Tribune de A.Pakoua

LE CENTRAFRIQUE VICTIME DE LA POLITIQUE

Le CENTRAFRIQUE est connu comme une de ces curiosités mondiales, qui change de régime comme un homme de chemises, une femme de robes. Cette alternance régulière aurait porté le pays sur le podium des nations dont le système d’alternance démocratique n’autorise pas l’avènement au pouvoir d’une bande armée assoiffée de privilèges, mais à cause de son accoutumance aux coups d’État, le CENTRAFRIQUE se retrouve relayé au dernier rang des pays socialement et administrativement organisés.

Loin de revenir sur les différents coups de force qui ont jonché et jonchent encore le parcours du CENTRAFRIQUE en tant que nation libre, nous ne nous épargnerons pas l’effort de nous poser la question de savoir si réellement la politique, au sens noble du terme, a sa place dans ce pays. Nous voulons savoir si la politique consiste, pour un pays, à avoir des partis politiques (dans le cas du CENTRAFRIQUE des partis politiques aléatoires), un Président de la République, un Gouvernement et une Assemblée (qu’on appellera Nationale) pour faire croire au monde qu’on a un État.

En effet, quand les personnalités qui composent ces institutions, qui les représentent ne sont là que pour la forme, car ne sachant pas dans quelle direction elles vont, quels devoirs et quelles missions elles doivent rendre à leur peuple, l’on ne peut guère s’étonner qu’aujourd’hui, même après l’ouragan de la SELEKA, BANGUI en soit réduite à la poussière, pour ne pas parler des provinces, que la forêt et la brousse ne sauraient engloutir assez rapidement.

Un peu plus de trois mois viennent de s’écouler, trois mois après l’éviction de la SELEKA du pouvoir, trois mois d’une nouvelle gouvernance de transition.

Les saccages effectués par la SELEKA et ses bourreaux ont atteint un tel degré de destruction que personne ne serait assez insensé pour demander à un gouvernement de transition, quel qu’il soit, de réparer en trois mois les dégâts commis par la SELEKA.

Et pourtant, ce constat ne doit pas être considéré par le pouvoir transitoire, comme un quitus qui lui serait délivré pour dormir tranquillement en attendant que les choses s’améliorent d’elles-mêmes ou en attendant que d’autres le fassent à sa place.

Quand après trois mois d’exercice, le Chef d’État de la transition décide de procéder à un remaniement gouvernemental, c’est l’expression d’un aveu d’échec du gouvernement en place. C’est donc logique de le remplacer.

Quand le chef d’État de la transition se propose de mettre en place un nouveau gouvernement, plus large et plus représentatif, nous nous posons de sérieuses questions.

Des critiques bien fondées avaient été déjà émises lors de la composition du gouvernement qui va être remanié, qui remettaient en cause la proximité familiale ou amicale de certains membres avec le chef de l’État, la présence de « personnalités » fourbes ayant des connivences avec les mouvements armés « rebelles » de la SELEKA, pour considérer que cette démarche ne contribuerait pas à faire avancer rapidement le CENTRAFRIQUE vers une sortie rapide de la crise.

Aujourd’hui, le chef de l’État de la transition se propose de constituer un gouvernement plus large et plus représentatif.

En quoi est-ce que ce gouvernement sera plus large ? Est-ce pour y introduire tous les groupements qui se disent « partis politiques », toutes les entités qui ont porté les armes, les membres de cette fameuse société qu’on appelle « société civile », ou encore pour amener davantage de connaissances, de parents ou d’amis autour du banquet ? Ou encore, pour que la représentativité soit plus visible, faire appel aux imams, aux prêtres et aux pasteurs, car chacun a vu le rôle que certains d’entre eux ont joué pour tenter de ramener la paix dans le pays ?

Le problème centrafricain est un mal profond, pour qu’on puisse le tourner en dérision. Le CENTRAFRIQUE traverse une crise majeure, il n’est pas question de faire encore un gouvernement plus large, mais un gouvernement resserré et efficace, capable de se donner un cap et d’orienter tous ses efforts dans cette direction. Quand nous parlons de « tous ses efforts », c’est tout simplement pour dire qu’il faut composer une vraie « équipe », avec des éléments déterminés à jouer tous dans le même sens, avec davantage d’efficacité.

Il ne faut plus chercher à élargir inutilement le gouvernement, le pays a seize préfectures : il faut dénicher dans chaque région la personnalité capable de parler au peuple, à travers son département, pour ramener tout le monde à la raison. C’est dire que seize grands ministres, et alors de vrais ministres, suffisent, s’ils sont bien nommés et épaulés ensuite par des hommes eux aussi valables. Cette équipe, le CENTRAFRIQUE n’en est pas dépourvu. Il suffit de bien regarder, de faire les bons choix pour que le chemin vers l’unité et la paix soit raccourci.

Adolphe PAKOUA

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