Grand format de J.Gréla

« Bria, la scintillante » devenue prisonnière ou sanctuaire des sélékas Populations meurtries, épuisées et abandonnées

Bria, jadis, « la scintillante », pour ses diamants, n’est que l’ombre d’elle-même à l’heure où les maîtres des lieux, sélékas, prennent leurs aises en martyrisant les populations sans se soucier de l’importance de la vie humaine. Bangui de même, « la coquette » est surnommée désormais Bangui « la roquette », par des journalistes, et aussi ville où séjourne « le dernier survivant de la caravane »
Désespoir infini 

Le  Metronews  titre dans son édition du 04 mars 2014 : « La Centrafrique entre deux précipices » pour expliquer « les conditions de vie précaires dans l’immense camp de M’Poko à Bangui et la crise nutritionnelle en vue ». Malgré la situation sécuritaire qui ne s’améliore que lentement, la crise humanitaire menace de s’aggraver dramatiquement après le cycle des massacres. Les habitants de Bangui ou des provinces réfugiés dans divers camps ne sont « pas prêts de rentrer chez eux » renchérit Le monde Afrique du 05 mars 2014. Plus personne n’a rien. « Là-bas, ils ont tout brûlé », explique Boubacar Yeola, centrafricain et musulman, un habitant de Bocaranga réfugié de l’autre côté de la frontière, au Tchad, à Mbitoye, qui a encore du mal à y croire, rapporte le journal. Quant à Ouma Maya, elle se demande :«Pourquoi voulez-vous que l’on y retourne ? On n’a plus rien là-bas »dans un air de désespoir infini. Alors que « dans le passé, raconte Aboubacar réfugié dans cette même petite ville rurale saturée, perdue au milieu de la brousse, « nous avons connu des attaques de l’armée. Chrétiens et musulmans fuyaient ensemble. Mais ça, ce n’était jamais arrivé. » Aladi Séré, plus amer et pessimiste, s’offusque dans le journal :« Même dans dix ans, cette guerre ne sera pas finie

A Bangui, pour Thomas Vampouille de Metronews « La Centrafrique va un peu mieux. Mais elle ne va pas bien non plus » même si des milliers de vies ont été sauvées. Ce qui éclaire son titre. « Il reste la peur, qui continue de dresser les uns contre les autres.» Il reste « les pillards qui font leur miel du chaos.»

A cette situation, s’ajoutent, selon le journaliste, une crise nutritionnelle et les risques sanitaires. La saison des pluies qui débute en mars, les démultipliera. « Avec la crise, c’est l’économie qui a été balayée. Dans leur chute, les musulmans ont emporté avec eux le commerce, faisant monter les prix. Et le nouveau gouvernement, installé depuis un mois, est à sec et n’a pas les moyens de payer ses fonctionnaires. Pour compliquer le tout, l’agriculture entrera en avril dans la période dite ‘de soudure’, entre deux récoltes».  «La faim est proche» conclut-il avec cette hyperbole criante.

Calme relatif faute d’ennemis ou de cibles : la guerre est loin d’être finie, 

observe Le monde Afrique du 05 mars 2014 mis à jour par Rémy Ourdan qui parie sur l’opération « Sangaris » comme une « chronique d’un échec annoncé »

Trois mois après le lancement de l’intervention militaire française  Sangaris, dit-il, « le constat est amer ». […] « Les forces étrangères ont assisté à une campagne croisée de tueries qui sera un jour qualifiée, si la justice internationale s’en saisit, de « crimes contre l’humanité », s’indigne un observateur européen fin connaisseur de Centrafrique.

Le monde décline alors en trois étapes l’intervention de sangaris :

La première étape fut le désarmement de la Séléka et son départ de Bangui, symbolisée par la chute de son président Michel Djotodia, le 10 janvier. La deuxième est le conflit contre les anti-balakas les « invincibles » décrit le journal, qui sont passés à une guerre sans pitié contre la population musulmane.

La troisième, prévisible même si nul ne peut affirmer quand elle aura lieu, devrait de nouveau opposer les forces étrangères et la Séléka qui, actuellement, occupe la ligne de démarcation qui va des régions de Kabo au nord à Mobaye au sud, en passant par Kaga-Bandoro et Bambari. « La Centrafrique est de facto divisée entre l’ouest et l’est. »argumente le journal. L’évidence se trouve sur la cartographie du pays…

La scintillante Bria, prisonnière ou sanctuaire des sélékas 

A l’est de cette ligne invisible actuellement et que nul n’évoque officiellement, la Séléka contrôle encore des territoires où elle se livre à des assassinats et des pillages. Dans certaines villes, les chrétiens sont majoritaires, comme à Bambari ou Bangassou, ou représentent la moitié de la population, comme à Bria. Ces régions sont aussi celles,stratégiques, du diamant et de l’uranium, de l’or…

La guerre a provoqué le mouvement d’un quart à un tiers de la population centrafricaine, selon l’ONU. Environ 300 000 Centrafricains sont réfugiés à l’étranger. La majorité des civils qui ont fui leurs maisons sont toutefois encore dans le pays, dans des camps de réfugiés. Ces déplacés internes sont au moins 700 000.

