et peut somnoler tranquillement, c’est que d’ordinaire, « l’on entend le fracas des arbres qui tombent, mais pas le murmure de la forêt qui pousse ». En ce qui concerne la Centrafrique, peut-être n’entendra-t-on pas des fracas, avant la fin du prochain sommet de l’UA à Malabo en Guinée Equatoriale. Par contre, poussent encore et toujours, de grandes négociations sur la situation de la RCA, ce pays appelé à sortir de sa léthargie chronique et à écrire de nouvelles pages de son histoire. La communauté internationale qui s’impatiente très sérieusement en a conscience, car c’est bien elle, qui s’est saisie de certains sujets urgents, et tente de leur trouver des solutions rapides, justes et équitables.

Au menu  des discussions, se trouve avant tout, l’article 106 de la charte constitutionnelle de la transition qui stipule : « Le Chef de l’Etat de la Transition, le Premier Ministre de Transition, les membres du Gouvernement de Transition et les membres du Bureau du Conseil National de Transition sont inéligibles aux élections présidentielles et législatives organisées à l’issue de la transition ». Si tous les acteurs semblent être d’accord, qu’il faille supprimer ou trouver une nouvelle formulation à cet article, il restait à déterminer malgré tout, si le « verrou », ainsi qu’on le désigne, doit « sauter » ou non, pour l’ensemble des personnalités concernées. La réponse finale acceptée à l’unanimité, consisterait à maintenir l’interdiction uniquement pour la seule Chef de l’Etat de la Transition. La reculade annoncée la semaine dernière par Mme Samba-Panza qui n’a jamais fait mystère de ses ambitions, trouve ici son explication.

Par ailleurs, la Communauté Internationale, constate avec regret, que rien de ce qui a été programmé pour la transition, n’avance en réalité comme elle l’aurait souhaité. Et pour donner un nouvel élan, impulser une nouvelle dynamique à cette période capitale pour la Centrafrique, il aurait été envisagé que Mme Samba-Panza, la Présidente de transition élue par le CNT, poursuive certes sa mission, mais de préférence, avec l’aide d’une nouvelle personnalité bien disposée, au poste de premier ministre.

Contre toute attente, et face aux désidératas de la communauté internationale, qui détient en dernier ressort le cordon de la bourse, le duo exécutif au pouvoir en RCA, tenterait à tout prix de résister. Naturellement, Mme Samba- Panza ne rechignerait pas à poursuivre la transition pour laquelle elle s’était engagée. Quant à sa candidature à la Présidentielle, qu’elle avait commencé à envisager et même à préparer très sérieusement avec l’aide de son entourage le plus resserré, elle accepterait de céder aux irrésistibles pressions de la communauté internationale. En contrepartie, Samba-Panza serait engagée dans des négociations tous azimuts, et tiendrait coûte que coûte à convaincre les partenaires internationaux, de la nécessité de garder à son poste Nzapayéké. Une telle attitude, a de quoi surprendre, quand on sait que ces derniers temps, entre les deux têtes de l’exécutif de transition, il n’existe en réalité qu’une simple « entente cordiale ».

Pour Nzapayéké, « Il y a une seule personne qui est élue ici, c’est Madame la chef de l’Etat. C’est elle qui nomme le Premier Ministre et qui nomme le gouvernement ». Autrement dit, si Mme Samba-Panza décide de le maintenir dans ses fonctions, il n’y voit aucun inconvénient. Mais, ceci dit, tant qu’il restera le Premier Ministre de Samba-Panza, voudra-t-il encore se laisser dicter ou imposer certaines conduites comme c’est le cas aujourd’hui ? Dans son esprit désormais, même s’il n’est pas l’homme de la Communauté internationale, le simple fait pour Samba-Panza de vouloir le conserver à  ses côtés, l’autoriserait à jouer plus que jamais sa partition. Il sait qu’il a des comptes à rendre tôt ou tard au peuple centrafricain, et il ne souhaiterait pas être pris à défaut. Voilà pourquoi, depuis quelque temps, il se sent souvent obligé d’annoncer à l’avance certaines mesures, même s’il sait que celles-ci ne peuvent passer, sans l’accord et des décisions concrètes, que seule Samba-Panza est en mesure de prendre.

