Grand format de J.Gréla

LES ARMES NE SONT PAS DEPOSEES

En province, les violences se poursuivent

 Au mois d’octobre, un « comité de sensibilisation pour la paix entre les communautés chrétienne et musulmane » a été mis en place à Bria.

« Nous sommes tous des Centrafricains »

Les vendredis, jours de grande prière pour les musulmans, les prêtres et les pasteurs viennent apporter un message œcuménique dans la mosquée de la ville. En revanche les dimanches, les imams se rendent dans les églises et les temples pour apporter un message de paix et de solidarité, rapporte le reporter de L’Humanité à Bria. Mais ça, c’est avant l’opération sangaris lancée parle président français Hollande, le 05 décembre 2013 à Bangui.

Aujourd’hui, « Bria, la Scintillante est recouverte d’une sale poussière.Non plus celle de la latérite, si belle, mais celle de la misère, de la peur et de la déshérence, si affreuse celle-là » décrit le même reporter. Chacun a oublié, à cause de l’occupant, seleka replié en provinces, le message de fraternité distillé par les artisans de paix.

A demi-mots, dans La Croix de ce dimanche 09 mars, la présidente de transition admet que « l’insécurité à Bangui baisse progressivement et significativement, malgré la manipulation et l’instrumentalisation permanente de nos jeunes par certains agitateurs, qui ne souhaitent pas la stabilisation de notre pays pour des intérêts personnels ».

Pendant qu’elle pense dénoncer l’instrumentalisation des jeunes, « Trois musulmans se rendant à l’aéroport de Bangui M’poko à bord d’un véhicule de la sûreté aéroportuaire ont été attaqués par des individus armés au quartier Combattant au moment d’une panne survenue à leur voiture. Les trois personnes ont été abattues par balle et leurs corps mutilés », a indiqué à l’AFP cette source sous couvert d’anonymat. Proche de l’aéroport où sont basées les forces française Sangaris et africaine Misca, le quartier Combattant est l’un des plus dangereux de la capitale centrafricaine. Des bandes de pillards et des miliciens anti-balakas s’attaquent régulièrement aux musulmans qui passent dans le quartier. Il est donc dangereux de se promener dans ce quartier populaire.

Les armes n’ont pas été déposées par les miliciens des deux camps. Loin des yeux des caméras et des journalistes, les exactions et violences se succèdent et se ressemblent, malgré le déploiement de forces internationales dans certaines provinces. Georgios Georgantas, chef de la délégation du Croix Rouge Internationale, dans le pays demande « à tous ceux qui possèdent des armes de respecter et d’épargner le personnel du CICR. » Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), relayé par le journal La Croix du 08/03/2014, a annoncé que des hommes armés ont fait irruption à la mission catholique à Ndélé où sont basés quatre employés de la Croix-Rouge locale et ont tué l’un d’eux. « Nous sommes indignés par ce meurtre » ajoute-il, attristé.

Vendredi déjà, les Médecins Sans Frontière s’étaient émus de l’augmentation du nombre d’attaques et de vols dont sont victimes les travailleurs humanitaires en Centrafrique.

Paris entre impasse et réussite

La langue des spécialistes se délie, leur voix s’entrechoque avec celle des politiques qui ont minimisé la situation en Centrafrique avant l’opération sangaris. L’Etat français et ses agents de renseignement ont sous-estimé la profondeur des exactions et de l’innommable subies par les populations du temps où la séléka faisait régner la terreur. Un premier bilan, cependant, de l’opération sangaris trois mois après pose le constat suivant : « La mission n’est pas un échec. Il y a des réussites évidentes. Mais il faut le reconnaître, tout ne s’est pas déroulé au mieux et aujourd’hui la France est dans une forme d’impasse en RCA», justifie un haut fonctionnaire dans le Figaro.fr du dimanche. « La France et ses alliés africains n’ont pas pu mettre un terme à la grave crise qui secoue la Centrafrique même si son arrivée a, sans aucun doute, permis d’éviter des tueries et des massacres sur une immense échelle. Centrafrique est un champ de ruines sans véritable État, ni administration, tandis qu’une crise humanitaire guette les populations démunies » précisent les commentaires de ces spécialistes.