Il resterait entre 100 000 et 150 000 musulmans piégés en secteur contrôlé par les anti-balaka, dans l’Ouest, en attente de convois d’évacuation. Ils sont le plus souvent assiégés autour de mosquées ou de mairies. Par ailleurs, des chrétiens peuplent de nombreux camps de déplacés, même dans les régions où les Séléka se sont retirés, effrayés par l’insécurité et les pillages.

Et ils sont encore des centaines de milliers dans l’Est, livrés aux violences de la Séléka. 

Le seul véritable succès est, en fait, l’objectif initial : le départ de Djotodia et de la Séléka de Bangui. Sangaris a déçu les centrafricains par son interposition molle, sans tuer ni arrêter les pires criminels de guerre. Sangaris les a laissés quitter Bangui avec leurs armes et munitions au lieu de les chasser manu-militari. L’armée française a donc trahi sa mission.

Des officiers français sont outrés par le déni de réalité en vogue à Paris et dans les discours officiels français à Bangui, assure Le Monde, ce mercredi 05 mars 2014 « le commandement est trop timoré », critique un officier supérieur. « Que l’on prenne quelques semaines, malgré ses crimes passés, pour désarmer l’armée de la Séléka, et ainsi éviter un conflit trop violent, c’est compréhensible. Mais en revanche, qu’on n’intervienne pas tout de suite et durement contre les anti-balaka, qui sont devenus les principaux criminels de guerre depuis trois mois, est incompréhensible. C’est du gâchis. »

Et de poursuivre son indignation : « Malgré des opérations ponctuelles utiles sur le terrain, je crains que nous soyons de facto un jour accusés de non-assistance à population en danger, ce qui était précisément la raison de l’intervention. »

Les organisations humanitaires telles qu’Amnesty International et Human Rights Watch dressent le même constat très critique envers Sangaris,même si l’intervention militaire est perçue comme légitime.

Ce climat de peur et du désespoir n’a pas empêché l’envoyé spécial de  l’Humanité du 28 février, 1er et 2 mars 2014 de se rendre, à Bria, au coeur des mines de diamants et dans les régions du centre et du nord où sont repliés les ex-Séléka, ces milices d’obédience souvent musulmane pour rencontrer et peindre la population meurtrie.

« Bria la Scintillante », dans les grandes allées poussiéreuses de latérite, on ne distingue avant tout que des hommes en armes, aux treillis dépareillés, pas toujours très avenants. Il est en de même pour Ndélé, autre ville, fief et refuge des Séléka, chassés et forcés, de quitter la capitale, par les troupes françaises de l’opération Sangaris et la Misca. Ces villes occupées exhalent un parfum lourd, suspicieux qui couve des tensions latentes perceptibles. Tous se préparent et guettent l’arrivée des forces internationales. Négocieront-ils la paix pour espérer ainsi devenir une force politique ou bien livreront-ils une bataille avant de battre en retraite ? La question de la partition, vraisemblablement, demeure entière à cet égard (cf la revue de presse du 04 mars).

« On maintient la paix en Haute-Kotto »,

affirme Robert Morgodé, le préfet qui reçoit le reporter dans sa tenue d’apparat.

De son côté, le Journal de Bangui sous la plume de son reporter Jean René Meva’a Amougou à Baboua, ce jour 05 mars 2014, signale que les habitants de cette région de l’ouest frontalière du Cameroun entendent des bruits de bottes silencieux de Méphistophélès Bozizé qui a pris les habits du «guerrier invisible». Il apparait et disparait « mais présent ». Il sensibilise à sa manière les habitants de la ville de Baboua. Les services de renseignements de la Misca sont à sa trousse depuis que l’Onu a publié une liste de huit noms de responsables soupçonnés de soutenir les Séléka ou Anti-balaka dont celui de MéphistophélèsFrançois Bozizé et l’un de ses fils. Ils assurent que « tous les efforts sont centrés sur sa localisation».

Serait-ce une rumeur ? Des témoignages recueillis attestent cette présence mais l’hebdomadaire Jeune Afrique, lui, croit qu’il se trouve en Ouganda dans les régions des Grands Lacs.

Pour le Centrafricain : La guerre est loin d’être finie. La faim est proche.

A Bagneux, le 06/03/2014

Joseph GRÉLA

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