En ce qui concerne la personnalité que la communauté internationale proposerait pour remplacer Nzapayéké, s’il semble qu’elle n’a pas rejeté la proposition qui lui aurait été faite, elle resterait néanmoins catégorique voire exigeante, sur les préalables relatifs à sa cohabitation avec la Présidente de transition, et surtout ceux qui concernent les moyens dont il devrait disposer pour mener avec succès sa mission. Quoiqu’il en soit, la perspective de la nomination d’un nouveau Premier Ministre adoubé par la Communauté internationale, et doté d’une forte personnalité, n’enchante pas du tout Samba-Panza. Tous les comptes que le probable entrant, – maniaque des audits et des états des lieux à ce qu’il paraît – voudrait exiger sur la gestion de la transition depuis plus de quatre mois, pourraient se révéler très compromettants pour la Présidente. Par ailleurs, le « nettoyage » éventuel qui pourrait s’ensuivre, priverait Mme Samba-Panza, de la plupart des leviers ethnico-régionalistes, amicaux et familiaux, sur lesquels elle croit devoir s’appuyer pour diriger le pays, depuis son entrée en fonction. Passe encore la justice !

En résumé, on pourrait retenir à présent, qu’il y’a consensus sur le maintien de Madame Samba-Panza en qualité de Présidente jusqu’à la fin de la transition. C’est le cas également de l’article 106, dont la modification envisagée, risquerait de conduire à une forte augmentation des candidatures, même si elle priverait l’actuelle chef de l’Etat, de toute velléité présidentielle post transition. Quant au poste de Premier Ministre, les positions semblent bien tranchées. D’un côté, la communauté internationale, tirant les leçons de cinq mois de transition, estime une « refondation » ou une « rectification » nécessaire et salutaire. Elle passerait par le remplacement de Nzapayéké, par une personnalité bénéficiant de la confiance internationale. Telle serait aussi la condition, pour que la RCA continue de recevoir à un rythme soutenu, des aides et subventions dont elle ne peut s’en passer. De l’autre côté, Samba-Panza tient à son actuel Premier Ministre, avec lequel elle tente le rapprochement, et voudrait sceller une alliance offensive, dans le but de faire échouer l’arrivée d’un Premier Ministre largement soutenu par l’extérieur. Dans ce bras de fer, qui sortira vainqueur de l’épreuve ? Ce qui est sûr, les Centrafricains ne demandent qu’à voir le bout du tunnel.

Tout bien considéré et au-delà du tableau synoptique qui précède, l’alliance Samba-Nzapa, le duo au pouvoir, pourrait se révéler plus pernicieuse et plus redoutable qu’on ne l’imagine. Samba-Panza, une fois privée de présidentielle, qu’est ce qui l’empêcherait de pousser et soutenir la candidature de Nzapayéké en vertu de l’article 106 entretemps modifié ? Somme toute, Nzapayéké qui prend de plus en plus goût au pouvoir à sa manière, serait-il opposé à une telle alliance, ce d’autant qu’il n’a rien à perdre à tenter l’aventure présidentielle ? Et comme cela se dit souvent, on n’organise pas les élections en Afrique pour les perdre. Aussi, Samba-Panza n’organisera pas l’élection présidentielle pour que son alter ego Nzapayéké la perde. La boucle serait ainsi bouclée. On prendrait les mêmes et on recommencerait, un peu à la manière de Vladimir Poutine et Dmitri Medvedev en Russie.

Pour finir, faut-il préciser qu’au centre de ce dispositif Samba-Nzapa, se trouverait une fois de plus un homme, l’enfant terrible de la politique centrafricaine, l’intrépide Démafouth ? Ce dernier aurait mis en branle l’ensemble de son réseau tentaculaire, qui aurait noyauté depuis longtemps l’entourage de Nzapayéké qu’il entend rapprocher, pour tenter une réconciliation. Le but serait de convaincre le Premier Ministre, à adhérer à la stratégie de Samba-Panza. Quitte à ce que lui, Démafouth qui n’oublie jamais rien, prenne sa revanche tôt ou tard.

Décidément, la Centrafrique rend fou. Et des centrafricains, effectivement fous, tiennent à rendre fous, ceux qui ne sont pas du tout fous, et ceux qui ne sont pas encore totalement fous.

GJK – L’Élève Certifié
De l’École Primaire Tropicale
Et Indigène du Village Guitilitimô
Penseur Social

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