Les raisons de ces manquements sont à chercher dans la conception même de l’opération, observe sévèrement un responsable français qui explique : «Les renseignements dont nous disposions étaient trop imprécis et reposaient sur une vision vieillotte de la Centrafrique. “Sangaris” n’a donc pas été pensé comme il aurait fallu»« Arrivée trop tard, avec trop peu de troupes, poursuit-il, l’armée française connaissait aussi mal ses ennemis. Le 6 décembre, à Bangui, les militaires sont ainsi surpris par la pugnacité de la Séléka, la milice musulmane qui a porté au pouvoir Michel Djotodia en mars 2013 et martyrisé les civils. Là où ils comptaient sur une débandade, ils ont découvert une résistance. Pire encore, personne ne semble avoir pris en compte l’autre groupe armé, les anti-Balaka, un mouvement (dit anti-défense), qui a attaqué la capitale.» La France qui pensait venir pour une opération de désarmement, s’est retrouvée dans une interposition entre des groupes de populations et des milices, a  résumé un officier transcrit par leFigaro.fr dans sa rubrique International.

Bruits de bottes et regroupements dans le nord

Dans La Croix du 08/03/2014 la présidente de transition s’est insurgée samedi à l’occasion de la journée internationale de la femme contre les tueries et exactions dont sont victimes les musulmanes et les musulmans dans son pays en proie à des violences. « Nous ne pouvons continuer à encourager l’intolérance, la xénophobie et les actes ignobles contre nos frères et sœurs musulmans qui ont toujours vécu dans la plus parfaite harmonie dans le pays avec nous », a-t-elle invoqué.

Pendant ce temps des regroupements d’hommes armés ont été notés à Bria mais aussi à Birao et à N’délé, les sanctuaires des sélékas. Les chefs de la rébellion battus font le tour de leurs amis pour trouver de nouveaux fonds, s’équiper et rebrandir la menace de la partition. Les armes ne sont pas déposées et ne sont prêtes d’être déposées tant, il y a l’esprit de partition qui anime les sélékas dans leurs lieux de retranchements. Ils continuent à s’organiser et à s’armer. Les armes ne devraient-elles donc pas « parler » suffisamment pour les repousser hors du pays ? Mais où ? Madame la présidente sera-telle un chef de guerre, la Jeanne d’Arc de Centrafrique pour anéantir et réduire en cendres les selekas ? Du côté du pouvoir, « Catherine Samba-Panza peine à s’imposer » estime un homme politique centrafricain. «Elle ne dispose pas de la poigne et des réseaux pour se faire entendre», conclut-il

La France, elle, joue la montre. Elle compte surtout sur la mission de l’ONU composée des casques bleus qui ne seront pas à Bangui que vers mi-septembre « pour se sortir de ce mauvais pas.» rapporte le Figaro.

Quant à Adrien POUSSOU, un centrafricain,  dans la tribune d’Alwihda.frde ce dimanche 09 mars, il explique longuement sa position sur le déploiement de casque bleu en Centrafrique. « Pourquoi le déploiement des casques bleus en Centrafrique n’est-il pas souhaitable ? » « Ma conscience de nationaliste, épilogue-t-il, de patriote engagé, dévoué et responsable, me fait un devoir de prendre la voie du sacrifice que représente le périlleux risque de ramer à contre-courant des poncifs à la mode pour dire clairement que l’idée de faire déployer des troupes onusiennes sur notre sol est proprement une fausse bonne idée. D’abord, parce qu’elle participe de la mise à l’écart des Forces armées centrafricaines (FACA). Or, nul ne rétablira la sécurité en Centrafrique sans aller au contact des groupuscules armés dans leurs sanctuaires provinciaux. Et cela, il n’y a que des soldats centrafricains qui connaissent comme le contenu de leurs poches les moindres sentiers et les moindres pistes de chasseurs pour le faire. L’urgence  est  donc de remettre  les FACA au centre du dispositif sécuritaire. Il faut donner tous les moyens, vraiment des moyens et encore des moyens aux soldats centrafricains pour régler l’épineuse question de l’insécurité dans le pays ».

De la musique pour essuyer les larmes

Centrafrique s’est enfoncé dans des violences et des exactions diverses et innommables, depuis 23 mars 2013 avec l’avènement des selekas qui ont pris le pouvoir en chassant Méphistophélès Bozizé.

Des artistes musiciens centrafricains de la diaspora qui pensent aux infrastructures culturelles détruites, offrent un concert nommé«Concert de Solidarité avec la Centrafrique », ce 10 mars, 20 h 30, au Théâtre de la Ville, 2, place du Châtelet, Paris 4e. Ce concert verra la présence de Ray Lema, Youssou N’Dour, Bonga, Lokua Kanza, So Kalmery, Idylle Mamba… La totalité de la recette sera versée au profit de la reconstruction de l’Espace Linga Téré de Bangui. Tél. : 01-42-74-22-77. Tarif unique : 20 €.

 

A Bagneux, le 10/03/2014

Joseph GRÉLA

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